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Ô Pharaon, le livre-procès des patriotes et GLD
Dernier ouvrage de Kamel Daoud
Publié dans La Tribune le 04 - 04 - 2017

Voleurs, violeurs, rançonneurs, maffieux, criminels et assassins de masse, délinquants par filiation, bâtardes, homosexuels par vocation, par goût, et par perversion, l'image horrifique des patriotes et GLD dans le regard de Kamel Daoud
Récit-recyclage des clichés. Homosexuel, assassin, criminel de guerre, chef de groupes coupables de crimes de masse diurnes et nocturnes en cagoule ou à visage découvert devant les foules à tétaniser par la terreur ou dans les trous perdus de quelques fermes isolées, coupable de mutilations sur les cadavres abandonnés dans des oliveraies qu'on ne peut s'empêcher de situer à Sig ou coupable de jeter d'autres cadavres dans des charniers, exécuteur de basses œuvres en tous genres et seigneur de guerre à la tête d'un trésor amassé par la rançon de bijoutiers, commerçants ou paysans des alentours, maffieux qui imposent des taxes protectrices à qui peut encore payer, pourvoyeurs de filles pour les orgies du trio mythique de toute bonne dictature algérienne en tous points du territoire - le colonel, le commissaire de police, le wali - «tacticien» hors-pair qui envoie cadeaux, vierges rafistolées, argent, convois de moutons aux ministres mais aussi aux détenteurs cachés du pouvoir pour les acheter etc. Pharaon est le représentant type des hommes qui, pour une raison ou une autre, ont pris les armes contre les terroristes.
Homosexuel, mais pas vraiment, car Pharaon aime uniquement se faire monter. Car, dans cette ville où, selon Kamel Daoud, se déroule en secret la chasse des notables à des garçons plus beaux que les filles, Pharaon a fait la chasse à un vague quidam, vaguement son parent par lien tribal, aux attributs sexuels hors-normes qu'il découvre dans un hammam. Il engage le quidam comme garde communal pour l'affecter ensuite officiellement à la garde de son bureau mais réellement à sa monte quotidienne aux heures médianes que vous devinez.
Il faut être un Algérien et se le dire en arabe dans la tête pour mesurer qu'il mobilise pour le procès qu'il intente aux patriotes à l'image qu'ont de l'homosexualité la canaille des bas-fonds et le Lumpen.
L'habillage des idées communes
Et ce n'est pas la seule trivialité habillée en effets de manches littéraires. Car, voyez-vous, Kamel Daoud nous invite à comprendre le succès criminel de Pharaon dans des raisons plus profondes que sa seule fourberie. C'est que le garde communal a recherché la proximité de pharaon pour accomplir un «côté sombre» de sa personnalité. Et cette ville nommée M'dina ne se laisse dominer, violenter, racketter que pour des raisons historiques remontant au déracinement des paysans par la colonisation et jetés sans ressources, dans les bidonvilles autour des «métropoles agricoles coloniales», condamnés à vivre de la prostitution de leurs femmes et de leurs filles. M'dina serait entièrement un de ces «Village Left» ou village de la honte de Sidi Bel-Abbès.
Bref, l'indignité des gens de M'dina leur serait inscrite dans leurs origines sans paternité certaine de bâtards. Vite fait l'explication sociologique est happée par la perception canaille et lumpen qui structurent ce texte. L'appel à la notion des rivalités tribales et leurs accusations réciproques de collaboration avec la colonisation pouvait sembler achever une sorte d'analyse «sociologique» de l'indignité.
L'envol scientifique se transformera très vite en exposé de l'essence bâtarde la population de cette ville, tous fils de p… et tous complices. Derrière les formules ampoulées de Daoud pointait juste le langage des castes féodales à l'endroit des classes forcées à la servilité.
Les représentations de la canaille Lumpen et celles des castes féodales sont les deux faces de la même réalité sociale.
Le paradoxe reste qu'au bout du compte, la violence coloniale sorte exempte de cette condition d'indignité car elle était celle des classes serviles, des khammès et des bergers de toute éternité. Le besoin incoercible de refouler la lecture des «villages nègres» par Fanon indique à quel point Kamel Daoud porte le complexe du colonisé et l'urgence quotidienne de s'extraire de sa peau indigène.
Quelle formidable plasticité que celle des idéologies capables de jouer des rôles absolument contraires selon les circonstances et les besoins.
Une incohérence qui sert de maquillage
C'est que tout cela est pénible à suivre. D'un chapitre à un autre, tous très courts, voire trop courts, Daoud passe des approximatives narrations de quelques faits imprécis à de «savantes» digressions sur de vagues et supposées analyses historiques et politiques, toutes communes à l'opinion publique, celles des cafés maures ou celles des hôtels cinq étoiles. Il n'est pas dans ce texte une idée, une proposition, une image qui ne soit déjà celles d'un accord et d'un consensus social. L'explication de nos déconvenues par la corruption, le népotisme, les réseaux délinquants qu'on imagine aux salons de coiffures ou aux élus locaux, sont dans toutes les bouches.
Le ramassis de lieux communs sert à passer un autre message. Ici, il est transparent. La responsabilité écrasante de la violence des années de terrorisme est imputable aux seules structures du pouvoir appuyées sur des groupes de criminels et de délinquants. Il n'y a plus de détails ni d'histoire concrète. Inutile de chercher des chemins particuliers à la formation des groupes de patriotes à Igoudjal, dans la Mitidja, dans la région de Ténès, ou ailleurs.
