Synthèses de Ghada Hamrouche La situation en Côte d'ivoire reste très instable et l'insécurité la plus totale règne dans les rues d'Abidjan. Des tirs à l'arme lourde ont repris, hier, près du palais présidentiel dans Abidjan, après l'appel lancé par les avocats d'Alassane Ouattara, le président reconnu par la communauté internationale, demandant à l'ONU et à Paris de «neutraliser» les forces de Laurent Gbagbo. Les tirs, dont on ignorait dans l'immédiat l'origine, ont été entendus jusque dans le quartier de Cocody, dans le nord de la ville où se trouve la résidence où est retranché Laurent Gbagbo et où aucun combat n'a été signalé hier. Le Plateau et Cocody sont largement contrôlés par les forces fidèles à Laurent Gbagbo, qui s'y battent avec acharnement contre celles d'Alassane Ouattara. Samedi dernier, le Golf Hotel, proche de Cocody où M. Ouattara et son gouvernement sont reclus depuis le début de la crise post-électorale il y a plus de quatre mois, a été la cible de tirs, notamment de mortier. Des civils fuyaient hier la zone, où le calme était revenu selon des témoignages. Le porte-parole de M. Gbagbo, Ahoua Don Mello, avait vivement démenti toute responsabilité dans cette «attaque imaginaire», tout en ajoutant que «le président Gbagbo appelle à la résistance contre les bombardements et les agissements de l'armée française en Côte d'Ivoire car, en définitive, c'est l'armée française qui nous attaque». Les avocats français de M. Ouattara, Jean-Paul Benoît et Jean-Pierre Mignard, ont publié hier à Paris un texte exhortant l'ONU et la France à «éliminer sans délai les armes lourdes, neutraliser les miliciens à la solde de Gbagbo qui constituent une force d'occupation illégale, et remettre à la justice le candidat battu». Le texte, transmis à la Présidence française et à l'ONU, a été écrit à leur initiative, mais «avec l'accord de M. Ouattara» auquel il a été soumis. Pour les avocats, une telle intervention «est l'esprit et la lettre de la résolution 1975 du Conseil de sécurité» du 25 mars, qui appelle notamment à utiliser «toutes les mesures nécessaires» pour protéger les civils et empêcher l'utilisation d'armes lourdes contre les populations civiles. La France, dont la force militaire Licorne tient l'aéroport d'Abidjan, dans le sud de la ville, et l'ONU ont toujours assuré qu'elles n'avaient pas pour mission de renverser M. Ggbabo. L'Onuci avait averti vendredi dernier que les forces loyales au Président sortant, qui refuse de reconnaître les résultats certifiés par l'ONU donnant son rival vainqueur de la présidentielle, avaient profité d'une accalmie pour «renforcer leurs positions». Le département d'Etat américain a également jugé samedi que «les tentatives de négociation cette semaine de Laurent Gbagbo n'étaient rien d'autre qu'une ruse pour se regrouper et se réarmer». Celles d'Alassane Ouattarra, quant à elles, essaient de sécuriser le reste de la capitale économique, dont la population au début des combats, le 31 mars, était évaluée à quatre millions d'habitants et qui est au bord d'une catastrophe humanitaire. L'eau et l'électricité sont coupées dans certains quartiers, les vivres manquent, les hôpitaux sont débordés et des cadavres sont abandonnés dans les rues, alors que des quartiers entiers sont plongés dans l'anarchie et livrés aux pillages. La force française Licorne, dont les effectifs ont été portés à environ 1 650 hommes, poursuit avec difficulté sa mission de sécurisation et regroupement des étrangers. Elle ne peut accéder à certains quartiers et est régulièrement la cible de tirs de combattants du camp Gbagbo. L'organisation de défense des droits de l'Homme Human Rights Watch a accusé samedi dernier les forces des deux camps d'avoir commis des massacres dans l'Ouest ivoirien, zone connue pour être régulièrement le théâtre de violences ethniques, affirmant détenir de nouvelles preuves de ces atrocités déjà dénoncées par l'ONU et des ONG.