L'APN prend part au Sultanat d'Oman aux travaux de l'AG de l'Union des scouts parlementaires arabes    Chaib souligne depuis le Turkménistan la nécessité d'apporter l'appui aux PDSL pour accroître leur contribution aux chaînes de valeur mondiales    Instructions fermes pour le respect des délais de réalisation des projets de travaux publics dans la wilaya de Djelfa    L'OCI condamne le plan sioniste visant l'occupation totale de Ghaza    Agression sioniste contre Ghaza: le bilan s'alourdit à 61.330 martyrs et 152.359 blessés    Conseil de sécurité: réunion d'urgence pour discuter de la décision de l'entité sioniste de réoccuper Ghaza    CHAN 2024: l'Algérie et l'Afrique du Sud se neutralisent (1-1)    les inscriptions universitaires définitives pour les nouveaux bacheliers débuteront dimanche prochain par voie électronique    Ouverture à Alger de la 8e édition du Festival culturel international "L'été en musique"    Tennis de table/Championnat et Coupe d'Afrique (Jeunes): l'Algérie remporte douze médailles, dont 4 en or à Lagos    Belmehdi reçoit le SG du Conseil suédois de la fatwa    Industrie pharmaceutique : les acteurs privés appelés à produire les matières premières en partenariat avec Saïdal    Ouverture de la 2e édition du Salon national du livre pour enfant à la Promenade des Sablettes à Alger    Ablation réussie d'une tumeur abdominale géante de 14 kg au CHU Bab El-Oued    Lettre du Président français : le MOUDAF dénonce "une dérive stigmatisante et unilatérale"    CHAN-2024/Algérie-Afrique du Sud: les "Verts" pour se rapprocher des quarts    Lettre du Président français: Précisions des Autorités algériennes    Les six raisons du faible impact de la revalorisation de l'allocation devises en Algérie de 750 euros sur le cours du dinar sur le marché parallèle    Chantage à l'antisémitisme pour justifier le Palestinocide    «L'injustice ne doit pas devenir la nouvelle situation normale !»    500 kg de kif traité saisis en une semaine    L'Algérie remporte la première édition    CHAN 2024 Des sélectionneurs veulent ressusciter l'offensive    Tissemsilt : commémoration du 64e anniversaire du martyre du colonel Djilali Bounâama    34 morts et 1.884 blessés en une semaine    «66 % des bacheliers ont opté pour les filières des sciences et des technologies»    Réception de la tranche restante du projet de la pénétrante de l'autoroute Est-Ouest prévue fin 2026    Quelle est la structure du commerce extérieur en Algérie pour 2023, selon les données officielles du Gouvernement ?    Plus de 200 journalistes exigent l'accès à Ghaza et dénoncent un blackout sioniste    « Hommage à Abdelhamid Mehri : Un homme d'Etat, une conscience nationale »    Voyage au cœur d'un trésor vivant...    CHAN-2025 : Ouganda 0 – Algérie 3 Du jeu, de l'engagement, du ballon et une belle victoire    Jane Austen, une écrivaine toujours actuelle    Boudjemaa met en avant les réformes structurelles et la modernisation du système judiciaire    Abdelmadjid Tebboune préside la cérémonie    Le président de la République honore les retraités de l'Armée et leurs familles    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Des siècles d'histoire sous les pavés d'Alger
Musée du métro
Publié dans El Watan le 06 - 02 - 2016

Quelque part entre le XVIe et le XIXe siècles. Basse Casbah, mosquée Es Sayida.
L'imam fait ses ablutions dans une salle d'eau, carrelée de noir et blanc, ménagée à cet effet. Il pose le pied sur la margelle au-dessus de laquelle s'écoule un mince filet d'eau apportée là par un système d'irrigation ingénieux. Il se dirige, à travers les couloirs étroits, vers la salle de prière, située un peu plus haut, tandis que du minaret retentit l'appel du muezzin.
Cette scène de vie «ordinaire», aussi imaginée que plausible, est le fruit des reconstitutions qu'ont pu faire les archéologues en charge des fouilles du site de la place des Martyrs, découvert alors que l'on s'apprêtait à entamer la construction d'une station de métro. Et ce n'est pas sans émotion qu'aujourd'hui, ils partagent le trésor historique qu'ils ont mis 27 mois à déterrer et à rêver. La période de fouilles étant achevée depuis octobre dernier, les archéologues ont dû laisser place aux ouvriers pour la poursuite des travaux du métro d'Alger.
