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Quand l'innocence se nomme conscience
Travail des enfants en Algérie
Publié dans La Tribune le 14 - 06 - 2008


Photo : Zoheïr
Reportage réalisé par Ghada Hamrouche
Ils font presque partie du décor. Sur les plages, au bord de routes et des voies express, sur les longs chemins escarpés qui mènent aux villages, ou à l'entrée des marchés dans les grandes villes, ils tentent, tant bien que mal, de vendre leurs marchandises : des cigarettes au détail, des fruits dans de petits paniers en osier et des œufs bouillis. La vente à la sauvette de tout et de rien. Ils vendent, autour des marchés, pains, couscous et bricoles artisanales.
Asma, Ahmed, Youcef ont oublié la signification du mot vacances. L'ont-ils jamais su ? Rien n'est moins sûr. Ils ont troqué leurs rires d'enfants contre un sérieux qui ne les quitte plus. Ils ont acquis ce sérieux des gens responsables. Ceux qui ont la charge d'une famille. Alors que l'Algérie, à l'instar de nombreux pays, célébrait jeudi dernier la Journée internationale de la lutte contre le travail des enfants, Asma, elle, le visage hâlé un cran de plus par ce soleil du 12 juin, les cheveux au vent, a déjà pris place depuis des heures sur cette route nationale 11 qu'elle connaît si bien. Non loin de l'entrée de la coquette ville de Bousmaïl, elle met de l'ordre dans son couffin usé par la besogne quotidienne.
«A peine l'année scolaire terminée, je prépare déjà ma prochaine rentrée scolaire. Septembre n'est plus loin», dit-elle, le nez toujours plongé dans son couffin. «Du matlouaa ou de la kessra ?» interroge-t-elle avec ce pragmatisme distinctif des gens qui n'aiment pas perdre leur temps. Elle s'étonne même des questions de ces intrus d'un moment dans sa vie «d'enfant actif». Quoi de plus normal pour elle que d'aider son père dans les dépenses qu'impliquerait la rentrée scolaire ? «Vous savez, nous ne sommes pas riches. Ma grande sœur prépare ce pain et mon frère et moi nous le vendons. Tout le monde contribue à l'économie familiale», dit-elle du haut de ses dix ans. Ce jeudi, elle était seule sur la route. Son frère devait assister son père dans son travail aux champs. «Il y a beaucoup de tomates qui ont mûri ces jours-ci. Ils doivent les cueillir si on veut en tirer un bon prix», explique-t-elle les yeux rivés sur les clignotants des voitures qui défilent devant elle. De sa condition, Asma n'en retient qu'une chose : elle a de la chance d'être encore à l'école. Certains ne l'ont pas. Ses parents n'ont pas eu autant d'indulgence pour sa sœur aînée.
Si son frère a quitté volontairement l'école, sa frangine a été contrainte de le faire.
«Vous savez, l'Etat ne paie pas notre scolarité. Les 2 000 dinars ne suffisent pas et les parents voulaient qu'elle se consacre à la préparation du pain à longueur de journée pour que l'on puisse vivre convenablement.» Asma et ses frères et sœurs ne sont malheureusement plus une exception. Ces enfants qui viennent chaque année agrandir les rangs des travailleurs du système D sont de plus en plus nombreux.
500 000 enfants, affirme le ministre de la Solidarité nationale. 2 900 000, soutient de son côté l'Organisation internationale du travail. Qu'importe. Ils sont nombreux à intégrer les circuits du travail informel. Non loin de Bousmaïl, et sur la route nationale 42 menant à Koléa, un grand nombre de gamins, alignés, le dos courbé, ramassent les poivrons. «On nous paie 50 DA le casier», lance avec un large sourire Ahmed, sans suspendre sa laborieuse besogne. On a besoin de cet argent pour s'acheter des vêtements neufs. Son copain renchérit : «C'est plus facile de cacher la misère sous une veste ou un manteau. L'été, il faut bien s'habiller pour gagner l'estime des autres et imposer le respect.» Ahmed croit important de dire : «On aurait aimé être sur la plage maintenant mais… tout le monde n'a pas la chance d'avoir des parents qui gagnent bien leur vie.»
Les jeux aquatiques du lac artificiel de la nouvelle ville de Sidi Abdellah ou les toboggans des clubs branchés de Bordj El Kiffan, ils n'en rêvent même pas. Un plongeon près du majestueux Chenoua vaut mieux que tous les endroits branchés pour ces gosses. Certains de ces bambins qui assurent ces récoltes d'été sont toujours écoliers. D'autres ne se souviennent plus de leurs bancs d'école. Youcef fait partie de ces derniers. Il fêtera ses 15 ans dans un mois. Avec l'allure d'un chef accompli, le gamin continue sa tâche tout en jetant, d'un moment à l'autre, un regard furtif sur ses compagnons. «Je surveille s'ils trichent. On doit faire bien et vite pour gagner plus que les autres groupes. La concurrence est rude.» Regrette-t-il l'école ? Absolument pas, dit-il, lui qui doit légalement être encore à l'école jusqu'à ses 16 ans. «Que voulez-vous que je fasse avec cette instruction ?» lance-t-il ironique, avant d'assener comme un coup de massue : «Ceux qui ont des diplômes ne travaillent pas et ceux qui travaillent peinent pour joindre les deux bouts.» L'expérience de sa courte vie lui a appris qu'un salarié n'est jamais à labri de la misère.
L'œil toujours sur ses coéquipiers, il poursuit : «Nous avons de la chance de trouver ces petits boulots qui nous font bien gagner notre vie. Regardez plutôt ces familles qui se sont toutes converties à la mendicité.» Sans se désarçonner, il s'interrogera en arquant le sourcil : «Vous n'avez pas remarqué leur grand nombre ? Ils sont partout. Des enfants entre 8 et 12 ans, des vieux, des vieilles qui arpentent les rues à longueur de journée. Ils entrent dans les magasins, les restaurants, les agences de voyages, perturbent les occupants de ces lieux et personne n'ose les renvoyer ou leur dire d'aller faire la manche ailleurs.» Faire travailler ou mendier des enfants est l'alternative trouvée pour compléter des salaires qui ne subviennent plus aux besoins les plus rudimentaires.
En fait, comment peut-on s'en sortir lorsque le salaire d'un «smigard» est de 12 000 dinars ? Plus que jamais le travail des enfants semble être la solution adéquate pour de nombreuses familles.
Face à la cherté de la vie, à la précarité des emplois, certains Algériens n'hésitent plus à placer la responsabilité de leur foyer sur les frêles épaules de leur progéniture. Tous les plans semblent être bons pour se mettre à l'abri de la misère.
Ces enfants qui rêvent tous de lendemains meilleurs, ces enfants qui côtoient déjà le monde impitoyable des employeurs privés, ces enfants qui travaillent plus de 10 heures par jour sous un soleil de plomb ne comptent que sur leurs petites mains pour sortir de leur condition. Le véhicule qui nous ramène sur Alger croise le bus qui relie Alger à Bousmaïl. Le receveur était un gamin d'à peine 13 ans.


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