L'affaire Rouisset-Tébessa (El Watan du 7 mai 2005) a scandalisé les responsables du football et à leur tête le président de la fédération algérienne de football (FAF), Mohamed Raouraoua, qui a promis de prendre des sanctions, lors de son passage (samedi) au forum de l'ENTV. Cet épisode relance le débat sur la combine et la corruption (présumées, selon la FAF et la LNF) qui rongent le football algérien. Dans le contexte actuel et réglementaire, les deux clubs cités ne risquent rien de grave. Rouisset est relégué d'office et Tébessa ne risque rien au chapitre réglementaire, puisque le match se jouait à l'extérieur et la présence de ballons ne relève pas de sa responsabilité. Par contre, au plan moral, c'est une autre paire de manches. Pour les observateurs avertis, cette fin prématurée dégage une très forte odeur d'arrangement entre les deux équipes. A un confrère qui lui demandait ses impressions sur la bizarre fin de match, intervenue après l'étrange disparition des ballons, un joueur de l'équipe locale (Rouisset) dira : « nous (les joueurs) avons fait notre devoir sur le terrain en jouant loyalement. Le reste (la disparition des ballons et la fin de match avant l'heure), ce n'est pas notre problème. » A priori, l'affaire Rouisset-Tébessa est loin d'être un épisode isolé. Selon un dirigeant d'un club du sud, « ce scénario est monnaie courante dans notre région. Il y a une forte similitude entre le match Rouisset-Tébessa et Mekhedma-Hassi R'mel. Lors de cette rencontre, l'arbitre a été contraint d'arrêter la partie à trois minutes de la fin du temps réglementaire, lorsque des supporters de l'équipe locale (Mekhedma) ont commencé à bombarder le terrain et les joueurs de projectiles... alors que leur équipe menait un but à zéro. A-t-on idée de provoquer l'arrêt du match lorsque ses favoris mènent devant le leader à une poignée de minutes de la fin du match ? Il doit bien y avoir une raison (cachée, bien sûr !) », conclut notre interlocuteur. Contre ce type de pratique, les instances de football n'ont pas de parade parce que les esprits indélicats qui planifient ces issues de match prennent toujours soin de ne pas mordre la ligne rouge, sous peine d'être épinglés. La ligue interrégions a étudié le dossier hier et préparé la décision. Elle se serait basée sur l'article 101, alinéa 2 des règlements généraux : « Sur terrain neutre, les clubs en présence doivent fournir chacun au moins deux ballons en bon état... Si les deux clubs ne fournissent pas de ballons, ils auront match perdu par pénalité, et une amende de vingt mille dinars chacun leur sera infligée ». Cet article ne peut s'appliquer aux deux équipes pour la simple raison qu'elles n'ont pas joué sur terrain neutre. Le dossier, avec des propositions, devrait être transmis à la FAF dans les prochaines heures. Rouisset-Tébessa est la preuve que des dirigeants n'éprouvent aucune crainte lorsqu'il s'agit d'emprunter la voie de la combine. Ils sont encouragés par la démarche préconisée par la FAF et la LNF : « fournissez des preuves et on agira en conséquence. » Résultat des courses, les coupables sont encouragés. L'exemple de l'arbitre Amrane est édifiant. Convaincu qu'il a reçu de l'argent d'une partie (pour ne pas dire un club), puisque lui-même l'aurait avoué au dirigeant qui l'a auditionné au niveau de la ligue nationale, il aurait été rayé du contingent du corps arbitral, sans que l'autre partie soit inquiétée outre mesure. Y a pas de meurtre sans cadavre, dit-on. La FAF et la LNF ne partagent pas cette vérité. La combine et la corruption ont encore de beaux jours devant elles.