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Quand l'Europe cautionne les atteintes aux droits humains en Grèce
Des milliers d'immigrés victimes d'une politique migratoire xénophobe
Publié dans El Watan le 24 - 02 - 2015

La première sonnette d'alarme a été tirée par François Crépeau, Rapporteur spécial sur les droits fondamentaux des migrants auprès des Nations unies. Lors d'une visite effectuée en Grèce, fin 2012, il a constaté de graves manquements aux principes universels et européens en matière du respect des droits des migrants et des demandeurs d'asile.
«L'UE soutient la Grèce depuis 2010 dans la réalisation de son Plan d'action sur les migrations et l'asile, révisé en 2013, à travers le Bureau européen d'appui en matière d'asile et le Fonds de Solidarité et gestion des flux migratoires», a-t-il écrit dans un rapport publié en avril 2013, reprochant à l'UE l'absence d'un suivi rigoureux de la politique migratoire grecque.
Le 18 décembre dernier, la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) a rendu public un communiqué qui fustige «une politique qui viole les obligations de la Grèce en matière de droit international». D'autres ONG, comme Amnesty International, ont pointé du doigt spécialement le traitement dont sont victimes les migrants clandestins et les ressortissants étrangers. La Cour européenne des droits de l'homme et le Conseil de l'Europe l'ont dénoncé aussi, mais sans plus.
Véritable chasse à l'homme
«Des racistes, qui s'habillent en noir, circulent dans la rue et tabassent des étrangers, surtout les personnes de couleur. Une fois, en bas de chez-moi, à 3h du matin, ils ont agressé un ami égyptien alors qu'il se rendait à son lieu de travail, un abattoir situé dans le quartier», témoigne Zidane, un ressortissant algérien originaire de Tébessa. Les militants d'extrême-droite agissaient en toute impunité. «Des membres du parti Aube Dorée ont assassiné plusieurs immigrés et la société grecque ne s'est pas réveillée qu'avec l'assassinat du rappeur antifasciste Pavlos Fryssas en septembre 2013.
C'est une forme de racisme en soi ; la vie d'un Grec est plus importante que celle d'un étranger !» regrette Yannis Androulidakis, militant associatif antiraciste. «Depuis cette date, la tolérance de l'opinion envers les actions d'Aube Dorée a cessé», a-t-il constaté. Le problème, c'est que le gouvernement grec lui-même avait lancé, en août 2012, une opération baptisée Xenios Zeus, sous prétexte de «lutter contre l'immigration clandestine et le crime à Athènes».
Une année plus tard, un bilan amer a été établi par Human Rights Watch. Dans un communiqué, rendu public le 2 août 2013, HRW a dénoncé «un profilage ethnique», «des ratissages» et «des violations contre les migrants et les demandeurs d'asile», menés par la police grecque contre «des milliers de personnes présumées être des sans-papiers. Ils ont été soumis aux arrestations et fouilles abusives dans les rues, et de longues heures de détention aux postes de police». Le 6 février 2015, la nouvelle secrétaire d'Etat à l'Immigration du gouvernement Syriza, Tasia Christodoulopoulou, a annoncé «la fin de l'opération Xenios Zeus».
Depuis le début des plans d'austérité en 2010, la Grèce a opté pour des solutions radicales contre le flux migratoire. Dans ce sillage, le gouvernement d'Antonis Samaras s'est montré fier de la construction du Mur d'Evros, achevé en décembre 2012. Cette clôture de béton armé et de fil barbelé, d'une dizaine de kilomètres, est située au niveau de la frontière gréco-turque, séparée naturellement par le grand fleuve d'Evros le long de 200 km. Le mur sert à colmater une brèche : un passage continental par lequel se faufilaient les migrants clandestins. «Ce mur raciste, que Syriza promet de détruire, a été présenté par Nouvelle Démocratie comme une œuvre importante pour le peuple grec. Or, à cause de ce mur, les migrants et les réfugiés de guerre ne peuvent arriver qu'à travers la mer.
