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Les artistes arabes en quête de renouveau
La 10e biennale de Sharjah bousculée par les révolutions
Publié dans El Watan le 09 - 05 - 2011

Du 16 mars au 16 mai se tient la Biennale d'art contemporain de Sharjah du nom de cette ville-émirat (Al Shariqa en arabe), l'une des sept entités composant les Emirats arabes unis. La particularité de cette édition (la 10e déjà) réside sans doute dans le fait qu'elle survienne au plus fort de l'éveil intempestif des sociétés civiles arabes.
Sharjah (Emirats arabes unis).
De notre envoyé spécial

Aussi est-ce sous le signe de la subversion que cette grand-messe artistique a-t-elle été étrennée. D'ailleurs, le thème des révolutions arabes reviendra sous différents avatars hanter les salles d'exposition et bousculer les cimaises. En conférence de presse, la veille du vernissage, Jack Persekian, le désormais «ex-directeur» de la Sharjah Art Foundation, (et qui a été viré par l'émir de Sharjah, le cheikh Soltane Ibn Mohamed Al Qassimi en raison précisément du «casting» artistique effectué par ses collaborateurs, et du caractère fortement politique de certaines œuvres présentées), annonçait d'emblée la couleur devant un parterre de journalistes internationaux en
déclarant : «Je dédie cette édition à la jeunesse arabe révoltée.» Et les questions vont tourner, en grande partie, autour de cela : quelle place occupe la Révolution dans l'agenda de la biennale ? Comment l'art, les artistes, arabes en particulier, ont-ils réagi à ce cycle contestataire sans précédent ? Y a-t-il trace de ces chambardements dans les œuvres exposées ? L'art peut-il être Action, et la Poésie au cœur de la Cité, in fine ?
La Biennale de Sharjah a gagné ses galons à coups d'injection de capitaux massifs qui ont permis à cette ville du Golfe persique (qui se trouve à une quinzaine de kilomètres de sa grande rivale Dubaï) de se hisser au rang de grosse destination culturelle. Ainsi, pour cette 10e édition, pas moins de 65 œuvres ont été produites par la biennale et pour la biennale. A l'occasion, Sharjah a vu débarquer une belle ribambelle d'artistes internationaux, une centaine au total, entre plasticiens, cinéastes, danseurs, performeurs, musiciens et autres écrivains. Pas moins de trois «curators» (commissaires) ont été engagés pour sélectionner des participants : Suzanne Cotter, Rasha Salti et Haig Aivazian. Parmi les invités les plus en vue : Jalal Toufic, Alfredo Jaar, Decolonizing Architecture, Khalil
Rabah, Yto Barrada, Adel Abidin, Emily Jacir ou encore Jane & Louise Wilson. Notons également la participation de notre ami Ammar Bouras avec une remarquable installation vidéo intitulée «Tagh'out» (lire interview). Outre son empreinte sur certaines pièces présentées, l'estampe du cycle insurrectionnel arabe s'est également vérifiée à l'ouverture officielle de la biennale. Alors que le Cheikh Soltane et sa fille Hoor Al Qasimi, présidente de la Sharjah Art Foundation, inauguraient la biennale avec tapis rouge et tout le bataclan, un groupe d'artistes a improvisé un happening politique en arborant des pancartes portant des noms qui faisaient référence aux martyrs des massacres de Manama suite aux dernières manifs qui ont ébranlé le Bahreïn. Un tagueur tunisien, Faouzi El Seed, a réalisé pour sa part un graffiti en hommage à Mohamed El Bouazizi. Dans le même registre, citons la performance de cet artiste américain, Alan Bishop, qui, à la fin de son spectacle, a jeté des t-shirts au public sur lesquels on pouvait lire : «E=Tahrir 2», détournement de la célèbre formule d'Einstein pour un subtil hommage à l'Egypte libre.
En finir avec l'exotisme
Nous avons approché quelques artistes arabes et maghrébins pour nous enquérir de leurs sentiments à propos de cette fièvre révolutionnaire et de son impact sur leur pratique artistique. Nadia Kaâbi, une artiste tunisienne qui a décroché à Dubaï le prix Abraaj Capital Art, confie au sujet de la révolution qui a déboulonné Ben Ali : «Ce qu'il convient de noter d'emblée, c'est que nous avons besoin de temps pour digérer tout ça.» Nadia Kaâbi met en garde contre la tentation de traiter à chaud un événement complexe : «Faire de but en blanc une œuvre sur la révolution comporte à mon avis des risques ‘‘éthiques''. Il faut faire très attention car cela peut s'apparenter à de la récupération. On attend de moi en tant qu'artiste tunisienne de produire quelque chose sur la révolution, et ça va s'acheter très vite, et on devient ‘‘bankable''… Il faut faire attention à cela. Les mêmes artistes du système qui soutenaient à fond l'ancien régime vont retourner leur veste et se proclamer chantres de la révolution pour vendre.» Cependant, l'artiste estime que la liberté d'expression que découvrent les Tunisiens va certainement booster le champ artistique dans son pays : «Avant, les