La production audiovisuelle est-elle trop chère ? Alors que certains professionnels du secteur estiment que les devis établis par l'Entreprise publique de télévision (EPTV) atteignant parfois des « sommes mirobolantes », d'autres considèrent que les prix appliqués sont dans les normes. Un barème référentiel codifiant les relations entre la direction de la Télévision générale et les producteurs de l'audiovisuel a été adopté en décembre 2007. Les comptes relèvent, néanmoins, d'une complexe acrobatie arithmétique. Il est ainsi inscrit que la fourchette des prix d'un scénario d'un film de cinéma oscille entre 2 et 3 millions de dinars. Un téléfilm de 70 à 80 minutes coûte jusqu'à 600 000 DA. Un épisode d'un feuilleton de 30 minutes coûte entre 100 000 et 70 000 DA. L'épisode d'une série (constituée de plusieurs scénarii) coûte jusqu'à 140 000 DA. Le sitcom (situations comédiennes développant des thèmes dont les genres sont dissemblables) est le moins onéreux. Il revient à près de 80 000 DA par épisode. L'idée de caméra cachée est rémunérée de 40 000 à 80 000 DA par épisode. Pour ce qui est de l'interprétation, la fourchette de rémunération pourrait atteindre 15 000 à 20 000 DA. Le cachet de l'interprète du premier rôle d'un feuilleton peut, selon les cas, atteindre 500 000 DA pour 30 ou 40 jours. Un ancien cadre de l'EPTV précise néanmoins que ce « barème, fait pour les rémunérations des techniciens, des comédiens, réalisateurs, n'englobe pas les frais d'hébergement, les costumes, les décors. C'est là qu'on réussit à gonfler des devis ». Ce qui fait gonfler la facture, ce sont surtout les figurants, l'hébergement et la restauration. « Si le tournage se fait à Alger et que la majorité des techniciens et comédiens y habitent, le budget sera moins élevé », explique-t-on. Malika Laïchour Romane, réalisatrice-productrice de la société « Rive blanche », dénonce l'usage abusif des sponsors. « Pourquoi autant de perte d'argent ? », s'étonne-t-elle. Notre interlocutrice confie : « J'ai réalisé une production exécutive au profit de l'ENTV. Une fois le travail accompli, j'ai rendu tous les décors et les costumes (hormis une perte de 10% devenue inutilisable). A la Télévision, ils en sont restés cois ». Dans la mesure, nous dit-on, où le contrôle est inexistant, les factures ne suffisent pas pour savoir si ce travail a réellement été fait. Le président de l'Association des producteurs d'audiovisuel estime qu'il est nécessaire qu'il y ait un rapport qualité/prix. « La sanction de la qualité devrait être naturelle. Nous avons demandé la mise en place d'un code de déontologie. Il faut qu'il y ait un esprit de justice », considère-t-il. A la question de connaître le budget alloué à son prochain sitcom, Sid Ahmed Guenaoui nous demande de nous référer au barème référentiel de la Télévision. Il évalue le coût de production moyen d'un sitcom à 4 milliards de centimes et c'est exactement, selon des sources proches de l'EPTV, ce qu'il a obtenu. Ce montant, nous dit-il, représente une bagatelle en comparaison avec la production du film retraçant la vie du martyr de la révolution algérienne, Benboulaïd. Réalisée par Ahmed Rachedi et financée par le ministère des Moudjahidine, cette super production devrait coûter (estimations non confirmées par le ministère et le réalisateur) la coquette somme de 5 millions de dollars.