Le plus vieux clown du monde continue à faire ses tournées pour faire rire et semer la bonne humeur. A 80 ans, Oleg Popov, ancienne gloire du cirque soviétique et plus vieux clown du monde en exercice, continue de partir en tournée six mois par an et n'envisage pas de ranger le nez rouge qu'il porte depuis six décennies. «Il a fait l'histoire et est devenu célèbre dans le monde entier, voici le vrai, le seul, l'unique Oleg Popov», lance Monsieur Loyal en queue-de-pie crème au millier de spectateurs assis sous le chapiteau jaune du Grand cirque d'Etat de Russie, planté à La Haye. Un petit homme à la tignasse jaune paille sous une casquette à carreaux noirs et blancs entre en piste. Il chantonne en russe, un manche de parapluie hérissé de ballons à la main. Son veston noir est trop court, son pantalon rayé lui arrive à mi-mollet. Son nez est rouge comme son nœud papillon. Entre les numéros de caniches savants, d'acrobates et de dompteurs, Oleg Popov fait voler des louches dans des seaux à champagne ou «regonfle» avec une pompe à vélo son partenaire de trente ans, Volodimir Visenko, un Ukrainien de 60 ans. Avec son épouse allemande Gabriela, 49 ans, il jongle et fait le magicien. Il a commencé à être clown en 1949 en URSS et assure ne pas s'en lasser. «Le travail de clown est très intéressant car c'est un travail artistique, et l'art est une mer sans fin», dit joliment l'octogénaire. «Il faut toujours avoir de nouvelles idées», poursuit le vieil homme au regard bleu vif et bienveillant qui dit «aimer faire rire les gens, en privé aussi». «Je suis très heureux, assure-t-il, si je devais recommencer ma vie, je redeviendrais clown.» Oleg Popov, né à Moscou en 1930 dans une famille modeste sans lien avec le cirque, entre à 14 ans à l'Ecole du cirque de Moscou où il apprend à jongler en marchant sur une corde. A 19 ans, il entame une carrière de clown. En 1956, il sort d'URSS pour la première fois : le régime soviétique, qui juge le clown bon pour son image à l'étranger, l'envoie en tournée en Europe de l'Ouest. «France, Australie, Etats-Unis, Japon, Israël, Cuba...» : le clown égrène la liste des pays où il a donné des galas pendant plus de trente ans. «Il ne faut pas croire que je pouvais quitter librement l'Union soviétique : je n'avais pas le droit de sortir du cirque, on était surveillé en permanence par des agents du KGB», raconte-t-il. Après l'effondrement de l'URSS, Oleg Popov choisit de poser ses valises en Allemagne, le pays de sa seconde femme Gabriela, épousée en 1991, et travaille dans différents cirques. Il part désormais chaque année en tournée pendant six mois avec le Grand cirque d'Etat de Russie, qui appartient à une famille néerlandaise, surtout en Allemagne, mais aussi en Belgique, au Luxembourg et aux Pays-Bas. «Je travaille six mois par an, le reste du temps je regarde les oiseaux voler dans le ciel», dit en riant l'artiste. Oleg Popov est resté très simple malgré la célébrité, assure le Monsieur Loyal du cirque, Thierry Dourain. «Il ne prend pas des airs de star, même quand Vladimir Poutine lui téléphone pour son anniversaire», dit-il. Le clown ne dit pas quand il s'arrêtera. Le directeur du cirque, Willem Smitt, a, lui, une petite idée. «Il pense qu'il mourra au cirque, qu'un jour Dieu l'appellera dans sa loge ou sur la piste».