artistes s'autocensuraient. La Tunisie, c'était avant tout un ‘‘produit touristique''. Les artistes étaient donc tenus d'en donner la plus belle image, une image romantique au possible qui correspond aux représentations de l'Occident. Il fallait entretenir une forme d'exotisme. Cela frisait l'orientalisme. Mais tout cela va changer à présent. Je pense que l'art a une fonction critique. Cela permet de se poser des questions, de réfléchir sur sa société. Et comme ce droit élémentaire était bafoué, réprimé, les artistes étaient à côté de la plaque. Il y a lieu d'ailleurs de s'interroger pourquoi il n'y a pas eu de musée d'art moderne et contemporain jusqu'à aujourd'hui en Tunisie ? Je ne pense pas que ce soit une question de moyens. Maintenant, il y a certes plus de liberté, mais la révolution, il faut la protéger. Et ce peuple qui a fait une révolution tellement créative, les artistes doivent s'en inspirer.»
Ne pas succomber à une mode
Adel Abidin, un artiste irakien qui a participé à la Biennale de Sharjah avec une œuvre forte campant des enfants privés de rêves, et qui volent les rêves d'autres enfants, dira sur ce même sujet : «Avant, le mot ‘‘révolution'' était pour moi un concept creux, un simple mot du dictionnaire. Mais quand j'ai vu la chose se réaliser sur le terrain, j'ai senti en tant que citoyen arabe une forme de fierté. Enfin, nous avons, nous aussi, le droit de rêver !» Adel Abidin regrette que le changement dans son pays se soit fait sur intervention étrangère : «Nous sommes actuellement un pays occupé et cela m'attriste. J'aurais tant voulu que le changement en Irak se passe sur le modèle tunisien et égyptien. Il y a encore des soldats américains dans la rue irakienne. Même les gens qui gouvernent le pays, ils sont venus juchés sur des tanks US. Cela dit, après une aussi longue dictature, le pays avait besoin de convalescence. Le peuple irakien n'est pas prêt pour une révolution à l'heure actuelle, car il n'a pas trop d'alternatives. La révolution ne doit pas être un phénomène de mode. Si elle n'arrive pas au bon timing, elle peut se transformer en malédiction.» Sur son rôle d'artiste, Adel Abidin dira : «Je ne me vois pas personnellement investi d'une mission. Cela dit, je ne peux ignorer le mérite du pays où j'ai grandi. Je suis né à Baghdad et y ai vécu 28 ans, avant de m'installer en Finlande. J'ai beaucoup travaillé sur la situation en Irak, mais pas avec l'esprit d'un chargé de mission. Dans le contexte actuel, il est préférable que mon art s'exprime à l'étranger, et c'est même plus efficace. Si j'étais resté en Irak, toute mon énergie aurait été bouffée par des détails futiles du genre gérer les coupures d'électricité. Je pense que pour réaliser n'importe quelle œuvre, il faut avant tout être libre.»
«Manifeste pour une caméra libre»
Hicham Ayouch est un cinéaste marocain. Il est venu à Sharjah avec un film et un manifeste : Le Manifeste de la Caméra Libre. En ce moment, il tourne un documentaire sur les mouvements de rue au Maroc. D'ailleurs, il a dû quitter Sharjah précipitamment sans assister à la projection de son film. Il ne voulait pour rien au monde rater une grosse manif qui devait avoir lieu à Casa. Citant Mao, il résume son positionnement en une maxime : «L'artiste doit être un pas seulement devant le peuple.» Son manifeste est édifiant quant à l'état d'esprit qui prévaut actuellement dans le landerneau artistique. Extrait : «Au Maroc, quand nous tournons dans la rue, nous sommes à la merci de n'importe quel cheikh, mokadem, caïd, merda, bolici, gendarme, DST ou RG qui passent leur temps à nous surveiller, et qui peuvent à tout moment nous empêcher de tourner. Il faut que ça cesse maintenant ! Cette loi nous met en danger sur le plan physique et moral, elle met également en danger la qualité de notre travail. Dans tous les pays où la liberté d'expression est une réalité, pas besoin d'autorisation pour tourner un documentaire. J'ai tourné des documentaires, des reportages et des courts métrages dans le monde entier, à chaque fois que des policiers me posaient un problème, c'était dans un pays où la liberté d'expression était bafouée. Il est évident que dans un pays où il y a 50% d'analphabètes, le contrôle de l'image est essentiel pour le pouvoir, car un analphabète peut comprendre une image. (…) Je lance donc un appel à tous les réalisateurs, artistes et citoyens de ce pays. Nous devons nous battre pour changer les lois concernant les autorisations de tournage afin de favoriser la liberté d'expression. J'ai conscience qu'il y a des changements beaucoup plus urgents à réaliser, concernant l'éducation, la santé, le coût de la vie ou la corruption, mais en réalité, tout est lié, parce qu'au final, un peuple qui ne peut pas exprimer ses revendications est un peuple muet.»


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