Forcés de quitter leurs magasins lors de la sécurisation du quartier après l'effondrement d'un immeuble, ils ont perdu leur unique source de revenus. Ils disent vivre un cauchemar ; ils ne comprennent pas qu'on vienne les obliger à quitter leurs magasins pour les ignorer après. Devenus chômeurs par la force des choses, des commerçants du quartier Napolitain, ou plutôt ce qu'il en reste, ne cachent pas leur crainte devant le silence des pouvoirs publics. Rencontrés au milieu des décombres, 14 commerçants sans locaux vident leurs sacs. «Cela fait un mois qu'on ne cesse de nous balancer d'une administration à une autre sans jamais nous laisser entrevoir le moindre signe positif. Là où on va, on se contente à chaque fois de nous demander d'aller plutôt voir le wali», témoigne l'un des commerçants. Fédérés en un collectif, ces commerçants entendent défendre leur cause. «Lorsqu'on était venus nous intimer l'ordre de vider les lieux, nous exercions le plus normalement du monde, et il nous a fallu débarrasser nos marchandises, la nuit-même, sans l'aide des autorités locales. On n'a pas entravé l'opération menée pour sécuriser les habitants des immeubles qui englobaient nos commerces. On a coopéré, mais aujourd'hui, nous naviguons à vue ne sachant même pas de quoi seront faits nos lendemains», rajoutent nos interlocuteurs. Ces derniers, tous des pères de famille, vivaient de leurs activités commerciales. Entre propriétaires ou locataires, certains exerçaient depuis plus de 50 ans dans ce quartier populaire de la ville de Skikda. «Nous sommes des citoyens, tout comme les habitants du quartier. Nous avons assumé nos devoirs en collaborant lors de l'opération de démolition ; qu'on ne nous prive pas aujourd'hui de nos droits légitimes.» Lassés du silence qu'on leur impose, ils ont fini par comprendre que seule l'union faisait la force. «Nous venons de rédiger une requête collective que nous comptons envoyer au wali et nous espérons avoir des réponses à nos questions», déclarent nos interlocuteurs. Dans cette correspondance, les commerçants signataires, après un bref retour sur la genèse de leur malheur, rappellent que lors de deux précédentes opérations de démolition des commerces, opérées dans ce quartier en 1995 et en 2011, les commerçants, contraints de fermer boutique, avaient tous été dédommagés. «Nous souhaitons nous entretenir avec le wali et discuter sereinement avec lui des suites que l'administration compte nous réserver. C'est notre unique souhait vu que tous les services et autres administrations que nous n'avons cessé de solliciter ne nous ont même pas répondu», explique l'un des commerçants du collectif. Même s'ils ne le disent pas, et en plus du fait d'avoir perdu leurs uniques sources de subsistance, ces citoyens sont beaucoup plus peinés par le silence qu'on continue de leur signifier, comme s'ils n'existaient même pas. Ils disent cependant garder espoir de rencontrer le wali, «car c'est notre seule chance de recouvrer nos droits et notre dignité», insistent-ils. Advertisements