Début à Alger des travaux du 38e Congrès de l'Union interparlementaire arabe    Le ministre de la Communication se recueille à la mémoire des martyrs de la presse nationale    Mali: des partis politiques appellent à la mobilisation contre leur dissolution et pour "sauver la liberté et la démocratie"    Massacres du 8 mai 1945: une autre empreinte dans le registre des crimes du colonisateur français en Algérie    Le Calife général de la Tariqa Tidjania, cheikh Ali Belarabi, accomplit la prière du vendredi à Ouagadougou    Touggourt : quatre morts et un blessé dans un accident de la route à El-Hadjira    Le blocus sioniste imposé à Ghaza tue chaque jour davantage d'enfants et de femmes    Oran : Mise en service de l'EPH d'El Kerma de 60 lits    Comité exécutif de l'UIPA: le soutien au peuple palestinien, un engagement ferme mû par les principes de libération et de justice    L'Algérie et le Ghana insistent sur le principe de solutions communes aux problèmes africains et de règlements négociés pour résoudre les conflits    CHAN 2024: la sélection algérienne A' à pied d'œuvre à Banjul    Ligue 2 amateur: beau duel pour l'accession entre le MB Rouissat et l'USM El Harrach    Athlétisme/Championnat arabe (2e j): 17 nouvelles médailles pour l'Algérie    Le Calife général de la Tariqa Tidjania, Cheikh Ali Belarabi entame une visite au Burkina Faso    Moutons de l'Aïd importés: lancement de l'opération de vente la semaine prochaine dans toutes les wilayas    Fête du Travail à l'ouest du pays: activités variées et hommages aux travailleurs et aux retraités    Les marchandises usagées importées appartenant à l'Etat exonérées des droits et taxes    Rebiga assiste à "Hô Chi Minh-Ville", à un défilé commémorant le 50e anniversaire de la libération du Sud Vietnam    Poursuite du stage à Sidi Moussa avec l'intégration des joueurs du CSC    L'Algérie clôture sa participation avec un total de 21 médailles    Kiev doit céder les territoires conquis par la Russie    Domination de la sphère informelle et écart croissant entre le cours du dinar sur le marché parallèle et celui du cours officiel : quelles solutions ?    Le projet de loi présenté à l'APN    Les représentants de la société civile interpellent les hautes autorités du pays    Ooredoo et l'Association nationale de volontariat organisent une opération de reboisement à Bou Saâda    Lorsque l'on a la bravoure en principe, il n'y a plus d'obstacle    La responsabilité politique du ministre Bruno Retailleau    De Gustav Landauer à Hassan Nasrallah ou l'universalité de l'esprit de la société    Le championnat national de football se met à jour    Présentation à Alger des projets associatifs    Quelles est la situation de la balance commerciale et des exportations hors hydrocarbures en 2024 de l'Algérie ?    Des prix « lignes rouges » et des représailles contre les contrevenants    Patriotisme et professionnalisme    Avant-première du documentaire ''Zinet Alger : Le bonheur'' de Mohamed Latrèche    Les renégats du Hirak de la discorde    Un site historique illustrant l'ingéniosité du fondateur de l'Etat algérien moderne    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Erdogan «enterre» la République d'Atatürk
La Turquie ne sera jamais plus la même
Publié dans La Tribune le 08 - 11 - 2016

Le chef de l'Etat turc poursuit son rêve de présidence à poigne et se pose en défenseur de l'islam sunnite.
La Turquie, submergée par les arrestations et les limogeages de l'état d'urgence depuis le coup d'Etat manqué du 15 juillet, ne sera jamais plus la même. Dans le cadre de la «lutte contre le terrorisme», sept députés du Parti de la démocratie des peuples (HDP, prokurde) ont été, vendredi 4 novembre, placés en détention préventive, dont les deux coprésidents de cette formation politique, Selahattin Demirtas et Figen Yüksekdag.
Accusé d'être la vitrine politique du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK, en guerre contre l'Etat turc depuis 1984), le parti est depuis longtemps dans le viseur des autorités. L'arrestation de ses dirigeants a été rendue possible par la levée, en mai, de l'immunité parlementaire de 148 députés (sur 550) dont 53 du HDP.
Troisième formation du Parlement avec 59 sièges, le parti prokurde a reçu plus de cinq millions de votes aux dernières législatives, le 1er novembre 2015. Le placement en détention préventive de ses dirigeants fait craindre son interdiction pure et simple, comme ce fut le cas jadis pour les précédentes formations prokurdes.
Indifférent aux critiques occidentales, le Premier ministre, Binali Yildirim, a expliqué vendredi que les députés kurdes devaient «payer le prix» de leur engagement «aux côtés de la terreur». «La politique ne peut servir de paravent au crime, la Turquie est un Etat de droit», a-t-il souligné. «Le parquet les avait convoqués, ils n'y sont pas allés, nous n'avions pas d'autre solution que la force», a justifié Bekir Bozdag, le ministre de la Justice.
Le chapitre des pourparlers avec le PKK, ouverts en 2010 à l'initiative des islamo-conservateurs, n'est plus qu'un lointain souvenir. Pour M. Erdogan, le calcul est simple. Au printemps 2015, à l'époque où les négociations étaient encore à l'ordre du jour, son Parti de la justice et du développement (AKP, islamo-conservateur) a perdu plus de deux millions de voix aux législatives du 7 juin.
