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Un acteur rieur et conteur
PORTRAIT : Abdelaziz Degga, comédien
Publié dans Le Midi Libre le 08 - 03 - 2010

Degga s'est reconverti en écrivain pour les enfants. Il a écrit à leur intention des livres joliment illustrés qu'il veut faire paraître prochainement en deux versions. L'une en bandes dessinées et l'autre en photos. L'homme, en réalité, croit s'adresser aux adultes par leur biais.
Degga s'est reconverti en écrivain pour les enfants. Il a écrit à leur intention des livres joliment illustrés qu'il veut faire paraître prochainement en deux versions. L'une en bandes dessinées et l'autre en photos. L'homme, en réalité, croit s'adresser aux adultes par leur biais.
A 65 ans, Abdelaziz Degga a toujours la mine joviale et le rire facile. Friand de contes et d'anecdotes, il a collectionné, sa vie durant, des milliers d'histoires qu'il a consignées dans des fiches qu'il garde à la maison. Son truc consiste à enregistrer de brefs échanges de paroles qu'il a eues avec des personnages célèbres. Les faits réels ainsi recueillis sont saupoudrés de notes imaginaires avant d'être proposés à la lecture sous forme de nouvelles. Il suffit de prononcer un nom et notre bonhomme vous sort aussitôt la fiche portant l'anecdote qui le concerne. Sur Dahmane el Harrachi, il vous racontera l'histoire du pavé ramené de France sur la demande de son ami Kadouris ancien employé à la voirie. Degga a mis pourtant longtemps en sourdine ses penchants pour le conte. L'artiste plasticien Abderrahamne Ouattou, qui projette d'illustrer ses livres, préfère lui plutôt parler de nouvelles que de contes.
Théâtre
Ce fils de Climat-de-France, à Alger, a débuté sa carrière d'artiste en faisant du théâtre. En 1967, il intègre la section des arts dramatiques du Conservatoire d'Alger. Il joue alors en dialectal et en français et ce, aux côtés de Azzedine Medjoubi, Madjid Bey, Abdelah Bouzida, Norredine Lameche, Samir Bencherifa et Rabah Allam dans la pièce L'Exception et la règle de Bertold Brecht. Jusqu'en 1972, il enchaîne les pièces classiques à tonalité dramatique. Après les Perses d'Eschyle (1967) il campe un rôle dans la représentation en dialectal d'Echaab …Echaab (Le Peuple). En 1969 on le retrouve dans La Poudre d'intelligence de Kateb Yacine. Ensuite en 1972 dans la troupe théâtrale du même Kateb qui va faire une tournée de plusieurs mois en France pour y jouer  Mohamed prend ta valise. "J'ai pu me tailler un petit personnage dans la pièce de Brecht, j'ai joué le porteur, donc à partir de là j'ai commencé. Après il y a eu Kateb Yacine, c'était quelque chose de nouveau, que ce soit au niveau de la forme ou au niveau de l'écriture, le groupe vivait ensemble, et l'auteur vivait avec nous". Dans son C.-V, l'épisode de Sonatour (Centre touristique de Moretti) où il va faire de l'animation sonne comme une phase de transition entre le théâtre et les arts audiovisuels. Avant donc d'apparaître sur les écrans du cinéma et de télévision, Degga s'essaye à Sidi Fredj dans la Voûte de Djamel Allam au one man show en montant des spectacles de bruitage, basés sur la narration d'histoires suggérées par l'imitation de bruits. Degga excelle dans l'interprétation des voix des films westerns. "Chaque spectateur construit lui-même les personnages à partir d'un bruit, il va construire son espace, bref il participe à la création de l'image".
