A peine une décade après sa création en 2001 par l'association "El-Ikhtilaf", le prix littéraire Malek Haddad, disparait de l'arène éditoriale. Rares, pourtant sont les trophées qui émaillent les rendez-vous littéraires, un domaine complexe car aujourd'hui, tout le monde ou presque peut-être édité. Mais comment distinguer le bon grain de l'ivraie si des hommes de lettres sincères ne fourrent pas leur nez dans les textes qui se créent pour encourager et établir une opinion autour d'un manuscrit qui soit avant tout humain. Puisque les relais en matière de critiques sont indigents, il est nécessaire que des professionnels s'impliquent dans ce domaine créatif, devenu un fourre- tout. Un prix, c'est clair, ne veut souvent rien dire si les orientations des jurys son intéressés. Mais s'il se trouve que l'acte de juger un texte s'imprègne de valeurs littéraires et esthétiques de l'œuvre, le trophée peut recouvrer tout son sens. Le prix Malek Haddad est décerné tous les deux ans à un livre qui sort du lot d'une production limitée, mais tout de même existante. C'est à peu près 10.000 DA, et c'est la Télévision algérienne et l'Office des droits d'auteur, (ONDA) qui financent ça. Le livre, s'il est bien médiatisé, peut alors bien se vendre et faire connaitre son auteur. C'est important pour un écrivain, d'être lu et de se faire connaitre, car personne, quelque soit sa modestie ne peut écrire pour lui-même. Marraine de la campagne de dons de livres pour les régions du Sud, lancée le 16 avril, Ahlem Mostaghanemi qui fut l'initiatrice du trophée Malek Haddad, s'est indignée de l'annulation du symbolique prix. Elle va même plus loin en qualifiant cette annulation de "crime contre les hommes et les femmes de lettres.". L'auteure de " Dhakirat El Djassad " (la mémoire du corps), lance un appel à “l'Etat algérien pour parrainer officiellement cette distinction à travers la création d'une fondation éponyme" a-t-elle déclaré. Affirmant l'engagement de plusieurs institutions et organisations de la société civile pour financer ce prix qui se veut, en premier lieu, une manière d'encourager les écrivains en herbe, Ahlem Mostaghanemi, a déploré le peu d'intérêt accordé à sa relance. Selon elle, cette distinction, devrait avoir une place accomplie et méritée parmi les autres prix dédiés à la littérature. Une carte pour instaurer le trophée L'an dernier, un colloque Malek Haddad a été organisé durant trois jours dans la ville des Ponts, contrée natale du défunt, à l'issue duquel un jury composé de quatre membres tous des universitaires a été désigné. Ce jury a eu la charge d'établir une proposition de charte portant plusieurs recommandations concernant ce colloque. Il s'agit en premier lieu d'institutionnaliser le colloque au nom de Malek Haddad, avec son organisation officielle une fois l'an et son élargissement à un statut maghrébin, éditer les travaux du colloque, constituer un jury pour avaliser l'aspect scientifique du séminaire, rééditer et traduire les œuvres de l'écrivain, réaliser un documentaire sur sa vie, créer un site web du colloque, instaurer un prix Malek Haddad, rendre hommage à une personnalité littéraire de mérite, et éventuellement, transformer la maison de l'écrivain en musée, ou lui consacrer une aile du Palais de la culture du même nom qui rassemblerait ses objets personnels et toute son œuvre. De plus, l'idée de la fondation d'une rencontre nationale annuelle portant sur le genre littéraire, nouvelle, ou short story qui porterait le nom d'un pionnier en la matière, Ahmed Rédha Houhou, est déjà dans l'air. Une façon bien sûr de faire connaître davantage Malek Haddad disparu il y a 33 ans. Trépassé des suites d'une foudroyante maladie, le 02 juin 1978, l'auteur du " Le Quai aux fleurs ne répond plus" a eu l'an dernier ses posthumes hommages. Ecrivain encore peu connu, quoique ses ouvrages soient enseignés dans les universités algériennes mais non pas dans les collèges et les lycées, on se rappelle qu'il y a trois ans et à l'occasion du 30ème anniversaire de son décès, la boite d'édition Média Plus, avait entrepris une action des plus honorables : rééditer trois des ouvrages du défunt à savoir " L'élève et la leçon ", " Je t'offrirai une gazelle ", " Le Quai aux fleurs ne répond plus ". Le contexte dans lequel avait vécu cet écrivain qui a passé la majeure partie de sa vie en France, est celui de la guerre, un moment charnière qui a vu l'émergence de nombreux intellectuels de gauche, comme Boris Vian, Claude Lanzmann, Albert Camus, Sartre, …..Une profusion littéraire donc à cette époque où l'acte d'écriture lui-même était en soi un acte d'engagement. Malek Haddad se trouvait en France autour des années 50, son pays l'Algérie était en guerre, il rencontre un poète et écrivain de gauche, Louis Aragon. Cette rencontre sera décisive pour sa carrière littéraire, ou mieux encore, ses écrits sont principalement des actes qui vont dans le sens de la libération des opprimés et de la dénonciation des politiques coloniales en vogue dans les pays d'Afrique. Ses romans traduisent à la fois et le contexte colonial de l'époque, et l'exil intérieur des hommes qui comme Malek Haddad "parlent et écrivent dans la langue de l'ennemi ".