Forteresse assiégée
Faire la paix avec les Kurdes ne lui a rapporté que des déboires. La plupart des voix perdues par l'AKP sont allées au parti prokurde HDP, plus encore au parti de l'Action nationaliste (MHP), partisan d'une ligne dure envers les Kurdes.
M. Erdogan compte d'ailleurs sur les nationalistes du MHP pour pousser son projet de présidence à poigne. Comme l'AKP n'a pas le nombre de voix suffisant pour imposer les amendements constitutionnels voulus, un référendum devra être convoqué. On parle d'avril 2017.
M. Erdogan est résolu à aller très loin dans la lutte contre les ennemis internes et externes
Là encore, il va lui falloir compter sur les voix du MHP. Un marchandage byzantin a lieu à ce sujet avec le chef des nationalistes, Devlet Bahçeli, qui propose de soutenir le projet de système présidentiel à condition que la peine de mort – abolie sous l'impulsion de l'AKP en 2004 lors de l'ouverture des négociations avec l'Union européenne (UE) – soit réintroduite.
De plus en plus souvent évoqué, le thème du retour de la peine capitale est devenu la marotte du président Erdogan qui ne semble pas craindre de brûler les ponts avec l'UE. «Que va-t-il advenir de mes 241 martyrs (les personnes tuées en résistant à la tentative de coup d'Etat) ? Ceux qui les ont tués ne devront-ils pas rendre des comptes ?», a-t-il interrogé alors qu'il présidait la dernière réunion du conseil des ministres.
Habile à raviver le thème de la forteresse assiégée, M. Erdogan est résolu à aller très loin dans la lutte contre les ennemis internes et externes. «Nous mènerons cette lutte avec courage et détermination. Nous allons gagner ou mourir, il n'y a plus de position intermédiaire», a-t-il lancé à ses partisans qui le suppliaient de restaurer la peine de mort, lors de l'inauguration d'un train à grande vitesse à Ankara le 29 octobre, jour des commémorations du 93e anniversaire de la République.
Ce jour-là, tout le monde a compris que rien ne serait plus comme avant. «On a enterré la République», a assuré Nuray Mert, l'éditorialiste de Hurriyet. Pour la première fois depuis 1923, les cérémonies ont commencé, au palais présidentiel de Bestepe à Ankara, par la lecture du Coran assortie de chants religieux. Casser l'héritage d'Atatürk – la laïcité, la toute-puissance de l'armée, l'orientation occidentale du pays –, tel est le dessein assumé du président Erdogan, qui se pose en défenseur de l'islam sunnite.
«Fermer la parenthèse du kémalisme»
Cette rupture n'est pas nouvelle. Depuis leur arrivée au pouvoir en 2002, les islamo-conservateurs de l'AKP n'ont qu'une idée en tête : «Fermer la parenthèse du kémalisme.» Pour eux, le projet modernisateur du «Père des Turcs» a manqué son but.
A leurs yeux, jamais la Turquie n'a été le partenaire naturel de l'Europe et des Etats-Unis. En voulant ancrer le pays à l'Ouest, Atatürk n'a fait que couper leurs concitoyens de leur héritage ottoman et de leurs racines islamiques. D'où le recentrage souhaité, devenu plus inéluctable encore après le 15 juillet.
La relation avec l'UE est au plus mal. «Sans visas pour les ressortissants turcs d'ici à la fin de 2016, plus d'accord migratoire», a fait savoir vendredi Mevlut Cavusoglu, le ministre turc des Affaires étrangères, tandis que M. Erdogan accusait l'Allemagne d'héberger des «terroristes».
Avec les Etats-Unis, le partenariat file un mauvais coton. Ankara supporte mal de voir son allié au sein de l'Alliance Atlantique (Otan) lui préférer les milices kurdes syriennes YPG, une émanation du PKK, avec lequel l'Etat turc est en guerre depuis plus de trente ans.
«La Turquie a toujours nourri un ressentiment contre l'Occident, “monstre édenté” comme le qualifie l'hymne national» Etienne Copeaux, spécialiste du monde turc
Le sentiment anti-occidental est encouragé. Fin août, alors qu'il inaugurait le troisième pont sur le Bosphore, M. Erdogan a souligné combien les Occidentaux étaient «jaloux» des succès remportés par son gouvernement. Ce discours séduit une large partie de l'opinion, convaincue que les alliés traditionnels, les Etats-Unis surtout, ont fait pire que manquer de solidarité, et auraient participé au putsch.
Généraux humiliés
La comparaison avec la guerre d'indépendance menée par Atatürk contre les puissances victorieuses avides de dépecer l'Empire ottoman est une autre constante du discours officiel. «La Turquie a toujours nourri un ressentiment contre l'Occident, “monstre édenté” comme le qualifie l'hymne national, accusé d'avoir détruit l'Empire ottoman en soutenant les mouvements nationalistes des populations minoritaires», explique Etienne Copeaux, historien et spécialiste du monde turc.
Autre vestige de la République, l'armée, en partie impliquée dans le coup d'Etat manqué, a vu son pouvoir réduit comme une peau de chagrin. En témoigne la scène inédite qui s'est déroulée au Mausolée d'Atatürk le 29 octobre.
Avant de pénétrer dans le lieu saint du kémalisme, les grands généraux, dont Hulusi Akar, le chef d'état-major, ont tous été palpés au corps par un subalterne. Pratiquée au nom de la sécurité, cette fouille a laissé le public turc pantois. «Quelle humiliation pour les généraux ! Et tout cela en direct devant tout le pays», souligne un homme qui a suivi les cérémonies à la télévision.
M. J.
In lemonde.fr


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.