Jusqu'à quand l'Europe continuera-t-elle à ignorer ses propres lois et les conclusions de sa propre justice ? La question se pose depuis bien longtemps, mais elle a été relancée avec vigueur à la suite du récent arrêt de la CJUE (Cour de justice de l'Union européenne) invalidant un accord de pêche liant l'UE (Union européenne) et le Maroc. Autant dire sinon rappeler que cette institution s'est montrée conséquente avec elle-même pour avoir adopté, le 21 décembre 2016, une position similaire après avoir été saisie par le Front Polisario, et justifié son refus en rappelant toutes les données de la question du Sahara occidental. Tout est là, puisque rien n'a été omis ni négligé pour cerner une question au sujet de laquelle l'Europe ne se montre pas aussi intransigeante, comme elle le laisse entendre en d'autres situations. C'est ainsi que la CJUE a rappelé que le Sahara occidental est un territoire occupé auquel s'applique la résolution 1514 vieille de plus d'un demi-siècle et relative aux droits des peuples et territoires non autonomes. Que le Maroc en est la puissance occupante, ce qui veut tout dire, et dans un tel cas de figure, il ne doit en aucun cas être négligé. A l'inverse, ce serait au moins de la complaisance, ou encore une obstruction au règlement de ce conflit, et donc un blocage aux efforts déployés en ce sens par l'ONU et son Conseil de sécurité, afin que le peuple du Sahara occidental puisse exercer son droit à l'autodétermination. De ce point de vue donc, l'instance européenne a identifié avec précision la situation réelle de ce territoire, ainsi que les parties qui y sont liées (Maroc et Front Polisario) en appelant, et c'est ce qui est tout aussi remarquable, les choses par leur nom. L'Europe, qui est ainsi interpellée, ne pouvait ignorer une telle situation et autant d'éléments tout aussi précis les uns que les autres. A vrai dire, la question des accords commerciaux et leur extension aux territoires, sous-sol et eaux territoriales a été soulevée il y a de cela une trentaine d'années, soit depuis que l'Europe s'est engagée dans des accords dits de partenariat avec certains pays non européens. Et depuis cette époque, elle a constamment été appelée à se conformer à la légalité internationale, et depuis quelques années, aux décisions adoptées par sa propre justice, les plus récentes d'entre elles ayant conclu que les accords d'association et de libéralisation liant le Maroc et l'UE ne s'appliquent pas au Sahara occidental. Elles confirment donc que le Maroc est une puissance occupante, et le droit à l'autodétermination du peuple sahraoui. Que fera donc l'Europe alors qu'elle est appelée à appliquer ses propres lois, et au-delà les lois et règlements internationaux auxquels elle a souscrit, de plus en plus d'Européens considérant qu'«il est inacceptable que l'UE permette délibérément l'occupation illégale du Sahara occidental, tout en se targuant d'être leader de la protection des droits de l'homme». C'est ainsi que la question est posée, avec un combat contre une réelle injustice.