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Histoires vraies
Le cœur crevé (1re partie)
Publié dans Info Soir le 21 - 12 - 2013


«Vous vous appelez Ilsa Schott ?»
La voix ferme et calme du psychiatre s'adresse non pas à une femme, non pas à Ilsa Schott, mais à une sorte de bête fauve, ficelée et muselée, que l'on vient de jeter comme un paquet dans la salle des urgences.
Les yeux d'Ilsa, d'un bleu profond, presque électrique, s'accrochent au regard du médecin. Toute la rage, toute l'impuissance et les brimades de son corps ligoté passent dans ce regard.
Le médecin a un geste vers les infirmières. «Otez le bâillon !
— Elle va hurler, docteur, et mordre tout ce qu'elle pourra !
— J'ai besoin qu'elle parle !»
Les infirmiers s'exécutent en haussant les épaules. Parler, cette fille-là ? La dingue la plus dangereuse qu'ils aient reçue dans ce service depuis des années ! Elle a déjà mordu deux infirmiers et cassé trois seringues dont elle porte encore les aiguilles dans le bras ! Personne n'arrive à l'approcher. La douche glacée n'a pas eu raison d'elle, il aurait fallu l'assommer ! Ce petit psychiatre ferait mieux d'expédier cette tigresse aux électrochocs, plutôt que d'essayer de lui parler.
Le bâillon de sparadrap arraché sans ménagement fait venir des larmes dans les yeux bleus d'Ilsa Schott et elle crache brutalement au visage de l'infirmier. D'une voix rauque, cassée à force de cris, elle l'injurie avec vulgarité, puis se tait brusquement pour reprendre son souffle. Le psychiatre l'entend marmonner, comme pour elle seule : «Ils vont me crever le cœur...»
Elle respire profondément, par saccades, comme quelqu'un qui se noie et retrouverait enfin la surface. Couchée sur le flanc, dans une position improbable, les bras dans le dos, les jambes repliées en arrière, elle renverse la tête pour regarder le plafond. Ses longs cheveux bruns éparpillés autour de son visage blanc, les yeux fixes, elle récupère. On dirait une étoile de mer échouée sur une plage.
Le psychiatre de service de l'hôpital d'Offenbach a consulté la fiche d'admission de la malade. Il y a lu en résumé ce qui devrait ressembler à une vie. Ilsa Schott, trente-trois ans, célibataire, un enfant confié aux services sociaux, internée depuis 1960. Comportement agressif envers les infirmiers, responsable de divers dégâts à l'intérieur de l'hôpital, vitres brisées, meubles cassés, placards dévastés. Deux tentatives de suicide et, plus récemment, tentative d'étranglement sur la personne de l'infirmière en chef. Doit être déplacée dans la section des agités dangereux.
Mais une fiche n'a jamais raconté une vie tout entière.
«Vous vous appelez Ilsa Schott ?»
Pourquoi ce médecin veut-il absolument lui faire répéter son nom ?
Pour l'identifier dans le sens complet du terme. Un dément qui ne connaît plus son nom a franchi un stade avancé de la maladie. En revanche, celui qui est encore capable de s'identifier en tant qu'individu socialement répertorié, possédant un nom, un âge, une famille, un métier, des racines, dans la normalité en quelque sorte, celui-là est encore accessible au dialogue.
«C'est marqué sur le papier que je m'appelle Ilsa. Vous ne savez pas lire ?
— Depuis quand êtes-vous à l'hôpital ?
— Ce n'est pas moi qui vous répondrai. Moi, je ne sais plus où sont les jours, les nuits, les heures que je passe ici. On me les vole. Je veux m'en aller, je veux sortir de cette maison de fous, on va me rendre fou, moi aussi.
— Folle, vous voulez dire.
— Je dis fou. Ici on est fou, on n'a plus de sexe, plus de visage, plus de corps, on est enfermé comme un monstre. Je ne suis pas un monstre. (A suivre...)


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