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Iveton, l'anti-colonialiste
Publié dans Horizons le 19 - 06 - 2010

Fernand Iveton est né le 12 janvier 1926 à Alger. Militant du Parti communiste algérien, il nourrissait un fort sentiment anti-colonialiste et, à 30 ans, il prit la décision de participer activement à la lutte contre le colonialisme français en Algérie. En octobre 1956, il réussit à prendre contact avec le groupe du FLN du Ruisseau (El Anasser) et leur proposa un projet d'attentat qu'il voulait exécuter. Après étude, le projet fut accepté. Il consistait à faire exploser une bombe à l'intérieur de l'usine à gaz E.G.F de Belcourt (Hamma) où il travaillait comme ouvrier tourneur, dans le but de provoquer une grande panne qui priverait Alger d'électricité pendant quelques jours. Fernand Iveton précisa que cet attentat ne devait faire aucune victime, ce qui fut accepté. A ce stade du projet, et conformément au système de cloisonnement institué au cours de la bataille d'Alger, la prise en charge de Fernand Iveton fut modifiée. C'est désormais la militante Jacqueline Guerroudj qui sera son seul contact et assurera la liaison entre lui et Taleb Abderrahmane qui fabriquera les bombes.
Car Iveton, pour des raisons d'efficacité, demanda deux bombes. Mais, dans un souci d'éviter toute perte humaine, il demanda aussi, avec insistance, qu'elles soient réglées pour exploser à 19h30, c'est-à-dire 1h30 après la sortie à 18h des travailleurs de l'E.G.F. Jacqueline Guerroudj prit contact avec Taleb Abderrahmane et, au bout de quelques jours, celui-ci lui remet les deux bombes, après les avoir réglées devant elle.
Le 14 novembre 1956, jour crucial, elle avait rendez-vous avec Fernand Iveton pour lui donner les deux bombes. Mais la musette d'Iveton était trop petite et, finalement, il ne prit qu'une seule bombe, laissant l'autre à la jeune militante qui se demandait ce qu'elle allait bien en faire… C'est la dernière fois que Jacqueline Guerroudj voyait Fernand Iveton. A 13 heures ce 14 novembre 1956, Fernand Iveton se rendit au travail, sa musette suspendue à l'épaule. En arrivant, il la mit dans un placard, en attendant le moment d'agir. Il ignorait que la minuterie de la bombe était assurée par un réveil plutôt bruyant. En tant que communiste, Iveton était déjà suspect aux yeux de ses chefs à l'E.G.F. Et lorsque un de ces chefs, un contre-maître, entendit un tic-tac régulier sortir du placard, il n'hésite pas, il prévient la police. C'était le flagrant délit et Fernand Iveton fut aussitôt arrêté et immédiatement soumis à la torture, car on avait trouvé dans sa poche un papier où Taleb Abderrahmane avait inscrit l'heure de l'explosion des deux bombes. Et, les policiers voulaient savoir d'urgence où était la deuxième bombe. Une urgence qui les rendit impitoyables et, durant des heures, ils infligèrent d'atroces souffrances au prisonnier. Mais, opposant une résistance surhumaine à ses tortionnaires, Iveton ne dénonça personne, ni Jacqueline Guerroudj qui lui a remis la bombe, ni Yahia Briki, un militant qui devait, si la bombe avait explosé, l'héberger chez lui et l'aider ensuite à rejoindre le maquis. Car si l'acte de sabotage avait réussi, il aurait été le premier soupçonné en sa qualité de militant communiste.
Après son arrestation et son incarcération à la prison de Serkadji, Fernand Iveton, le jeune idéaliste épris de justice, allait être traîné dans la boue par la presse et la justice coloniales. Des imputations mensongères reprises par plusieurs journaux de la métropole firent de lui un tueur sans pitié. La justice coloniale avalisa cette fable et condamna Fernand Iveton à la peine capitale pour tentative de sabotage.
Arrêtée en janvier 1957, Jacqueline Gueroudj a fait des déclarations à la police dans l'espoir de rétablir la vérité et de provoquer la révision du procès de Fernand Iveton. Mais la justice n'en a pas tenu compte.
Et le président français René Coty n'a pas hésité à refuser le recours en grâce d'un homme condamné à mort pour une tentative de sabotage inaboutie.
Fernand Iveton fut exécuté – assassiné, dirons-nous – le 11 février 1957 à 5 h du matin à la prison de Serkadji. Il mourut en criant : « Vive l'Algérie indépendante ». Deux autres combattants de la liberté, Mohamed Ouenéri et Mohamed Lakhnèche furent exécutés après lui, pendant que tous les prisonniers de la prison Serkadji scandaient les noms des trois héros et chantaient l'hymne national.
* (Sources : Jacqueline Guerroudj. Des douars et des prisons. Alger, Bouchène. 1993).


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