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Sarkozy, Le Pen et les médias-mensonges
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Publié dans El Watan le 05 - 05 - 2012

«La meilleure façon de prédire l'avenir, c'est de le créer.»
Peter Drucker
La percée du Front national au 1er tour de la présidentielle française n'est pas une surprise pour ceux qui ont suivi l'évolution politique de l'Hexagone ces dix dernières années. Sarkozy, en s'emparant du leitmotiv de l'extrême-droite, a fait basculer la France dans un climat de xénophobie légitimée adossée à un racisme latent. Le président sortant rebondit sur chaque événement confortant sa politique. L'affaire Merah, survenue au cœur de la campagne présidentielle, a fait figure de pain béni. Le traitement médiatique de cet événement a amplifié le climat d'insécurité au point de transformer en panique nationale ce qui n'était, à l'origine, qu'un fait divers.
L'instrumentalisation de cette affaire, par les médias et les politiques, a eu pour effet d'accentuer la stigmatisation des Maghrébins et l'amalgame «musulman égal terroriste». La récupération de cette affaire par la droite et l'extrême-droite est indéniable, donnant une occasion supplémentaire à Sarkozy d'aller, une fois encore, chasser sur les terres du Front national en brandissant une fois de plus le problème de l'insécurité issue des banlieues. Le président candidat, habile et excellent communicateur, a su attirer l'électorat d'extrême-droite en employant les mots qui les interpellent : immigration, musulmans radicaux et terrorisme.
L'affaire Merah est un exemple type d'instrumentalisation de la peur à des fins politiques, puisqu'il faut rappeler que pendant plusieurs jours, et dans un contexte de campagne présidentielle, les télévisions ont focalisé l'attention du public sur «le tueur au scooter» dont le parcours s'est terminé après 30 longues heures de siège. Convenons que tout cela ne peut être sans conséquence sur l'opinion publique à l'approche d'élections. Certains analystes restent d'ailleurs sceptiques au vu de certains éléments de l'affaire, en plus du contexte où elle intervient. Cette suspicion repose entre autres, et à juste titre, sur un événement aux conséquences (sur l'opinion) similaires survenu en 2002 à 2 jours du premier tour de la présidentielle, l'affaire «Papy Voise»(1). Nous ont-ils rejoué le même scénario dix ans après ?
L'affaire «Papy Voise» en 2002
Pour rappel, tous les journaux télévisés de la veille du 1er tour se sont synchronisés sur l'affaire d'un vieil homme racketté, puis tabassé chez lui par des «jeunes» qui ont fini par brûler sa maison. Notons que lorsque les médias parlent de «jeunes» tout court(2), c'est souvent pour désigner de manière subliminale les «jeunes des cités issus de l'immigration». Les télévisions passaient en boucle Paul Voise, ce vieux monsieur, dont il est question, et qui explique sa mésaventure, le visage très marqué par les violences qu'il a subies. Les journaux télévisés du 20 avril 2002 ont pris le soin de montrer la pauvre victime revenant sur les ruines calcinées de sa maison, en y associant des jeunes passant à proximité provenant de la «cité voisine.»(3) En plus d'être maintenant sans domicile, vivant seul et dans le dénuement, Paul Voise est présenté comme étant apprécié par ses voisins qui lui expriment leur solidarité.
Tous les ingrédients sont donc réunis pour susciter la compassion et l'indignation de l'opinion, le décor de l'insécurité est planté, les médias se déchaînent et les réactions pleuvent. Le lendemain, jour du premier tour des présidentielles, contre toute attente et contredisant tous les sondages, Le Pen est second derrière Chirac. Jospin se retrouve ainsi hors course suscitant l'incompréhension et la stupéfaction générale. De nombreux journalistes et hommes politiques ont affirmé que le traitement médiatique de «l'affaire Paul Voise» avait sans doute beaucoup influencé les votes du 21 avril 2002. Le directeur de l'information de TF1 de l'époque a reconnu récemment avoir commis «une faute» en surmédiatisant ce fait divers, la veille de la présidentielle de 2002(4).
En 2012, l'affaire Merah
Les tueries de Toulouse surviennent en pleine campagne pour la présidentielle de 2012, et certains candidats à la magistrature suprême commettent des flagrants délits de récupération en capitalisant sur l'effroi national. Nicolas Sarkozy s'empresse de décréter, en hommage aux victimes, une minute de silence imposée à tous les écoliers de France amplifiant les événements pour leur donner une dimension nationale.
En associant des enfants à cet hommage forcé et précipité, il aura contribué à semer dans ces jeunes esprits la confusion, la peur et l'amalgame : «Mohamed égal terroriste». Des parents d'élèves ont d'ailleurs critiqué cette démarche imposée à leurs enfants, qui ont été confrontés à leur insu à la violence des actualités. Certains détails de l'affaire nécessitent réflexion ; à titre d'exemple, le fait que le présumé meurtrier qui, à seulement 23 ans, a déjà été en Afghanistan, en Israël, en Syrie, en Irak, en Jordanie et deux fois en Iran(5). Autre fait curieux, il aurait lui-même appelé France 24 pour revendiquer ces crimes, puis est rentré chez lui avant de s'y faire encercler. Les 30 heures de siège de son appartement étaient-elles nécessaires ? La réponse est sans doute non, car, comme l'a indiqué le fondateur du GIGN(6), des gaz lacrymogènes auraient suffi pour faire sortir Mohamed Merah vivant en 5 minutes, sans tirer un coup de feu. Il y avait manifestement donc volonté d'allonger la durée de cet événement qui s'est terminé par 300 coups de feu et la mort du présumé meurtrier.
