Une œuvre rimée de bout en bout qu'on parcourt aisément entrant dans ce qui fut le chemin de vie de l'auteur revêtant la texture d'un roman. Seize parties composent le livre et sont des points de repère, des lieux, des senteurs, des émois exprimés. Des chapitres suscitant, selon que l'on connaisse la région où se situent les poèmes ou bien qu'on la découvre, de l'amitié et un attachement. Kaci Hadjar, professeur de médecine, a pris du recul avec le bistouri et le stéthoscope, pour aller courtiser la rime et dire ses émotions. Le passage du temps et les différentes époques marquant chacune le climat et la végétation sont le prélude donnant un avant-goût sur une belle écriture. Pour le lecteur féru de poésie et ami des poètes. Tout un univers de montagnes lié aux êtres, aux animaux, à la nature est mis en scène. Ressuscités par le poète-narrateur en même temps que des personnages hors du commun à l'image du crieur public, du visionnaire, de Da Omar le laboureur, du tueur à gages et tant d'autres villageois qui ont laissé leur empreinte dans la mémoire collective. Né entre deux guerres, la Première et la Seconde, ayant connu la guerre d'indépendance et ses souffrances, fils d'émigré, le poète, le lecteur l'aura compris, a la réceptivité à fleur de peau. Les lieux et sites appartenant à toute la communauté autour desquels cette dernière se réunit en des occasions précises, des endroits d'utilité publique et dont on peut entendre encore la rumeur sont là. A travers le pressoir, le moulin à grain au bord du ruisseau habité par des fantômes et la « touiza », ces actions collectives de solidarité perpétuelle, tout est réveillé, revivifié par la plume. Issu d'une société où il est inconvenant de laisser paraître ses sentiments, de surcroît lorsqu'on est un garçon, Kaci Hadjar a tout de même désobéi à la règle machiste. Dame ! Il est poète à l'exemple de tant des ces bardes du pays profond et de Si Mohand le errant sur la route des étoiles. Un jour, pris par l'appel du pays blessé il « a troqué la plume pour le fusil » pour gagner le maquis algérien. Il désertera de l'armée française et rejoindra la frontière algéro-marocaine jusqu'à l'indépendance. D'autres thèmes se chargent de mémoriser les étapes de l'existence du poète et médecin empruntant la voie satyrique, de méditation ou de contemplation. L'absence et l'enfance se distinguent tout au long de la biographie versifiée de l'auteur. C'est avec la voix du conteur et du troubadour que Kaci Hadjar a mis à nu le côté « blanc » de son être. On ne répètera jamais assez le travail de pro que réalisent les publications Apic où à été imprimé « Les joies et les peines ».
