Merzak Meneceur 43 millions d'électeurs français étaient invités à se rendre aux urnes, dimanche, pour le premier tour des élections départementales qui ne concernent pas Paris et Lyon, villes-départements. D'un enjeu local, ce scrutin, majoritaire à deux tours, a pris dès le début de la campagne un enjeu national avec une droite et une extrême droite qui en ont fait une opération de défiance au gouvernement socialiste qui a presque réussi. Un des enseignements à tirer de ce vote est que les abstentionnistes, un électeur sur deux, sont le premier parti de France même si leur nombre à reculer de quelques points par rapport à 2011. Mais les faits majeurs sont les résultats obtenus par la droite et le Front national. L'UMP de Sarkozy, allié aux centristes de l'UDI, est arrivé en tête avec 29% de voix et pourrait se retrouver, à l'issue du second tour, à la tête des deux-tiers des 96 départements de la France métropolitaine. La droite est considérée comme le principal vainqueur du scrutin dans la mesure où elle a obtenu un bon score et surtout dépassé le Front national, à qui les sondages prévoyaient 30%. La formation d'extrême droite a obtenu 25%, ce qui est déjà énorme ! C'est le meilleur score de son histoire dans des élections locales. Son ancrage dans les territoires est maintenant une réalité même si à l'arrivée, en raison du mode de scrutin, il peut prétendre à diriger deux départements (l'Aisne et le Vaucluse) au maximum. Il n'est plus question d'un vote de protestation en faveur de l'extrême droite, mais d'une part d'adhésion. Comme le souligne l'éditorialiste de L'Humanité, il «détourne trop de colères populaires vers l'impasse du national-populisme» en jouant sur les cordes de l'europhobie et de l'islamophobie. Le drame pour la démocratie est que cela s'avère payant. Si la droite et l'extrême droite sont les vainqueurs du premier tour du scrutin départemental, qui se déroule dans des circonscriptions dites cantons avec chaque parti présentant un binôme (un homme-une femme), il y a bien un perdant. Celui-ci n'est que le parti au pouvoir. Une défaite annoncée. Avec 21% des voix, le Parti socialiste a peut-être limité la casse, on parle d'un résultat de résistance, mais sa défaite est une réalité qui fait la démonstration des limites de la base sociale du gouvernement actuel. Elle est aussi la conséquence de la division de la gauche. Au moins 15% des voix sont revenues au Parti communiste, au Parti de gauche, aux écologistes et à divers gauches. Cette division est la conséquence des promesses présidentielles de 2012 non tenues par François Hollande qui a donné un tour à droite à ses engagements. À voir de prêt, toutes les voix de gauche rassemblées égalent celles de la droite. Elles se retrouveront au second tour pour battre la droite et le FN là où c'est possible, mais la certitude de perdre quelques dizaines de départements est acquise. Très peu de conseillers départementaux ont été élus au premier tour. Tout se jouera donc dimanche prochain où les reports de voix trancheront. Là où elle sera absente, la gauche uni appelle à voter pour l'UMP au nom des valeurs républicaines. L'UMP par contre va pratiquer le «ni-ni», mettant sur le même plan la gauche et l'extrême droite au grand désarroi de certains de ses dirigeants, comme Alain Juppé ou son allié l'UDI qui sont pour faire barrage à l'extrême droite. Toutes les leçons politiques des élections départementales seront tirées au soir du deuxième tour, dimanche prochain. Le gouvernement va-t-il persister dans sa politique menée depuis trois ans qui a désenchanté les Français qui ne voient ni le retour de la croissance, ni le recul du chômage, ni l'augmentation du pouvoir d'achat, ni la réduction des inégalités sociales et de la pauvreté ? Quelles seront les conséquences de l'avancée du Front national et de son ancrage dans les territoires et de la diffusion captive de son idéologie de l'intolérance et du bouc émissaire ?, etc. M. M.