«Depuis la découverte de ce gisement archéologique, nos équipes ont dû coordonner des phases de recherche et d'approfondissement du chantier avec le calendrier des travaux du génie civil de la station de métro. Et cela a été l'un des plus grands défis pour que le développement et le patrimoine historique ne se fassent pas l'un au détriment de l'autre», explique ainsi Farid Ighilahriz, directeur du Centre national de recherches archéologiques (CNRA).
Ce chantier titanesque, le premier de ce type en Algérie, tant par son importance que par les méthodes utilisées, a été confié à des équipes pluridisciplinaires du CNRA et de l'Institut français de recherches archéologiques préventives (Inrap). Et si les couches les plus profondes et les plus anciennes ont dû être recouvertes, ce n'est qu'en attendant la fin du chantier de cette station et l'édification du futur musée qui offrira ces merveilles aux regards et à l'imagination des visiteurs, et ce, en 2017.
«Un comité d'évaluation et de suivi scientifique et technique, qui dépend du ministère de la Culture, décide des choix et des sélections des vestiges à préserver in situ (sur place) tout comme il accompagnera l'opération de muséalisation des vestiges et mobiliers archéologiques», dont des centaines de caisses de céramiques, de pièces et de métaux sont en cours d'étude, expose M. Ighilahriz.
Laissée en surface, sous la protection d'un large préau transparent, la couche la plus «récente» : ce qui reste de la mosquée Es Sayida. «Voilà l'entrée !» présente François Souq, chargé de recherche à l'Inrap et coresponsable des fouilles de la place des Martyrs, en désignant une large marche surplombant une petite allée pavée.
Succession de destructions et de reconstructions
Les murets, ocre et gris, semblent délimiter des petites pièces. Par endroit, de petits cratères interrompent les tracés. «Ce sont les trous creusés par les Français pour planter des arbres, lorsqu'ils ont recouvert tout cet espace pour établir la place d'Armes», expliquent les archéologues. Un peu plus haut, ce qui devait être la base du minaret. M. Souq se penche et désigne la base d'une fondation. «Il y a des marques de destruction et de reconstruction. Cette mosquée, par exemple, semble avoir été édifiée au XVIe siècle. Toutefois, on soupçonne que l'un des séismes qui ont touché Alger l'a détruite, vers le XVIIIe siècle, et qu'elle a été réhabilitée», relate-t-il.
De même, son implantation s'est faite sur les fondements d'autres bâtisses plus lointaines encore. «Les bâtiments construits à partir du XVIe siècle prennent appui sur les fondations des constructions médiévales des Beni Mezghenna, qui ont rebâti, dès le Xe siècle, une partie de la ville qui était en ruine», explique le CNRA. «Nous attendons donc d'étudier plus en profondeur cet espace pour savoir dans le détail ce qui s'y est déroulé tout au long de ces années», ajoute M. Ighilahriz.
Un peu plus loin, les dépendances de la mosquée, dont Beit El Mal (la trésorerie), sont délimitées. La continuité de la mosquée se trouve, selon toute vraisemblance, du côté de la rue. Et M. Ighilahriz ne cache pas sa frustration : «Nous ne sommes pas allés plus loin car nous avons dû nous contenter du périmètre que l'on nous a délimité.» «Les générations futures procéderont, je l'espère, à des fouilles plus approfondies», prédit-il.
L'empreinte indélébile de la vie
«La vie humaine est telle une empreinte de pas dans le sable est effacée par le vent dans la seconde même. Et il n'y a rien de plus beau et de plus émouvant que de déterrer les traces de ceux qui sont partis depuis longtemps, mais dont les témoignages de vie ont voyagé à travers les âges», murmure, les yeux couvant le site, Kamel Stiti, chargé de recherches pour le CNRA et coresponsable des fouilles. C'est d'ailleurs une empreinte animale qui semble le plus l'émouvoir et lui donner des élans philosophiques.
En contrebas de la mosquée et de ses offices, c'est d'une vie commerciale et d'un savoir-faire hautement réputé dont les murs se font l'écho. Cette partie de la cité urbaine est constituée d'habitations, d'un quartier d'artisans, avec des boutiques et des ateliers de ferronnerie. L'on devine ainsi ce qui devait être un four. Sur l'une des briques pleines utilisées pour la construction d'un mur, l'on peut nettement distinguer les coussinets d'une patte féline ou canine, «sûrement le compagnon animal d'un des artisans. C'est beau !» commente M. Stiti.
