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«Nous vivons dans un monde désemparé»
Dominique Wallon. Ancien président de l'Union des étudiants de France, militant anticolonialiste
Publié dans El Watan le 05 - 03 - 2015

Lorsqu'un peuple, courbé sous de pesantes chaînes, hésite à les briser avec ses propres mains, il peut changer facilement de tyrannie, mais ne pourra jamais gagner sa liberté. (José Maria de Heredia)
Dominique Wallon comptait parmi les jeunes progressistes français à la fin des années cinquante. Ses luttes se sont matérialisées par une accession méritée à la tête de l'Union nationale des étudiants français. Cette association tissa des liens étroits avec les Algériens et bon nombre de ses adhérents épousèrent la cause algérienne, en optant ouvertement pour l'indépendance de l'Algérie.
Dominique, anticolonialiste convaincu, ami de l'Algérie, qui vient d'éditer un ouvrage consacré à cette période, Combats étudiants pour l'indépendance de l'Algérie (éditions Casbah), évoque ses rapports avec les étudiants algériens en France, organisés au sein de la Fédération de France du FLN, à la fin des années cinquante. «La reprise des relations avec l'Ugema dissoute par le gouvernement français en 1958 va être l'objectif majeur des responsables de l'UNEF, conscient qu'elle aurait un gros impact sur l'opinion publique et serait la méthode la plus juste pour développer une position de fond qui soit une condamnation radicale de la guerre coloniale et un appel à la négociation avec le GPRA.
J'ai eu l'honneur en arrivant au bureau national de l'UNEF, au printemps 1960, d'être chargé de cette mission, ce qui m'a amené à discuter à Lausanne avec le président Pierre Gaudez et avec les dirigeants de l'Ugema, Messaoud Aït Chalal, Chaïb Taïeb et Djamel Houhou, le texte de reprise des relations puis à me rendre à Tunis au 4e Congrès de l'Ugema, où je suis intervenu devant les membres du GPRA.» Notre initiative a eu un gros impact : l'UNEF, représentant 200 000 étudiants français, concluait un accord politique avec l'Ugema, porte-parole étudiant du FLN, donnant ainsi l'exemple de ce que devait être la conclusion politique du conflit.
Militance héréditaire
Cheveux blancs, yeux bleus interrogateurs derrière ses lunettes, Dominique veut expliquer que l'UNEF montrait à la gauche, à l'opinion française, la voie juste et que cette démarche a abouti. L'attitude est intempestive du gouvernement gaulliste, auquel la première manifestation de masse contre la guerre, par la négociation avec le FLN, a fortement déplu. Les représailles ne se sont pas fait attendre, «le gouvernement a supprimé nos subventions, suscité un syndicat étudiant bidon, pris des mesures personnelles directes à mon encontre». Mais Dominique a l'habitude de recevoir des coups.
D'extraction modeste, il est issu d'une famille qui sait ce que résistance veut dire.
«Mon enfance a été marquée par la disparition de mon père, qui était le chef de la résistance du département de l'Oise, au nord de Paris. C'était le 30 août 1944, Paris venait d'être libérée, les Allemands entamaient leur retraite. A moins de 10 km de notre maison, seul, il a disparu et son corps n'a pu être retrouvé. J'avais un peu plus de 5 ans, je me souviendrai toujours de l'attente interminable auprès de ma mère. Il a fallu des années pour que sa mort pour la France soit reconnue. Ma mère s'est remariée, mais jusqu'à 10 ans au moins j'attendais toujours le retour de mon père.»
La famille Wallon a des antécédents célèbres, puisque son arrière-grand-père, Henri Wallon, était en 1875 l'auteur de l'amendement constitutionnel qui, à une voix de majorité, fut l'acte fondateur de la IIIe République. «Entre République et Résistance, j'ai très vite au lycée été un militant (chrétien à l'époque) politisé contre la guerre d'Indochine, pour l'indépendance des pays du Maghreb et me suis orienté, après le bac, vers l'Institut d'études politiques de Paris, préférant une carrière au service de l'Etat qu'un travail dans le privé. Après quelques péripéties, je suis entré à l'ENA, après mes responsabilités à l'UNEF.» Le baptême de Dominique avec la politique s'est fait tout naturellement. L'esprit de lutte qui l'animait l'a conduit à s'impliquer dans le combat.
