Chebel : «Ce match était ma meilleure apparition avec l'équipe nationale» 10.10.1981 Stade Surulere (Lagos) Eliminatoires Coupe du monde Arbitre: Agnolin (Italie) Buts: Belloumi (34'), Zidane Djamel (44') (Algérie) Nigeria : Best, Opkala, Bamidele, Chekwe (Kesh), Isine, Banjo, Muda, Andraw, Odegbani, Usugnan, Owolabi, (NWokocho). Entraîneur : Otto Gloria. Algérie : Cerbah, Larbès, Korichi, Guendouz, Mansouri Fawzi, Kaci Saïd Mohamed, Chebel (Assad), Fergani, Zidane Djamel, Belloumi, Gamouh (Kouici). Entraîneur: Rogov-Saâdane-Maouche. ------------------ Chebel : «Ce match était ma meilleure apparition avec l'équipe nationale» Le match se jouait pratiquement une année après la défaite en finale de la Coupe d'Afrique des Nations contre le Nigeria. L'Algérie avec ses locaux s'était inclinée 0-3. Le 10 octobre l'EN, avec les pros, prenait sa revanche. * Au cours de ce match, vous étiez l'auteur d'une passe décisive, n'est-ce pas ? C'est exact, j'avais donné une passe décisive à Djamel Zidane. Je suis parti de la droite et remis un retrait, Zidane avait anticipé sur l'action et coupé la trajectoire du ballon pour le mettre au fond du filet. Ce dont je me souviens bien, c'est que j'ai fait mon meilleur match sous les couleurs de l'équipe nationale. * C'était aussi votre première prestation avec les Verts… On m'avait fait appel, j'ai répondu à l'appel du cœur. Je n'avais jamais mis les pieds à Lagos, avant cette rencontre, qui était la première manche d'une confrontation en aller et retour. Les deux manches devaient sceller le sort du seul qualifié en Coupe du monde 82. Ce n'était si facile que cela. * En comparaison du nouveau système de compétition, vous voulez dire ? Absolument, en 1981, la qualification se jouait en deux manches. Un faux pas risquait de mettre en péril la qualification, mais aujourd'hui, le système des poules permet à chaque équipe de se rattraper en cas d'échec. Le système actuel est avantageux. * Comment expliquez-vous ce résultat, alors que sur le même terrain et une année avant l'Algérie perdait la finale de la Coupe des Nations qu'avait abritée le Nigeria ? Je crois que l'Algérie avait bénéficié de l'apport des professionnels évoluant en Europe et essentiellement en France. Ils ont apporté leur expérience et leur savoir- faire. Jusque-là, l'Algérie faisait appel essentiellement à Korichi. * Voulez-vous revenir sur les conditions dans lesquelles s'était joué le match ? Elles étaient tout simplement catastrophiques. C'était l'insécurité totale dans Logos. * Etait-il possible de circuler dans la ville ? Je me souviens d'un trajet du lieu d'hébergement au stade. On pouvait observer à travers les vitres du bus les cadavres jonchés les rues de la ville de Lagos. Il y régnait un climat de terreur. Je me suis juré à cette époque de ne plus remettre les pieds dans cette ville. Je me souviens même que la veille du match, on avait quitté les lieux de notre hébergement pour passer la nuit à l'ambassade, pour plus de sécurité. * Y avez-vous retourné depuis ce jour-là ? Jamais. Pourtant, je me suis souvent déplacé en Afrique, mais au Nigeria jamais, depuis ce fameux match. * Il s'est passé des choses extraordinaires sûrement à votre arrivée au stade Surelere ou même dans les vestiaires… Bien avant notre arrivée au stade, on repassait à la télévision locale des images qui représentaient les joueurs algériens en poussins et les greens aigle's, c'était comme cela qu'ils se faisaient appeler, en super aigles qui venaient dévorer les poussins. C'était amusant à voir. * Vous aviez certainement dû rencontrer les fameux gris-gris locaux… Et comment ! A chaque endroit, on rencontrait les fameux gris-gris africains. De toutes sortes, des têtes d'oiseau accrochées sur les porte-manteaux, des bouteilles d'eau jetées dans le vestiaire, des rats morts, devant la porte, à l'entrée du vestiaire… * Cela ne vous a-t-il pas angoissé ? Je crois, qu'entre nous les pros, on en a beaucoup ri. On a trouvé cela amusant. On n'est pas superstitieux. Ce genre de pratiques n'existe pas dans les stades d'Europe. Par contre, les locaux étaient quelque peu inquiets. * Le gri-gri existe partout en Afrique, même en Algérie… Passés ces instants, on est rentrés sur le terrain et on avait fait ce à quoi tout le peuple algérien attendait de nous. * Vous n'êtes pas allé au terme de la rencontre. Assad vous a remplacé. Voulez-vous revenir sur les circonstances de votre sortie ? Ah bon ! Je ne me souviens plus, cela devait être à cause de la fatigue. * Que s'est-il passé à la fin du match ? Si mes souvenirs sont bons, on avait parlé de onze morts parmi les Nigérians. Cela ne s'est pas terminé dans le calme. Il y a eu des accrochages et des émeutes après le match. * Ce que vous réalisiez était héroïque… Cela a eu un gros impact chez les Algériens, j'ai reçu plusieurs messages de félicitations et plusieurs ministres m'avaient invité à visiter le pays. Ce qui arrive aujourd'hui, c'est fabuleux pour l'équipe nationale, c'est de connaître la même épopée que son aînée. * Aviez-vous répondu à ces invitations ? J'ai dû répondre à une ou deux invitations. * On sent que vous voyez déjà l'équipe nationale en Afrique du Sud… On n'y est pas encore, mais force est de reconnaître que ce que font Raouraoua et le staff technique est très fort. On sent que le nouveau président de la Fédération veut emmener l'équipe nationale très loin. On y croit, notre sélection peut se qualifier, mais il ne faut pas refaire les erreurs du passé. Après les Coupes du monde de 82 et de 86, il n'y a eu plus rien. On doit revoir la politique de la formation et penser à restructurer le football algérien. * Merci, pour votre collaboration… De rien. Savez-vous que je suis tout le temps ce qui se passe dans le pays grâce à votre journal ? Quand est-ce que va paraître cet entretien ? Ce mercredi, inch'Allah. Entretien réalisé par Mouloud B. Cela s'est passé ce jour-là * 44°, température caniculaire dans la capitale Durant la première semaine du mois d'octobre de l'année 1981, le centre et l'est du pays ont connu des températures caniculaires. Elles avaient atteint parfois les 44°. Une centaine de feux de forêt s'était déclenchée durant cette période et le vent très fort ne faisait qu'aggraver la situation. Le plan Orsec avait été déclanché à Béjaïa, lit-on dans la presse de l'époque * Sadate assassiné Le président Sadate était assassiné par un militaire de l'Armée égyptienne. El Moudjahid, l'organe du parti unique de l'époque, avait étalé sur deux pages la situation en Egypte. L'Algérie était dans le camp du Front de la résistance contre les négociations avec Israël. * Chadli en visite à Annaba La semaine qui précédait le match face au Nigeria, la presse relatait le voyage du Président déchu en janvier 19992. Chadli programmait une visite de travail à Annaba.