Certains libraires, qui voient les trottoirs se transformer en zone de chalandises où les livres côtoient les produits des artisans, font la moue et haussent les épaules par dépit. D?autres, excédés par ce spectacle, dénoncent la concurrence déloyale et le laxisme des autorités. L?un d?eux dira : «Il est regrettable de voir que l?Etat encourage ce genre de pratiques. Le livre est dévalorisé, des ?uvres sont posées par terre comme de vulgaires chiffons». Mis à part cet aspect, ils déplorent le fait que les bouquinistes leur cassent leur commerce. «nous avons des charges importantes que nous payons rubis sur l?ongle alors qu?ils ne payent pas un centime. Ils s?en sortent avec des bénéfices nets. Ce que je propose, dit-il ironiquement, c?est qu?on leur cède la place et qu?on ferme boutique. Si ça continue, ce sera la seule issue.» Ce qui attise leur colère, c?est que les prix affichés chez les libraires sont trois à quatre fois plus élevés pour les mêmes titres que ceux proposés par les bouquinistes. Les lecteurs se rendent naturellement chez ces derniers pour acquérir les livres qu?ils désirent. Face au désarroi des libraires, les bouquinistes se défendent d?être leurs antagonistes. Ils certifient que leur activité peut s?inscrire dans la complémentarité. Il ne s?agit pas, selon leurs propos, de leur faire de la concurrence ou de leur ôter leur pain de la bouche. C?est juste une activité qui peut aider à la généralisation de la lecture.