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«Youssef Chahine était un cinéaste visionnaire»
Salim Aggar, réalisateur de Chahine, le cinéma et l'Algérie
Publié dans El Watan le 10 - 08 - 2017

Chahine, le cinéma et l'Algérie, le nouveau documentaire de Salim Aggar, a été projeté, en avant- première nationale, au 10e Festival international d'Oran du film arabe, qui s'est déroulé du 25 au 31 juillet 2017. Le film revient sur le rapport qu'avait le grand cinéaste égyptien Youssef Chahine avec l'Algérie, surtout durant les années 1970.
Comment est née l'idée de ce documentaire sur la relation qu'avait Youssef Chahine avec l'Algérie ?
J'ai constaté que beaucoup de personnes, surtout parmi la nouvelle génération, ne connaissent pas bien la relation qu'avait Youssef Chahine avec l'Algérie dans les années 1970.
En 2004, il est revenu en Algérie pour faire la promotion de son film Alexandrie New York. Des extraits d'une conférence de presse animée à Alger à cette date sont montrés dans le documentaire. J'ai eu beaucoup de peine pour trouver des archives. Pour compléter mon documentaire, je suis parti en Egypte pour rencontrer des gens qui ont travaillé avec Chahine et des critiques qui connaissent le parcours du cinéaste en Algérie. J'ai tenté de rencontrer Magda El Sabahi, qui avait produit et joué dans le film Djamila l'Algérienne en 1958.
Son âge et sa maladie ne lui ont pas permis qu'on fasse une interview. Sa fille m'a dit que ce n'était pas possible. J'ai alors cherché des images d'archives, notamment à la Télévision algérienne, je n'ai malheureusement pas trouvé grand-chose. Je n'ai pas trouvé d'images de la rencontre entre Chahine et Djamila Bouhired. Par contre, J'ai pu faire parler Ahmed Rachedi, qui a été le premier à ramener Chahine en Algérie. Rachedi était directeur de l'Office national pour le commerce et l'industrie cinématographique (Oncic). J'ai rencontré aussi Amir Abadha, qui est président de l'Association des critiques de cinéma égyptiens, et aussi Ali Abou Chadi, qui était le patron de la censure à l'époque en Egypte.
Vous avez parlé de Djamila l'Algérienne. C'est le premier film à s'intéresser directement à la Guerre de Libération nationale, sorti quatre ans avant l'indépendance de l'Algérie...
C'est vrai. C'est le premier film de fiction à s'intéresser à la Guerre de Libération nationale, bien avant La bataille d'Alger et La nuit a peur du soleil. C'était même un film sur la bataille d'Alger avant qu'elle ne se termine. C'est extraordinaire. Cela prouve qu'à l'époque, l'Egypte soutenait à fond le combat des Algériens contre le colonialisme français.
Et, curieusement, Djamila l'Algérienne n'a pas été projeté en Algérie pendant sept ans. Il était presque interdit...
Le contexte à l'époque ne permettait pas qu'on évoque Ben Bella dans le film. Le régime de Boumediène ne voulait pas que le film soit projeté dans les salles. Il n'a été projeté qu'à la Cinémathèque. Ce n'est que plus tard que le film a été diffusé à la Télévision. Il est dommage que le film ait été traité de cette manière. La bataille d'Alger, sorti en 1965, a quelque peu jeté de l'ombre sur Djamila l'Algérienne. Le long métrage de Pontecorvo était plus abouti, plus fort.
Dans votre documentaire, Chahine dit : «Le régime de l'époque n'a pas apprécié que le film Djamila l'Algérienne fasse la lumière sur le combat d'une femme». Qu'en est-il ?
C'est vrai. Cette problématique de la femme combattante a toujours été posée dans le cinéma algérien. Les films produits depuis l'indépendance, dans les années 1960 et 1970 notamment, se sont surtout intéressés au combat d'un peuple, combat collectif. On a évité de focaliser sur un révolutionnaire. Jusqu'à aujourd'hui, il n'y a toujours pas de films algériens sur une figure féminine de la guerre de Libération.
Comment expliquez-vous cette situation ?
Je suis étonné. Il y a quelques documentaires, comme ceux de Amina Chouikh et de Nassima Guessoum. Il n'y a aucun film de fiction sur les femmes au combat, alors qu'on a produit des longs métrages sur Ben Boulaïd, Zabana, Krim Belkacem, Lotfi...Hassiba Ben Bouali et Djamila Bouhired méritent bien qu'on leur consacre des films.
La relation de Chahine avec l'Algérie s'est établie dans les années 1970 avec le célèbre film Le moineau (Al Ousfour), sorti en 1972...
Chahine avait tout préparé pour ce film, mais le régime d'Anouar Sadat avait refusé d'accorder le financement. Son prédécesseur, Gamal Abdel Nasser, était hésitant lorsqu'il a entendu parler du film, parce que Le moineau critiquait l'armée égyptienne et expliquait les raisons de la défaite face à Israël (La guerre des Six-Jours de juin 1967). Selon Amir Abadha, les responsables d'un festival avaient refusé d'accorder un prix pour Le moineau. Ce film reste l'un des joyaux du cinéma égyptien plus de quarante ans après.