Ce qui rend la traversée beaucoup plus dangereuse et meurtrière. Des centaines de personnes y laissent leur vie chaque année. C'est inadmissible», s'indigne Yanis.
En plus de ce mur, les autorités grecques ont mis en place l'opération Aspida, dès l'été 2012, qui consistait au déploiement de 1800 gardes-frontières supplémentaires pour renforcer le contrôle des frontières terrestres. Depuis, les migrants privilégient la voie maritime pour arriver en Grèce. Pourchassées par les gardes-côtes et les éléments de Frontex (Agence pour la gestion de la coopération opérationnelle aux Frontières extérieures des Etats membre de l'UE), les barques de migrants empruntent des caps de plus en plus dangereux à travers les îles d'Egée ou le fleuve d'Evros. Les embarcations de fortune sont affrétées par des trafiquants d'êtres humains cupides et sans scrupule. Les sommes évoquées varient entre 300 et 1000 euros par personne, voire plus dans certains cas.
Du point de vue statistique, cette politique migratoire répressive est une réussite. Selon les estimations 2014 du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), le nombre d'entrées illégales en Grèce a chuté à 15 000 migrants (55 000 en 2011). La Grèce, par ailleurs, ne délivre désormais que 10 000 nouveaux permis de séjour annuellement. En 2013, «il y avait environ 470 000 migrants en situation irrégulière», estime le rapporteur onusien François Crépeau.
En l'absence de statistiques sérieuses, «les milieux nationalistes parlent d'un million d'étrangers en Grèce, entre immigrés clandestins et réguliers. Mais ce n'est qu'un mythe. Notre pays n'est qu'un point de passage vers l'Europe occidentale», souligne Yanis. Les immigrés ne bénéficient d'aucune aide étatique. Ce qui fait qu'ils sont des proies faciles pour les marchands de sommeil et les exploiteurs qui les font travailler contre un salaire de 5 à 20 euros par jour.
Centres de détention inhumains
Tout cela n'est rien devant l'enfer des centres de rétention. «Les centres sont surchargés. On nous traitait comme des chiens. Ils nous donnaient à manger une fois toutes les 24h. Je ne généralise pas, car il paraît que quelques centres sont bien. Moi, je n'en ai jamais vu», a attesté Amine, un sans-papiers algérien qui a séjourné dans plusieurs centres. Les migrants sont entassés comme du bétail dans des cellules surpeuplées où ils dorment sur des matelas à même le sol.
«A titre d'exemple, la capacité de détention au commissariat central de la ville de Lesbos est de 28 personnes… On n'a été informé que quelques semaines avant notre visite, 120 migrants y étaient retenus…Le centre de Corinthe était particulièrement encombré, avec environ 70 détenus dans chaque cellule et très peu d'espace pour se déplacer», lit-on dans le rapport de François Crépeau qui a visité 11 centres en décembre 2012. Il parle de «conditions de détention inappropriées», alors qu'il s'agit carrément de conditions inhumaines.
Lisons ce que lui-même rapporte : «Les migrants avaient souvent un accès limité aux toilettes ; certains centres n'avaient même pas d'éclairage électrique et par conséquent, pendant l'hiver, les migrants se retrouvaient dans l'obscurité totale dès le début d'après-midi ; les centres manquaient de chauffage et d'eau chaude ; les détenus se sont plaints du manque de nourriture, de vêtements, et de produits d'hygiène, etc. (…) Les services médicaux offerts dans les centres par le Keelpno (Centre hellénique de contrôle des maladies et la prévention) sont très insuffisants». Notre témoin Amine surenchérit : «Il faut frôler la mort pour bénéficier des soins.