«J'ai, dès mon entrée à Sciences-Po en 1956, adhéré à l'UNEF, participé à beaucoup de manifestations dites ‘‘spontanées'' (car improvisées, sans aucune organisation déclarée) contre la guerre d'Algérie et ses crimes et horreurs, que quelques militaires du contingent et des universitaires commençaient à dénoncer. J'avais vraiment la haine à l'égard de Guy Mollet et la SFIO et tous les responsables militaires et politiques de cette guerre contre le peuple algérien. Je n'ai pris des responsabilités à l'UNEF que plus tard, quand j'ai été élu président de l'Association des étudiants de l'lEP, en octobre 1959, puis vice-président chargé de l'Algérie au bureau national de l'UNEF, en avril 1960 et enfin président national de l'UNEF d'avril 1961 à avril 1962.
L'UNEF était le syndicat unique des étudiants, très puissant (100 000 adhérents pour 200 000 étudiants), mais au début de la guerre d'Algérie très divisé entre extrême droite (Le Pen sévissait toujours au Quartier latin), droite dite ‘‘apolitique'' et gauche foncièrement anticolonialiste, minoritaire jusqu'en 1956, puis freinée par la faiblesse de sa majorité jusqu'en 1959 et sa volonté de maintenir l'unité du syndicat». La guerre d'Algérie était le sujet le plus chaud discuté dans les campus. L'UNEF ne pouvait se contenter du rôle peu glorieux de simple spectatrice.
«Les premiers engagements de l'UNEF sont essentiellement d'ordre moral, contre la torture, les exactions contre les universitaires libéraux, les arrestations d'étudiants algériens, mais aussi politiques, comme la condamnation du putsch de mai 1958 et de la dégradation des libertés publiques. Cet engagement va se politiser au fur et à mesure que la condamnation des crimes commis par la France en Algérie faisait apparaître l'urgence d'exiger une solution politique. Dans cette évolution, la question des relations avec l'Ugema va jouer un rôle déterminant lors de son congrès constitutif à Paris en juillet 1955, Robert Chapuis, VP de l'UNEF, minoritaire de gauche, salue sa création.
Le choix de l'Ugema, mettant en avant le M de musulman, contre celui de l'Ugema, n'avait pas entraîné de réaction de notre part (c'était le choix librement débattu des étudiants algériens), mais seulement nourri l'opposition aux relations avec l'Ugema de la tendance conservatrice de l'UNEF. Après des péripéties de dialogue puis de rupture entre les deux organisations, en décembre 1956, l'Ugema met en demeure l'UNEF de prendre une position claire sur la nature coloniale de la guerre puis rompt les relations.
Cette rupture a beaucoup affecté tous les militants anticolonialistes de l'UNEF, dont j'étais conscient que nous ne pouvions avancer dans l'engagement contre la politique française de guerre au peuple algérien sans un dialogue avec l'organisation algérienne, solidaire du FLN. En même temps, l'UNEF, qui venait, à une faible majorité, de passer à gauche ne pouvait aller, à ce moment, aussi loin que l'Ugema le demandait, sauf à précipiter une scission massive qui aurait handicapé longtemps le mouvement syndical étudiant et réduit fortement l'impact de ses prises de position». Ayant les coudées plus franches lorsqu'il prit les rênes de l'UNEF, Dominique multiplia les initiatives.
