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«Le régime de Bachar Al Assad se dirige vers le précipice» Abdel Karim Rihaoui. Président de la Ligue syrienne de défense des droits de l'homme (LSDDH)
- La crise syrienne perdure depuis quatre mois et demi. Chaque jour, on annonce de nouvelles victimes de l'appareil répressif du régime de Bachar Al Assad. Comment trouvez-vous la situation sur le terrain ? La situation est extrêmement tendue sur l'ensemble du territoire. L'armée poursuit ses expéditions punitives et la répression sauvage des manifestations pacifiques. A Beir Ezzor, lundi dernier, 113 manifestants syriens ont été tués et des dizaines d'autres ont été blessés. C'était un véritable carnage. Cette ville est actuellement encerclée par des chars et des blindés, soumise à un couvre-feu. Des perquisitions et des arrestations ont été effectuées par l'armée, qui contrôle le moindre mouvement dans les régions limitrophes. Les lignes téléphoniques ont été sectionnées et les déplacements de la population réduits. A Homs, au centre du pays, la situation sécuritaire s'enlise et les affrontements entre opposants et partisans du régime s'accentuent. A Hama, les chars de l'armée continuent de pilonner de manière indiscriminée des résidences. Cent civils ont été tués dimanche dans cette ville par des tirs des forces de sécurité qui accompagnaient l'armée lorsqu'elle y a pénétré en force. A Damas, les perquisitions et les arrestations se multiplient. Pas moins de 5000 personnes ont été arrêtées et jetées en prison. Cela au moment où les protestations et les manifestations populaires s'accentuent. Autant dire que ça se corse. Et le régime de Bachar Al Assad se dirige droit vers le précipice. - Comment voyez-vous l'évolution de la situation dans les jours à venir ? La répression va-t-elle cesser ? Le régime syrien refuse la solution politique et préfère user et abuser de la violence. Il n'affiche aucune volonté d'aller vers une solution pacifique. L'armée redouble ainsi de férocité. Après avoir occupé le nord du pays, elle se déploie maintenant tout au long de la frontière avec l'Irak. Elle cherche à isoler davantage la Syrie pour son entreprise diabolique à huis clos. La situation ne conjecture rien de bon. La répression s'aggrave au fur et à mesure que les jours passent et que les manifestations se multiplient et grandissent. Le régime veut faire croire qu'il s'agit d'affrontements ethniques et refuse de lâcher du lest. Ainsi, il persiste à ignorer les revendications de millions de Syriens qui réclament, depuis quelques mois, la démocratie. Mais au lieu de prendre des mesures concrètes dans ce sens et calmer la rue, le régime accentue la crise en excellant dans son autoritarisme. La solution politique et pacifique souhaitée et demandée par les Syriens s'éloigne de jour en jour. Et le pays s'installe dans l'instabilité qui risque d'ébranler toute la région. - Avez-vous des données sur le nombre de prisonniers depuis le début de la révolution en mars dernier ? Les arrestations se font à la pelle. Nous n'avons pas les chiffres exacts, mais je peux vous dire qu'au moins 15 000 Syriens sont emprisonnés depuis le début du mouvement révolutionnaire anti-régime. Quotidiennement, nous enregistrons des arrestations, ici même à Damas et dans d'autres villes, comme à Homs, Hama ou encore Zabadani, à 50 km au nord-ouest de la capitale. En une journée, les soldats ont arrêté environ 50 personnes dans cette localité, non loin de la frontière libanaise. Dans la ville de Deir Ezzor, l'un des principaux foyers de la contestation dans l'est du pays, environ 200 personnes ont été interpellées. Il s'agit-là des personnes signalées. Vu l'agressivité des services de sécurité, il se pourrait que le nombre de prisonniers soit beaucoup plus important que cela. - Quelle issue possible à la crise ? La seule issue à cette crise est de répondre favorablement aux revendications des Syriens, en abandonnant le système absolutiste et en mettant le pays sur le chemin de la démocratie. C'est la seule voie de salut possible pour le régime.
