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Histoires vraies
La femme aux béquilles (1re partie)
Publié dans Info Soir le 03 - 01 - 2011

Avant même qu'elle entre dans la salle des assises, le public, le juge, les jurés, les avocats et le procureur entendent le bruit de ses béquilles sur le carrelage du couloir. Et, lorsqu'elle apparaît, tous les visages se tournent vers la porte avec une expression de curiosité mêlée de répugnance : cinquante ans, plutôt grande, presque obèse, un visage lisse, des cheveux noirs huileux ornés d'un cercle doré. Elle a revêtu son manteau de laine chinée gris, garni de faux astrakan.
A pas lents, pesant sur ses deux béquilles, Clémentine se traîne maintenant dans la travée centrale. Après avoir jeté un coup d'œil vif à droite et à gauche, elle se dirige vers le box où deux gendarmes l'attendent. Puis son regard redevient dur ; fixe, buté. Tandis qu'elle avance, la bouche contractée par un pli amer, il court sur son passage un frémissement d'horreur.
Clémentine... Comment un monstre aussi horrible peut-il porter un prénom aussi charmant ?
Elle s'arrête un instant, comme pour reprendre son souffle, cramponnée à ses cannes. Pourquoi cette comédie ? Chacun sait ici qu'elle n'est pas infirme.
Le président, d'abord imperturbable, la regarde progresser à pas comptés. Puis, comme s'il sentait monter jusqu'à lui l'odeur acide de l'accusée, il ne peut réprimer une petite grimace qui assombrit pendant quelques secondes son visage sympathique de vieil enfant aux yeux bleus, que la majesté de la perruque ne parvient pas à défigurer.
«Je vous demande de rester calmes et silencieux», dit-il enfin au public en qui la révolte monte.
Dans un silence horrifié, les spectateurs observent alors la misérable comédie de l'inculpée gravissant les marches du box. Lorsque enfin elle a gagné sa place, le juge dit, sans une ombre d'ironie mais contenant son indignation :
«Vous pouvez rester assise si vraiment votre état vous y oblige.» Clémentine n'attendait pas sa permission, elle s'est littéralement écroulée sur son banc.
Aux assises de Louvins, le 3 décembre 1980, le président a tout vu depuis qu'il juge : des voyous, des truands, des escrocs, des pauvres types fourvoyés dans la collaboration, des dénonciateurs, des fascistes criminels, des empoisonneuses par amour, d'autres par intérêt, mais jamais un être aussi méprisable, aussi moralement hideux que cette Clémentine. Est-ce vraiment une femme ou un animal d'une espèce inconnue ? Par définition, un animal ne pourrait être aussi pervers. Le président parvient enfin à détacher son regard de cette accusée qui le fascine. Il chausse ses lunettes et ouvre son dossier :
«Vous vous appelez Clémentine Rippens.
— Oui, monsieur le président.»
La voix est aimable et claire.
«Vous êtes née le 15 août 1930. Votre père était bûcheron.
— Je l'accompagnais souvent dans le bois, répond l'accusée. C'est lui qui m'a appris à manier la cognée et la tronçonneuse. De mon état je suis forestière, monsieur le président. Autrefois j'étais très solide.»
Les précisions données, elle promène sur la salle un regard satisfait, ravie d'avoir pu parler de son passé de «bûcheronne». Elle ne se rend pas compte que le mot «tronçonneuse» a provoqué dans le public, et chez le président lui-même, une association d'idées effroyable : pendant quelques instants, ils l'ont imaginée arc-boutée, ayant abandonné ses béquilles, sciant avec cet engin, un rictus de plaisir sur les lèvres, les arbres et les branches, comme s'il s'agissait de corps et de membres vivants.
«C'est cela... une vie saine et au grand air...», ne peut s'empêcher de grommeler le président avant de reprendre un interrogatoire qui laisse désormais l'accusée totalement indifférente. (à suivre...)


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