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Le calme revient
Emeutes de la ville d'Arzew
Publié dans El Watan le 27 - 10 - 2005

La ville d'Arzew a vécu trois jours durant l'« enfer », elle a failli basculer, par la faute d'un arrêté administratif « absurde » de démolir une centaine de kiosques et de baraques de fortune, dans le chaos. Tout au long de la nuit du mardi au mercredi, des heurts ont opposé les forces de l'ordre aux jeunes désœuvrés des cités-dortoirs qui se sont soldés officiellement par une cinquantaine de milliards de centimes de dégâts matériels, 54 arrestations, plusieurs blessés et un second décès.
En effet, de source sécuritaire, l'on apprendra que Mohamed B., 44 ans, a succombé, mercredi matin vers 6h, à une blessure par balle aux reins. Il a été transféré d'urgence à l'hôpital d'El Mahgoun puis évacué vers le CHU d'Oran où il succomba des suites de ses blessures. Une source hospitalière nous confiera que plusieurs blessés ont été soignés et traités au niveau de cette structure hospitalière jusqu'à 3h. Hier, en cours de journée, 27 jeunes ont été placés, par les autorités judiciaires de la ville, sous mandat de dépôt. Par ailleurs, les pouvoirs publics ont tenté de rattraper une situation, qui leur a complètement échappé trois jours durant, par la mise en place d'une cellule de crise au niveau de la wilaya d'Oran et la création d'un comité des sages présidé par le président de l'Assemblée populaire de wilaya et le directeur des affaires religieuses et des wakfs d'Oran. Des kiosques et des emplacements seraient, semble-t-il, octroyés aux jeunes en compensation de ceux détruits. Ceci étant dit, il serait sans aucun doute judicieux aux pouvoirs publics en charge de la gestion des affaires publiques de s'arrêter un peu et d'analyser la situation objectivement, car la démolition n'est en fait que la face visible de l'iceberg. En effet, Arzew se distingue, sans aucun doute plus que toutes les autres villes d'ailleurs, par un taux alarmant de jeunes chômeurs et souvent malgré eux « harragas » candidats à l'exil forcé.
Candidats à l'exil forcé
Malgré toutes les dispositions réglementaires, le nombre de candidats à l'exil forcé dépasse l'entendement. Pour l'année 1999, les autorités compétentes ont recensé pas moins de 175 tentatives d'embarquement à partir du port d'Arzew. Au cours de l'année 2000, pas moins de 133 jeunes ont été pris en flagrant délit de tentative d'embarquement clandestin. Il est à signaler que ces tentatives ratées n'entrent pas dans le nombre, certainement très élevé, de jeunes ayant réussi leur coup. Ces chiffres révèlent l'ampleur des difficultés de la vie, du chômage auquel sont confrontées de larges couches de la jeunesse, de la marginalisation systématique et de la mise à l'écart, qui sont autant de raisons évoquées par les fugueurs et qui les poussent à tenter le voyage de la dernière chance. Et parmi eux, bien sûr, ceux qui appartiennent aux milieux les plus pauvres. Souvent des enfants exclus du système éducatif trop tôt et trop vite assimilés aux fauteurs de troubles qui ont soudain, par leur violence, leur anticonformisme et leurs « casses » attiré l'attention sur le sort souvent désespéré des habitants des cités-dortoirs. Mais, plus encore que les abandonnés du système d'enseignement, c'est bien l'instauration d'une société à deux vitesses, sans autre projet que celui d'être des marginaux, sans autre choix que celui de tenter désespérément, dans un éternel recommencement, des tentatives d'embarquement clandestin à partir du port qui motivent ses jeunes. Car Arzew, reconnue par tous comme étant le poumon de l'économie nationale, nie le droit au travail pour tous et prive d'avenir une grande partie de sa jeunesse. La ville d'Arzew illustre de façon quasi caricaturale cette exclusion. Dès la nuit tombée, des groupes de jeunes se forment aux abords