Etudiant engagé
«Président national de l'UNEF en 1961/1962, j'ai poursuivi dans la même voie, à la fois par le dialogue avec l'Ugema (communiqué de juin 1961 défendant la position algérienne sur le Sahara), et par l'organisation avec les autres syndicats ouvriers enseignants des manifestations populaires contre le putsch des généraux, d'avril 1961, pour l'accélération et l'aboutissement des négociations avec le GPRA et contre l'OAS (manifestations de décembre 1961, février 1962). Evidemment l'OAS a cherché à nous le faire payer, en plastiquant deux fois le siège de l'UNEF durant l'hiver 1961/1962, mais sans conséquences autres que matérielles.
Je dois dire que, pour moi, toutes ces années de lutte, d'abord minoritaires puis mobilisant la majorité des étudiants, alors même que la gauche institutionnelle française restait d'une excessive prudence, ont été une période extraordinaire par son intensité, par l'engagement permanent, constamment collectif, partagé avec des dizaines de milliers d'étudiants français, par la certitude d'être dans la ligne juste». Que fait Dominique actuellement ? Il s'est retiré à la campagne où il continue d'œuvrer pour la bonne cause où il a fondé en 2003 un festival des cinémas d'Afrique.
«A ma retraite, j'ai quitté Paris et me suis entièrement installé à Apt, petite ville de 12 000 habitants à 100 km de Marseille, où après en avoir parlé à l'exploitante du cinéma (3 salles très actives) et à des associations, j'ai fondé en 2003 un festival des cinémas d'Afrique. Ce choix de l'Afrique est évidemment politique, mais aussi cinématographique. J'avais été, de 1989 à 1995, directeur général du CNC (Centre national de la cinématographie) et j'y avais tissé des relations de travail et d'amitié avec les cinéastes d'Afrique.
Depuis le festival a bien grandi, il dure 7 jours, présente une quarantaine de films de toute l'Afrique, du nord au sud, accueille près de 6000 spectateurs, fait un gros travail avec les scolaires. Chaque année, 15 à 20 cinéastes viennent présenter leur film. A titre d'exemple, pour la seule Algérie, en 12 éditions, ce sont 31 cinéastes algériens, des plus connus aux plus jeunes, qui ont été invités, certains plusieurs fois, et dont la plupart sont venus à Apt. Ma plus grande fierté a été, il y a quatre ans, de passer le relais à une nouvelle présidente et une directrice, qui font un travail extraordinaire».
Il passe la main
Que lui inspire le monde politique actuel, avec sa globalisation, son néolibéralisme débridé et la posture peu enviable des damnées de la terre. «La période ne laisse pas place à beaucoup d'optimisme. Nous épuisons la terre, provoquons un risque climatique majeur. Les grands groupes financiers internationaux abusent de leur pouvoir au détriment des citoyens du monde et des Etats et provoquent des crises gravissimes.
Les plus riches s'enrichissent et les plus pauvres s'appauvrissent, au moins relativement et souvent dans l'absolu. L'Europe à laquelle j'ai cru est de plus en plus impuissante et désemparée. Israël continue d'étendre la colonisation en Palestine. Un terrorisme islamiste assoiffé de sang et de pouvoir pervertit l'islam et menace tout le monde musulman, plus encore que l'Occident... Je suis incapable de dire comment nous tous qui croyons à la justice, à la liberté, à l'égalité des peuples, des hommes et des femmes, et pour moi à la laïcité, allons pouvoir redresser la situation».
La manifestation encore plus prononcée de l'islamophobie après l'affaire Charlie irrite les musulmans encore davantage choqués par l'amalgame fait à l'islam. «Après les attentats contre Charlie et le magasin casher, j'ai tout de suite pensé à tous les musulmans de France et au risque qu'ils soient encore plus marginalisés, rejetés. Ce risque existe toujours, mais je pense que le peuple français fait majoritairement la différence entre le terrorisme islamiste et l'islam. Il faut absolument développer le dialogue pour faire prévaloir une laïcité, qui est au cœur de la société et de la démocratie françaises, qui, par définition, respecte toutes les croyances religieuses ou agnostiques.»


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