On est sidéré par ce réquisitoire unilatéral, confus, désordonné, multicouches, jusqu'aux pages 120 et suivantes qui nous donnent la clé de ce roman-récit. Alors que Pharaon règne sans partage et dans l'impunité totale, des chercheurs d'os tentent de recenser les crimes et les charniers et finissent dans face à un procès. La référence à un pont rassis sur un oued desséché où se trouve un charnier qu'il me semble bien que le récit «qui part de faits imaginaires» est construit sur une confrontation qui eut lieu entre Hadj Ferguène, maire RND de Relizane, et Hadj Smaïn, militant de la LADDH en 2002.
Toutes les boursouflures du texte, les effets de manches, les pseudo-figures de style servent dans ce livre à faire passer sans risques et dans l'excès de fards et de maquillages une histoire réelle. Nous ne sommes ni dans la contrebande comme procédé littéraire ni dans le mentir-vrai, mais dans l'emballage faussaire.
Du procès des patriotes à la défense du «qui tue qui»
Ô Pharaon instruit donc le procès en règle des patriotes. Publié en 2005 par Dar El Gharb, il tombe en plein débat de cette année marquée par le passage de la Loi de grâce amnistiante à la Charte de Réconciliation nationale. Il est difficile pour la maison d'édition comme pour l'auteur de nier la volonté de prendre parti et de peser sur le débat.
Procès que l'auteur refuse d'assumer. Dans un avertissement alambiqué, il prévient tout lecteur d'une compréhension de son texte autre que ce qu'il autorise et brandit d'avance sur la tête de tout récalcitrant l'accusation de récupération politicienne.
C'est pourtant un livre totalement voué à une perception lourdement politicienne de la décennie de terreur que nous avons connue.
«La meilleure formule était celle de la vérité : ce récit est le récit de faits réels, inspirés de faits imaginaires… Ce récit n'a pas la prétention de viser une vérité mais seulement une émotion… Ce récit est seulement celui d'une intuition émue.»
Il multiplie, pourtant, les efforts, les allusions, les indices qui nous guident vers le nom réel du cadre de l'action, la ville de Relizane et une ville plus petite mais proche voisine. Au cas où cela pouvait échapper au lecteur, Kamel Daoud parle abondamment des mouches. Image qu'un lecteur étranger pourrait prendre pour la description d'un paysage cauchemardesque d'un désert de western-spaghetti. L'indigène habitué à la lecture savante n'aura aucun mal à discerner dans cette récurrente invasion des mouches une référence opportuniste au nom de Relizane ou «hauteur des mouches» en berbère.
Plus on avance dans la lecture de ce livre plus on est perplexe sur la multiplication des indices qui mènent de Pharaon, le personnage principal du «récit», à Hadj Ferguène. Plus personne, depuis 2002 et le tollé médiatique soulevé en France autour du procès de Hadj Mohamed Smaïn, militant de la LADDH pour diffamation, n'ignore que Hadj Ferguène est présenté comme le maire aux pouvoirs pharaoniques de la ville de Relizane.
Ce livre est un univers totalement faussaire, dans lequel toutes les affirmations finissent par apparaître obliques et aucune affirmation réellement sincère.
Le récit qui, par miracle, ne devait, contrairement à sa définition, désigner nul lieu précis et seulement des faits imaginaires, ô splendide oxymore, va devenir, sous nos yeux, une construction lourdement allusive.
Kamel Daoud désigne le personnage qui est au centre de son texte sous le nom principal de Pharaon et secondaire de Maître de la ville. La connotation et le parti-pris sont limpides. C'est un emprunt au langage des islamistes qui désignent leurs ennemis de Taghout(s). Ce n'est pas fini. Les acteurs anti-terroristes sont des milices, des groupes, des bandes. Kamel Daoud qualifie, un nombre incalculable de fois, leurs actes de terrorisme, de banditisme, de rançons, d'extorsion. Il ne désigne que deux ou trois fois les terroristes sous ce nom. Il prend un soin particulier à les qualifier de maquisards malgré le contenu positif que les gens donnent à cette dénomination pour ce qu'elle renvoie à un mode de lutte du faible contre le fort. Et pour bien ancrer cette image de maquisards, page 17, Kamel Daoud impute aux forces anti-terroristes les pratiques de l'armée française : «On était au beau milieu des années 90 et les mutilations patientes des cadavres, les morts que l'on promenait comme des sangliers abattus sur les jeeps des forces anti-terroristes, après les ratissages dans les maquis environnants et les soins apportés aux signes de terreur des deux bords...». Ce sera la seule fois où il renverra dos-à-dos «maquisards» et forces antiterroristes. Le reste sera consacré aux crimes des milices. Pas un détail ne manque à la panoplie : exécution sommaires, nocturnes ou diurnes, publiques ou secrètes, des parents des «maquisards», cadavres abandonnés dans les oliveraies (donc dans la région de Sig).
Ô Pharaon est présenté comme un récit. Même dans les définitions et acceptions les plus larges, un récit rapporte des faits, des événements. Mais en général un récit raconte des aventures, ou des mésaventures ; le récit est le genre obligé du voyageur. Contrairement à ce qu'avance l'avertissement de l'auteur, la qualification de récit nous oriente bien vers l'idée qu'il s'agit d'événements-aventures réels.
Et dès les premières lignes, nous avons les signes multiples d'une référence à la ville de Relizane désignée M'dina et à son maire El Hadj Ferguène, à un de ses parents El Hadj El-Abed, et très évasivement à Hadj Smaïn, militant de la ligue des droits de l'Homme sous le personnage et le pseudo du découvreur d'os dans le roman.
Ce sont donc ces pages 120 et suivantes qui nous donnent la clé. La structure réelle du livre et sa trame sont la représentation donnée par José Garçon en 2002 dans Libération.
Tout le reste n'est qu'habillage faussaire pour une autre défense du terrorisme que nous avons subi, une autre présentation de la thèse du «qui tue qui».
M. B.


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