Les morts du VIIe siècle se raconteront bientôt
Quelques siècles plus tôt. Mêmes lieux, mais ambiance plus lourde, voire dramatique. Nous sommes au VIIe siècle. Dans ce quartier qui sera plus tard plein de vie, l'on enterre les morts. Les tombes creusées à même le sol sont entourées de mosaïques polychromes d'une grande beauté, vestiges et ruines d'un édifice sur lequel la nécropole berbéro-byzantine s'est installée. Une fois les corps mis en terre, les sépultures sont scellées d'une dalle ou d'une grosse pierre. «Ce sont 71 tombes que l'on a mises au jour, abritant un total de 112 individus», dit Lyes Arifi, l'un des archéologues en charge de cette partie du chantier.
Dans le laboratoire où sont entreposés les ossements de ces lointains ancêtres, une anthropologue a la lourde tâche de rassembler et d'examiner chaque os, même les plus endommagés par le temps. D'un geste rompu à l'exercice, elle s'empare de ce qui ressemble à une côte et la confronte au schéma qui se trouve sous ses yeux.
Sur une table, un squelette est en partie reconstitué. La boîte crânienne trône, tandis que non loin l'on a commencé à reproduire sa mâchoire. «Ce qu'il y a de notable dans cette nécropole, ce sont que plusieurs corps reposaient dans le même tombeau», signale le directeur du CNRA. Puis, en montrant la photo d'une des sépultures lors de sa découverte, il explique : «Là, on voit bien qu'il y a un corps d'adulte, auquel viennent s'ajouter ceux de deux enfants.
En tout, nous avons trouvé 64 adultes et 48 individus immatures.» Le mystère de ce rite funéraire sera toutefois bientôt éclairci. «Les analyses des ossements nous permettront de connaître l'âge des individus lors de leur mort, mais aussi et surtout les causes de leur décès. Nous pourrons alors avoir une idée de la raison de la présence de tant d'enfants, si cela est dû à une épidémie ou autre», s'enthousiasme M. Ighilahriz.
Pour l'heure, la présence, à cet emplacement, de cette nécropole renseigne surtout quant au déplacement du centre urbain de la ville, faisant de ce qui est aujourd'hui la place des Martyrs une périphérie urbaine. Les archéologues pourront-ils aussi expliquer pourquoi ce lieu a été abandonné à partir du Ve siècle, alors qu'il semble avoir été une place forte berbéro-romaine ?
Icosium l'antique
Car le voyage dans l'histoire ne se termine pas au VIIe siècle, tout comme le passé d'Alger et de l'Icosium maurétanienne qui s'étend bien au-delà de l'époque médiévale. Ainsi, à près de 7 mètres de profondeur, c'est dans l'antiquité que les vestiges de la place des Martyrs nous emmènent. En ces temps-là, à la fin du Ier siècle avant Jésus-Christ, Alger portait le nom d'Icosium, qui est l'adaptation romaine d'Ikosim, ancien comptoir berbéro-punique des IIe et IIIe siècles avant notre ère, lorsque la cité autonome de Maurétanie passait sous l'autorité du royaume de Juba II.
«L'urbanisme berbéro-romain est marqué, explique le CNRA, par la découverte de deux rues dallées, les cardo», qui étaient, dans les villes romaines, les rues principales selon l'axe Nord-Sud. «Vers la fin du IIe siècle, un bâtiment de grande taille, quelque 440 m², est implanté entre les deux rues. Il présente deux séries de six piliers séparant le vaisseau central des deux bas côtés. L'ampleur de cet édifice permet de déduire qu'il s'agit d'un bâtiment public.
Il présente un immense sol mosaïqué décoré de motifs géométriques dont la mise en place est datée de la fin du IVe siècle», relate le CNRA. Et c'est ce même sol de mosaïque qui, quelques siècles plus tard, sera utilisé pour la nécropole et servira aussi de socle à l'édification de la mosquée et des échoppes y attenant, où l'on peut d'ailleurs aujourd'hui apercevoir, par endroits, ces petits carreaux colorés. «Ce sont 20 siècles d'histoire qui seront retranscrits dans ce futur musée», se réjouit M. Ighilahriz. Prendre le métro pour faire un voyage dans le temps…


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.