Un dernier détail troublant, Merah était apparemment pisté dès le premier meurtre(7), l'aurait-on laissé continuer ? De «l'intox» il y en a eu aussi sur les chaînes d'informations où nous avons pu voir défiler en boucle l'information selon laquelle «Abdelkader Merah est fier des actes de son frère Mohamed», ce que l'intéressé a démenti fermement par la voix de son avocate(8).
Ces mêmes chaînes relayaient aussi l'information selon laquelle le père Merah allait intenter un procès contre l'Etat français, déclenchant une avalanche de déclarations indignées de diverses personnalités, dont Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères. Pourtant, le père du présumé meurtrier a démenti catégoriquement avoir formulé une telle intention ce jour-là(9). Ainsi, une fausse information divulguée par une «chaîne info» suffit pour être reprise en chœur par l'ensemble des médias, engendrant des réactions en chaîne. Cela s'appelle : la désinformation.
à qui profite le crime ?
Ceux qui dans leurs programmes ont mis en avant l'insécurité et l'immigration ont vite fait de repartir en guerre contre «l'Islam radical» et le terrorisme, avec le concours des chaînes TV qui ont joué un rôle fondamental dans l'entretien de cette psychose, le tout entraînant le dénigrement de l'Islam, l'accentuation des amalgames et la stigmatisation collatérale des jeunes de banlieues. Ces derniers, considérés comme Français de seconde zone, sont confinés dans des ghettos depuis des décennies pour pérenniser le «risque banlieue», car force est de constater que rien n'a été fait pour les en sortir. C'est à se demander si l'insécurité, qui en est issue, n'est pas là pour cautionner la politique du tout répressif et de «tolérance zéro».
La France porte les stigmates de 10 années de Sarkozy, ministre de l'Intérieur, puis Président. Il a «extrême-droitisé» la droite française en jetant continuellement de l'huile sur le feu de la xénophobie, soufflant sans relâche sur les braises du racisme, stigmatisant les minorités en leur imputant tous les maux, sans parler de la haine de l'Islam, le débat sur l'identité nationale, la loi sur les bienfaits de la colonisation, le débat sur la déchéance de la nationalité, l'interdiction du voile intégral, la «circulaire Guéant» et bien d'autres joyeusetés. L'expansion du racisme décomplexé et le repli de la France sur elle-même sont le résultat d'une décennie d'intégrisme politique. De ce fait, la progression du clan Le Pen n'est pas une surprise et le Front national n'en sort que plus renforcé d'une décennie UMP.
Les médias comme porte-voix
L'instrumentalisation de la criminalité et du terrorisme à des fins politiques n'est pas une nouveauté. Cependant, il faut reconnaître que la télévision y contribue pour beaucoup, son rôle est fondamental dans le façonnement de l'opinion publique. Les faits divers et les polémiques stériles sont le pain quotidien que distribuent ces médias qui ont des messages à transmettre, une idéologie à défendre, des intérêts à servir, s'éloignant chaque jour qui passe un peu plus de leur vocation première : informer. Dans cette course effrénée au sensationnel, les chaînes de TV tombent vite dans la surenchère pour attirer toujours plus de téléspectateurs. Les médias «d'information en continu» tels que Al Jazeera, France 24 et I-télé diffusent à longueur de journée ce qui est présenté comme information. Toutefois, nous pouvons relever quotidiennement que les faits mis en avant, les premiers titres, ne sont pas toujours les informations essentielles. Il y a chaque jour un arbre pour cacher la forêt.
Les médias sont les ateliers de l'information où se fabrique le consentement des masses, ils ne sont pas impartiaux et ils servent très souvent les intérêts de ceux qui les détiennent. Pour en finir avec le biberon médiatique, l'esprit critique doit intervenir dans la lecture des actualités en ne prenant jamais pour argent comptant l'information sous prétexte qu'elle est télévisée. S'interroger sur les sources et leur crédibilité, la réputation du média qui la diffuse, le contexte dans lequel elle est rendue publique, sans quoi les nations-troupeaux continueront de paître dans les vertes prairies de la propagande.
Notes et renvoi :
1 : Liberation.fr le 3 mars 2003 (Lien court http://www.tinyurl.com/dg98765)
2 : Expressions récurrentes : «jeunes casseurs», «jeunes délinquants», «…agressé par des jeunes»
3 : INA.fr. JT (à 4'00») du 20 avril 2002 (tinyurl.com/dg98766)
4 : Dailymotion.fr. R.Namias sur Europe1 (tinyurl.com/dg98777) et Lalibre.be (tinyurl.com/dg98770)
5 : Lemonde.fr le 22 mars 2012 (tinyurl.com/dg994321)
6 : Lepoint.fr le 23 mars 2012 (tinyurl.com/dg98778)
7 : Rue89.fr le 22 mars 2012 (tinyurl.com/dg98999)8 : tf1.fr le 26/03/2012
(tinyurl.com/dg98888)
9 : Nouvelobs.com le 28/03/12
(tinyurl.com/dg99988)


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