Je vous jure qu'on m'a refusé un Paracétamol pour calmer une douleur aux dents !» Pas loin de la réalité. Sayed Mehdi Achampari est un migrant afghan de 23 ans. Il est décédé le 10 février, après deux malaises qu'il a eus (les 4 et 8 février) durant sa détention au centre d'Amygdaleza dans la banlieue d'Athènes. Dans ce centre, l'un des plus grands en Grèce, on déplore déjà plusieurs morts dans des conditions différentes, y compris des suicides. Et pour cause : en octobre 2012, la Grèce a augmenté la durée maximale de détention de 12 à 18 mois.
Cette durée est systématiquement appliquée, sauf dans les petits centres. Là, les migrants sont libérés rapidement avec un ordre de quitter le territoire sous un mois d'ultimatum, sinon rebelote pour plusieurs mois de détention. La Grèce dispose également, avec les mêmes conditions et modalités, d'un centre de détention pour familles à Petrou Ralli. Les enfants non accompagnés, eux, sont détenus dans des centres de rétention administrative pour mineurs (à Amygdaleza et à Samos). La loi grecque stipule qu'ils y restent jusqu'à l'âge de 18 ans.
Syriza et le défi migratoire
Ces derniers jours, la presse grecque parle même d'un système officieux de torture qui aurait été mis en place par quelques policiers dans certains centres de rétention, comme à Amygdaleza. Dans ce contexte sombre, le mouvement associatif de solidarité et antiraciste est le seul atout dont disposent les migrants et les réfugiés en Grèce. Plusieurs collectifs luttent pour la mise en place d'un mécanisme de régularisation des sans-papiers. La dernière vague de régularisations remonte à 2001. «Nous œuvrons en faveur des droits politiques et socio-économiques des migrants. Nous essayons aussi de les intégrer dans notre société. Pour faciliter leur insertion, nous avons ouvert une petite école au quartier Exarcheia (centre d'Athènes).
Des volontaires y assurent quotidiennement des cours de grec pour adultes puisqu'il n'y aucune structure étatique de ce genre», a expliqué Loukia Koutronaki, militante du Réseau de la défense des droits de migrants et des réfugiés en Grèce. Ce même collectif organise chaque année, au mois de juillet, le festival antiraciste d'Athènes. La nouvelle secrétaire d'Etat chargée de l'Immigration est l'une des cofondateurs de ce réseau. «Nous lui faisons confiance pour améliorer la situation humanitaire des immigrés. Dès sa nomination, Tasia (Christodoulopoulou) a annoncé un processus de régularisation pour les immigrés de deuxième génération.
Elle veut également faciliter l'asile aux réfugiés de guerre en leur procurant la protection nécessaire», s'est réjouie Loukia. Et d'accuser le gouvernement précédent : «Ils ont gardé la confusion autour des centres de détention. Mais en se basant sur des témoignages et des rapports d'ONG, nous savons que les conditions de détention sont inhumaines. Les centres sont des camps de concentration. Ils doivent êtres supprimés et remplacés par des structures d'accueil et d'aide aux migrants.» Justement, le tout nouveau secrétaire d'Etat à l'Intérieur, Yannis Panousis, a évoqué cette solution, lors d'une visite au centre Amygdaleza, le 14 février dernier.
Loukia Koutronaki fustige ensuite «l'attitude souvent scandaleuse de la police des frontières. L'année dernière, à Farmakonisi, une dizaine de migrants sont morts, noyés, presque sous l'indifférence des gardes-côtes.» Elle ne mâche pas ses mots en demandant à Syriza de «revoir en urgence cette politique criminelle aux frontières, héritée du gouvernement Samaras». Pour elle, «la politique européenne, dans sa globalité, est responsable de ce qui se passe en Grèce sur le plan humanitaire et de l'immigration. Le gouvernement Tsipras doit proposer la renégociation du Règlement Dublin. A cause de ce mécanisme, imposé par l'UE, des milliers de migrants sont coincés en Grèce, sans travail, mal traités, et empêchés de passer vers les pays de l'Europe de l'Ouest.»


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