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Coup de cœur - Dans «Lettre à ce père qui pourrait être vous» : Le cri d'alarme de Mohamed Garne
Publié dans Horizons le 07 - 06 - 2010

Un livre écrit en un jet naturel. Qui se lit aussi spontanément. Dans une écriture simple, sans fioritures, convaincante. Comme si l'auteur est un habitué de l'écrit. Pourtant, non. Mohamed Garne qui signe là avec « Lettre à ce père qui pourrait être vous », son premier ouvrage, car l'on s'attend avec l'épilogue non achevé à une suite, donne à lire une histoire, comme vécue. Une petite histoire dans la grande Histoire. Telle qu'il l'a mené depuis sa naissance. A partir d'un rien. Du néant est née une autobiographie qui dépasse la première personne du singulier pour se faire plurielle, joignant le devenir d'un homme, d'une famille, à celui d'une nation, puis celui d'un monde, dans un sens universel. Puisque Mohamed Garne qui poursuit sa quête de la justice veut la partager avec d'autres hommes qu'ils soient en Algérie ou ailleurs. Pourvu qu'ils aient cette faculté de chercher à tiller les lois dans cet objectif de dépasser ce stade officiel de la promulgation pour devenir une réalité qui profite à toutes les victimes de la guerre. Là où elle a sévit. C'est ce qu'a décidé Mohamed Garne en faisant de sa vie intime, une vie publique. Dans laquelle il raconte bien sûr sa naissance mais aussi et surtout ce qui se greffe autour en ces années de guerre, dans les maquis de la région du Titri, tels que sa mère après tant d'années de silence a fini par lui révéler. Non sans lui reprocher à aujourd'hui d'ailleurs, d'avoir déterré ce passé qu'elle avait enfoui dans son giron depuis qu'elle l'y a porté, lui, son enfant. Cet enfant qui a ouvert les yeux dans un camp de concentration de Saint Cyprien des Attafs, aujourd'hui, Sidi Bouabida, non loin de Thniat El Had, dans Tissemssilt.
UNE NAISSANCE ET UNE ENFANCE TOURMENTÉES
Pour passer son enfance d'orphelinat en orphelinat abandonné par les autorités hospitalières, après avoir été enlevé à sa mère biologique. Nous sommes en 1960. De l'année qui suivra, Mohamed finit par trouver des documents inhérents à sa naissance. Il est orphelin et vit sans famille. Cette solitude va le plonger dans l'errance et la délinquance de nourrice en nourrice, d'orphelinat en orphelinat. Un dossier témoigne des sévices qui lui sont infligés dans ces différents foyers. Mohamed ne se résout pas à se contenter de ce sort et prend sa destinée en main. D'autant qu'un jeune couple d'intellectuels vient à son secours pendant quelques années, le soutirant de toutes les punitions dont il écope. Mais là aussi pas pour longtemps. En âge de comprendre et de se prendre en charge, même par n'importe quel moyen et de nouveau lâché par ses parents adoptifs qui lui donnent leur nom, il est en proie à cette lancinante angoisse de vouloir connaître ses origines. Il entreprend de se chercher et de fouiner dans son être, alors que la vie qui commençait à lui sourire va de nouveau le lâcher en pleine adolescence. ‘'A quinze ans, j'ai retrouvé mon enfance'' écrit-il en page 41. « Nous ne pouvons te garder, retourne à l'orphelinat » lui dit Katiba, sa mère adoptive (P 43) Il retourne à la rue et ses travers, fait de la prison, se lacère, se mutile comme pour ne pas sombrer dans le néant de nouveau… A la faveur de ce retour à l'orphelinat, il sera orienté vers une formation de mousse à Mostaganem.
Ce diplôme va le libérer plus tard et fera de lui un navigateur. C'est là qu'il se reprend en main, non sans avoir aussi profité d'un stage d'aide soignant, que lui offrait l'orphelinat plus tard quand il est réformé du service militaire. Une formation de deux ans qui va le faire employer dans un hôpital d'Alger. Durant cette période, Mohamed va vivre les soubresauts des événements d'octobre 1988, puisqu'il raconte comment il a pu venir en aide aux jeunes manifestants blessés en tant qu'infirmier. C'est là aussi qu'intervient la période charnière et cruciale de sa vie d'orphelin. Il décide de fonder un foyer avec à l'esprit toujours qu'il ne connaît toujours pas l'essence de sa venue au monde. Il entreprend de chercher sa mère.
De péripétie en péripétie, d'échec en échec, Mohamed ne se décourage pas. Il s'acharne et veut comprendre. En cette année de 1988, il retrouve enfin sa mère qu'il n'a cessé de chercher. Mais inlassable, il est en quête de paternité et veut en avoir le cœur net. D'autant qu'il veut renouer avec la famille de son père, mort en martyr. Selon les confidences de sa mère, avec laquelle il renoue difficilement mais sûrement.
