Une pratique économique qu'exerce bon nombre de citoyens de la localité qui s'est développée, passant du stade artisanal à une échelle d'activité plus grande, créant même des créneaux annexes grâce notamment à la réalisation d'une infrastructure portuaire en lieu et place du vieux port aux capacités limitées, similaires à celles d'un abri de pêche. L'aménagement du nouveau port avec son immense terre-plein, ses quais et son plan d'eau qui font de lui l'un des plus grands de la côte algérienne, a permis l'implantation de superstructures accueillant différentes activités intégrées et gravitant autour des richesses générées par la production halieutique. Situé dans la partie Est de la ville, l'accès au port est réglementé. Les visiteurs désirant se rendre avec leurs véhicules à l'intérieur doivent s'acquitter des droits de stationnement dans l'un des parkings qui y sont aménagés. Le tarif est fixé à seulement 50 DA. Avant d'aboutir aux quais, la large route qui y mène laisse découvrir sur ses flancs des hangars où diverses activités s'y exercent. Non loin du chantier de réparation navale reconnaissable à sa grande enseigne et située à proximité de l'entrée principale, une fabrique industrielle de glaces, dont le portail est grand ouvert, et un restaurant à la devanture moderne donnent un avant-goût de l'ambiance régnante. Une ambiance qui se joue et fait peu cas des frontières souvent rigides entre les professionnels des filières de la pêche et les touristes. Cette proximité où tout le monde côtoie tout le monde favorise on ne peut mieux une atmosphère harmonieuse où chacun évolue en symbiose avec l'autre. Sans nuisance ni désagrément. Sur les quais où des enfants, même des pères de famille, nourrissent avec des miettes de pain, dans une ambiance bon enfant, les poissons des eaux du port, des marins s'activent à recoudre les filets « épuisés » par de longues heures de pêche, tandis que les patrons de sardiniers et autres bateaux inspectent la bonne marche de leurs machines en prévision d'une énième sorties en mer. Faire les cents pas et flâner à travers les quais semblent une passion qui emballe de nombreux visiteurs que même les rayons du soleil du milieu de la journée n'importunent pas. En dépit de l'activité bruyante qui y règne, le calme parvient crânement et miraculeusement à prendre le dessus. Au milieu des dizaines de bateaux de pêche, des plaisanciers occupent une portion du port. Les halles à marée et les piaules de pêcheur cohabitent ici avec une rangée de petits restaurants spécialisés dans le poisson. En voiture ou à pied, les visiteurs sont cordialement invités par les patrons de restaurants à découvrir les délices de leurs menus. Il est difficile de chasser la tentation, tant que les effluves des poissons et crustacés grillés ou en sauce vous titillent les narines. Réserver dans l'une des terrasses des restaurants une des tables qui, faute d'espace, y sont disposées à rangs serrés à son prix. Un prix fort qui rappelle aux consommateurs combien la ressource halieutique se fait de plus en plus rare en ces temps où tous les procédés sont usités pour traquer le poisson, sans se soucier de son repos biologique ou le massacre engendré par les filets dérivants. Concurrence oblige, les maîtres des lieux n'omettent aucune courtoisie et font montre d'une disponibilité sans bornes, malgré la charge des commandes, pour fidéliser et mettre à l'aise leurs clients. On y propose des daurades, généralement issues de l'élevage, du merlan, du rouget, des crevettes, des tranches d'espadon ainsi que d'autres espèces aussi appétissantes les unes que les autres selon l'arrivage, comme c'est écrit sur la liste du grand menu accroché en évidence aux devantures. Ici, on choisit son menu des présentoirs. « Tous les restaurateurs du port préparent du poisson et des crustacés frais pour la bonne raison qu'on écoule notre marchandise le jour-même de son achat. En plus, elle est conservée à une température idéale, grâce à nos présentoirs et congélateurs régulièrement contrôlés », assure un restaurateur. Les cuistots tenaillés entre le grill et les marmites trouvent a priori difficilement le temps de respirer, voire même de soulever la tête. Les commandes se succèdent à mesure que les tables se garnissent de plateaux alléchant d'où débordent poissons et crustacés impeccablement décorés. Tous les moyens sont bons pour épater les hôtes. Prenant place autour de deux tables, une nombreuse famille algérienne vivant en France semble emballée par la qualité du poisson servi. « Je suis bluffé par le goût du poisson de nos côtes. Rien à voir avec celui qu'on achète en France », confie le père de la famille en question. Et d'ajouter : « Même les prix sont intéressants. » Côté prix, tout est relatif. Son avis n'est pas partagé par un couple de retraités ayant réservé la table mitoyenne. « Pour un plat de sardines, deux merlans, deux tranches d'espadon, une bouteille d'eau minérale et deux plats de frites, j'ai déboursé 4.440 DA. Certes on a très bien mangé, mais le fait de passer à la caisse gâche plus ou moins le plaisir de ces bons moments. Qu'à cela ne tienne, se permettre une fois dans l'année un excès pareil est excusable à mon sens », argumente l'époux. Avec une petite opération arithmétique, on se rend à l'évidence qu'un menu pour deux, comme celui commandé par ce dernier couple, dépasse allègrement les 20% du SNMG. C'est dire que le poisson n'est pas à la portée de l'Algérien moyen. « Etant donné que nous sommes venus en famille à Azeffoun et dans le souci de contenter tout le monde, j'ai décidé de commander des plats de sardines accompagnés par des frites. Tout est une histoire de budget », estime un père de famille de Koléa qui confie qu'ici le poisson est moins cher que dans les restaurants de la côte de Tipasa. Ainsi, s'écoule les jours d'été au port d'Azeffoun, entre plaisirs gastronomiques et la curiosité de découvrir les secrets d'une profession, en l'occurrence la pêche, vieille comme la ville.