Un film coproduit par l'Algérie...
L'Algérie a coproduit à 50 % le film avec une enveloppe de 30 000 dollars, ce qui est énorme par rapport aux cours de l'époque. Chahine a pris un technicien algérien, un directeur de production et un acteur, Sid Ali Kouiret, pour un petit rôle (il a joué aux côtés de Salah Kabil, Mariem Fakhr El Dine et Mahmoud El Melligui). Seddik Benyahia, alors ministre de l'Information, avait donné son accord pour le financement du film. A l'époque, le gouvernement algérien était très ouvert à ce genre de films, plus ouvert que maintenant ! L'Algérie a, par exemple, coproduit Z, de Costa Gavra, un film qui critiquait le pouvoir des colonels en Grèce. A la même période, Houari Boumediène évoquait le régime des colonels en Algérie.
Z a d'ailleurs obtenu à Hollywood l'Oscar du meilleur film en langue étrangère en 1970. Après Le moineau, l'aventure de Chahine continuait avec Le retour de l'enfant prodigue, en 1976, coécrit avec l'Algérien Farouk Beloufa...
C'était effectivement une continuation. Dans ce film, Chahine analysait la société égyptienne à travers la famille et la relation entre le père et le fils. C'est un film très fort sur le plan social. Sid Ali Kouiret a, cette fois-ci, joué un rôle important. Majda Roumi (chanteuse libanaise, ndlr) faisait aussi sa première apparition à l'écran. Il y avait une volonté algérienne de produire des films avec de grands réalisateurs arabes. Le retour de l'enfant prodigue fait partie de la filmographie algérienne. Aujourd'hui, nous aurions bien voulu avoir une coproduction entre un réalisateur égyptien avec l'Algérie. Depuis Chahine, l'expérience n'a malheureusement pas été renouvelée.
A la fin des années 1970, il y a eu une autre expérience avec Chahine, Alexandrie, pourquoi ? dans lequel le cinéaste revient sur un époque particulière de l'histoire de l'Egypte en 1942...
C'est une coproduction avec la Télévision algérienne. A l'époque, la RTA finançait des films comme Nahla, de Farouk Beloufa. Des films qui ont eu du succès. Ahmed Bedjaoui, alors responsable à la Télévision, avait ouvert la voie à Chahine. Il avait accueilli le réalisateur égyptien dans son ciné-club pour parler de son film Bab El Hadid, avant d'évoquer le projet de Alexandrie, pourquoi ?
Après, la relation de Chahine avec l'Algérie a été en quelque sorte rompue...
Dans les années 1980, les responsables algériens du cinéma avaient changé, n'avaient pas cette relation avec le réalisateur. De plus, le cinéma algérien n'était plus porté sur la coproduction internationale. Les entreprises cinématographiques dépendant de l'Etat avaient fermé. C'était la chute.
Des intervenants ont manqué dans votre documentaire, comme Sid Ali Kouiret, Mariane Khouri (nièce de Chahine), El Hachemi Zertal…
Mariane Khouri est plus importante derrière la caméra comme productrice. Il y a un passage dans le film où elle évoque sa liaison avec Chahine.
J'ai préféré m'adresser aux gens qui ont travaillé avec Chahine ou qui étaient autour de lui. Je pense que l'interview de Bedjaoui, par exemple, doit être plus complète. Bedjaoui a connu Chahine et a travaillé avec lui. Son témoignage est important sur notamment la relation entre le cinéma algérien et le cinéma égyptien.
On voit dans votre documentaire que Chahine était un homme qui fédérait les Egyptiens, un homme du peuple...
Lors des dernières années de sa vie, Chahine divisait les radicaux et les intellectuels modernistes. Les islamistes n'aimaient pas ses films. En 1994, il a été traduit en justice en raison de son film L'émigré (qui raconte l'histoire de l'Envoyé de Dieu, Youssef, transposée à l'époque des Pharaons). Mais, le peuple égyptien et certains intellectuels étaient derrière lui. C'est cela la force d'un réalisateur. Lors de son enterrement (en 2008), un homme criait que les intellectuels, les créateurs, les artistes et les producteurs étaient tous unis derrière Youssef Chahine.
Hiya faoudha (Le chaos), dernier film de Youssef Chahine, le cinéaste prévoyait déjà la révolte des Egyptiens contre le pouvoir en place...
Tout à fait ! Déjà, en 2004, Chahine parlait des révolutions arabes, disait que la Oumma arabiya était en difficulté, parlait de «l'héritage des chefs» qui se sont succédé au pouvoir, comme Moubarek, El Assad, El Gueddafi, etc. Youssef Chahine était un cinéaste visionnaire.
La colère des Egyptiens contre la corruption, la dictature et la répression est très visible dans Hiya faoudha. J'aurais aimé que Chahine assistât à la Révolution du 25 janvier 2011 pour dire : «J'ai vécu cela, je peux mourir après».


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