LA LONGUE QUÊTE DE LA VÉRITÉ
Il retourne au village natal de ses parents, en pleins bouleversements de cette décennie noire, sanglante, née de la violence terroriste. Qu'importe le danger, Mohamed ne lâche pas prise et accepte même de passer devant la justice, parce que la famille paternelle refuse de lui reconnaître tout lien avec son père. Lui qui d'après les dires de sa mère était bel et bien fils de chahid et sa mère, femme de chahid. Mohamed veut réparation auprès des autorités compétentes en la matière Qui jusque là n'était en possession d'aucun papier le stipulant. Avec force convictions et nombre de prières, sa mère l'accompagne enfin au village et accepte de témoigner, afin que son fils bénéficie de l'affiliation, tout en rejetant ce fait qu'elle en veuille à l'héritage, en terres notamment. La révélation se fait dans « la douleur et la honte » comme le qualifie amèrement la veuve éplorée, face à un juge impitoyable. Mohamed n'est pas le fils de Bougoucha Abdelkader.Il est ce fruit amer d'un viol des soldats français qui ont torturé, malmené et abusé de Kheira, la jeune femme de 16 ans, arrêtée dans les maquis d'EL Atteuf. Mohamed est tout retourné. Sur le chemin du retour, il est mêlé en lui ce sentiment confus entre soulagement et déception mais chargé de compassion pour sa mère, qui retourne sa colère contre son fils. Elle ne dit mot et lui, garde le silence. Un silence qui le remue au point où il décide de faire prendre une autre tangente à sa quête de paternité. Il s'en va en « guerre » contre cette administration coloniale de qui il va demander réparation, dédommagement mais surtout reconnaissance du viol ou des viols, et puis enfin des excuses, pour les préjudices portées à l'encontre de sa mère et de lui en tant que victime de guerre, directe.
L'ENFANT D'UN VIOL COLLECTIF, RÉVÉLATION ET DOULEUR
Lors d'un de ses embarquements en tant que marin, il fait escale à Marseille et le voilà dans cette logique de reprendre en main sa destinée, fort de ce document délivré par la justice algérienne, la cour suprême, statuant que Mohamed Garne est né d'un viol collectif pendant la guerre d'Algérie. S'ensuivent démarches, audiences et procès, auprès de la mairie de Paris et près des tribunaux français. Pour porter plainte contre l'Etat français. Des dates sont mises en avant portant le paraphe de l'administration française qu'elle soit civile ou militaire.
Mohamed Garne persiste et signe. La presse française s'en mêle et s'empare de cette affaire au moment où les relations algéro françaises occupent l'actualité politique. L'affaire gagne en proportions. Et crève les écrans des chaînes télé françaises lors de JT de 20 heures. De 1998, où on refuse à Mohamed d'être cette victime directe à 2003 où il est reconnu en tant que victime de guerre pour les troubles psychologiques dont il souffre -d'après l'expertise d'un psychiatre éminemment reconnu- engendrés alors qu'il était dans le ventre de sa mère, qui subissait pendant toutes sa grossesse toutes sortes de tortures et de sévisses.
De longs jours de procès, qui n'ont jeté le pavé dans la mare de la grande histoire conflictuelle entre l'Algérie et la France qui ne veut toujours pas reconnaître ses torts. Pourtant, dans ce grand édifice de l'écriture de l'histoire commune entre les deux pays, Mohamed s'en sort quelque peu grandit d'avoir eu gain de cause même si ce ne sont que 60% de la pension d'invalidité qui sont accordés et tant attendus.
Parce que dès le premier procès en 2001, ce sont seulement les 30% qui sont octroyés, puis 45% en 2002. Non sans cet arrière goût des ces dédommagements qui ne sont toujours pas versés et pour lesquels, Mohamed continue de lutter comme il l'écrit à la fin de ce livre témoignage : « Une reconnaissance juridique et symbolique pour les dommages qui m'ont été faits, loin de cette motivation de l'appât de gain. ». Livre que son auteur qualifie en ces termes : « Ce livre est mon cri d'alarme pour alerter l'opinion publique » soutient-il en marge de cette vente dédicace organisée à la librairie de l'union des écrivains algériens, en ce début mars 2010. sEt pour lequel il est revenu en ce 3èmefiliv (festival international de la littérature et du livre de jeunesse) en ce mois de juin.
Mohamed Garne signe là un brûlot qui vient remettre à point nommé la question de la reconnaissance de la France de ses crimes coloniaux, des crimes de guerre, de crimes contre l'humanité et comme le dit si bien Mohamed qui ponctue son écrit de ce pardon qu'il implore lui-même de sa mère pour lui fait mal. Mal à son histoire mise à nu, dont elle a si honte encore plus, 50 ans après, même victime reconnue par les siens. Une des nombreuses pages d'histoire dans cette grande Histoire qu'est « ce livre, puisse-t-il être la première pierre de l'édifice de mémoire entre les deux pays. Mes deux pays », termine l'auteur. Qui n'en continue pas moins sa quête insatiable d'être part entière victime de la barbarie coloniale. Et le combat continue, ponctue-t-il.


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