des immeubles, à la périphérie des cités. Ils s'adonnent à toutes sortes de jeux, souvent interdits et de défis souvent répréhensibles pour échapper à l'oisiveté et à la platitude de leur quotidien. Leurs soirées généralement pimentées de boissons alcoolisées et de joints de « zetla » se terminent souvent par des rixes et des empoignades qui indisposent le voisinage. Au-delà d'une certaine heure de la nuit, ils redeviennent les maîtres incontestés et incontestables des lieux. Ceux qui s'aventurent pour une raison ou une autre, dans ce no man's land sont ou rackettés ou pris à partie. Cet état de fait, nous confiera un psychosociologue, « trouve toute sa signification dans la mesure où l'existence du jeune exclu est privée de sens, ce qui se traduit peu à peu par la petite délinquance, la drogue, le vandalisme... des réactions qui permettent soit de s'affirmer face à une société qui vous nie, soit de retrouver une identité collective au sein du groupe d'appartenance. Pour les jeunes, victimes de cette montée des inégalités, l'injustice est vivement ressentie, d'où la recrudescence des comportements de délinquance et des comportements déviationnistes. Ce qui s'explique sans aucun doute par la grande pauvreté dans une société qui continue à s'enrichir au profit exclusif des mieux lotis ».
La désillusion ou le rêve brisé
Mardi soir, vers 21 h, Kouider, un jeune âgé de 26 ans, assis sur un monticule de la cité des Plateaux, dominant la zone industrielle d'Arzew, se prépare à descendre au centre-ville pour reprendre les échauffourées avec les services de l'ordre nous confiera : « Je ne suis pas fier de ma condition. J'ai tenté des centaines de fois de me débrouiller un boulot, mais ces gens-là (d'un hochement de la tête, il désigne les usines de la zone industrielle d'Arzew) ne veulent pas de personnes comme moi. Ils ont toujours la réponse qu'il faut pour te couper tout espoir de trouver un travail. Aux exclus du système éducatif, comme moi, ils nous demandent des diplômes. Aux jeunes universitaires, ils demandent l'expérience. Enfin, pour ceux qui sont universitaires et expérimentés, ils avancent le critère de l'âge, sous prétexte que l'entreprise procède au rajeunissement de ses effectifs pour préparer la relève ? Alors moi, j'ai décidé de me révolter sinon pourquoi rester ici, je n'ai même pas de copine comme tous les jeunes de mon âge. Je n'ai même pas de quoi me payer un café. » Hamid, un autre jeune, nous dira : « Depuis que j'ai raté mon baccalauréat, il y a trois ans de cela, j'ai tenté l'impossible pour me débrouiller un travail. J'ai fait une multitude de petits boulots sans intérêt. En désespoir de cause, je me suis résigné à tenter ma chance ailleurs. Je n'arrête pas de me dire : puisque ici, on ne veut pas de moi, j'irais ailleurs, là-bas, au moins je serais un étranger dans un pays étranger au même titre que tous les autres. » Un chef d'entreprise ayant requis l'anonymat nous confiera : « Les jeunes non qualifiés sont les victimes prioritaires, et durables, du fonctionnement du marché du travail. Face à un coût collectif gigantesque, apparaissent clairement les insuffisances du marché de l'emploi et de sa gestion à court terme, privilégiant la rentabilité immédiate plutôt que l'intégration à long terme. Il nous faut payer aujourd'hui les pots cassés. Nous ne récoltons, au fond, que ce que nous avons semé. » Devant la monotonie, l'oisiveté et l'exclusion, le désir de prendre le large devient une obsession chez beaucoup de jeunes des cités-dortoirs pour qui l'avenir est de plus en plus sombre. Cependant, lorsque le rêve courtise l'aventure, le désir d'aller voir ailleurs sera toujours plus fort que la vie. Tant que les causes du désespoir de toute une jeunesse ne seront pas bannies, il y aura toujours des candidats à l'exil forcé.


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