Cinéma
Degga a joué dans une dizaine de films de cinéma et dans sept téléfilms, ce qui est appréciable pour un acteur qui, plus est, évolue en Algérie. "J'ai toujours campé des rôles qui dégagent de la gaieté, je n'aime pas me mettre dans la peau de personnages qui pleurnichent, j'interprète des rôles humoristiques, décontractés, pas sérieux, mais qui n'appartiennent pas au type mondain". Dans Omar Gatlato de Merzak Allouache, il a interprété le rôle de Moh S'mina, "un personnage qui détend un peu l'ambiance". Une exception qui confirme la règle, Degga avoue qu'il a aimé Al Intihar (Le Suicide) de Mustapha Badie où il campe le rôle tragique d'un simplet. Ses yeux enjoués s'animent à l'évocation de ce personnage. "Zohra, issue d'une famille bourgeoise, se marie avec moi. Le couple aura un gosse et le simplet finira par se suicider. Lors de la nuit de noces, il ne comprenait pas ce qui lui arrivait, il voyait autour de lui beaucoup de monde, il parait que c'est un personnage qui a réellement existé à La Casbah d'Alger, c'était quelqu'un qui n'arrêtait pas de prédire sa propre mort". Badie a pris quand même la liberté de filmer une séquence qui ne figurait pas dans le texte de Mohamed Dib d'où a été tiré le scénario du film. "C'est d'ailleurs le film qui m'a plu le plus, aujourd'hui, il n'y a pas de réalisateur de la trempe de Badie, je pense qu'il est unique, c'est une école. Quand il regarde les acteurs, il leur donne ce qu'il faut, c'est lui qui a découvert les grands personnages tels Beyouna, Ouardia, etc. Il a déniché des talents qui n'auraient jamais pu jouer au cinéma. Dans "L'Incendie", on reste admiratif devant le jeu des actrices, on se demande comment il a pu restituer les différentes postures de femmes de Dar Sbitar. Quand il travaille Badie n'a pas de scénariste, il n'a rien, il a tout dans la tête. Il développe tout de suite. Il visionne les séquences et puis il les refait quand ça ne lui plait pas et puis il a son montage. Sur le plan humain, il est très attentif dans ses relations avec les gens. Quand il m'a vu il m'a confié le rôle du simplet en me disant "tu vas jouer le mari de Zohra, tu es un gars sympa", je m'y suis plié car j'ai trouvé que ça sortait de l'ordinaire". Concernant Allouache, Degga le classe dans une autre catégorie. "Allouache, c'est autre chose, je pense que son génie a été d'écrire un scénario où il n'y a presque rien, il savait que les acteurs pouvaient construire des relations entre eux, en intégrant notamment la chanson et tout le reste, avec de petits flashs, ça c'est une autre méthode. "Omar Gatlato" est le fruit d'un scénario où l'on ne pouvait pas concevoir que le réalisateur dicte à l'acteur de poser par exemple un verre sur la table, on aurait tout compliquer, mais il a donné la liberté aux comédiens d'évoluer, de créer spontanément des dialogues qu'on entend tous les jours dans la rue, c'est-à-dire non classiques" et d'ajouter "il avait une capacité d'écoute, son mérite à lui, c'est qu'il ne fixait pas tout, il laissait les acteurs respirer un peu, sachant qu'ils peuvent comprendre certaines choses mieux que lui».
Pour Degga s'il y a eu des films algériens intéressants, beaucoup ont fait dans le stéréotype, "il y a des scénarios où tu entres et tu t'éclates, il y en a d'autres où tu restes figé. C'est toujours la même rengaine, les mêmes personnages, les mêmes thèmes, la police, "sbitar", la porte s'ouvre, "djouz, rani qima teyebt lqahoua" viens, le café est prêt) le téléphone sonne, allô, "allo, arah djay, ouch rak dir" (Il va venir, qu'est-ce que tu fais) "mazal bach nzeoudjou" (il va falloir attendre pour qu'on puisse se marier), et puis ça se focalise sur la famille qui commence à se désintégrer, le vieux est malade, il va mourir, et puis c'est l'héritage, mais on ne veut pas partager, bref, on joue des thèmes qu'on voit au tribunal».
Les circonstances dans lesquelles se déroule le tournage peuvent provoquer une désaffection par rapport au film, explique Degga. "Dans "Les Déracinés" de Lamine Merbah, j'ai eu un passage que je n'ai pas aimé; je devais jouer l'usurier, un épicier qui ne prend pas d'argent, mais de l'or ou du métal argent".  "L'atmosphère était viciée dès le départ car après une bagarre entre le directeur de la photo et la maquilleuse, la tension était montée d'un cran. J'ai joué juste une demi-journée ou une journée, mais je n'ai pas aimé. En arrivant à Miliana, je me suis retrouvé face à une grève. A l'hôtel de Hamamm Righa, j'ai trouvé Lamine Merbah, malade, alité et Hadj Rahim qui lui tendait une tisane; je me suis dit, alors, que suis-je venu faire ici". Et de poursuivre "Dans "Le Troisième acte" de Rachid Benbrahim, j'ai joué le rôle d'un patron de resto, je n'ai pas aimé cette histoire où il y avait la scène d'une bagarre entre un écrivain et un peintre, je devais tourner ma scène à Khemis el-Khechna,en nocturne. Mais Benbrahim avait oublié le coassement des grenouilles dans le barrage, car la scène se jouait à ce niveau-là. C'était beau, on aurait dit l'arrière d'un bateau. Mais on n'entendait que les grenouilles. La bande son était donc foutue. Benbrahim n'a pas su gérer la situation, il parlait de doubler le son et ne se souciait que des grands comédiens à l'image d'Agoumi». Degga confesse qu'il ne s'est pas senti également à l'aise dans  Morituri  de Touita Okacha, "j'ai joué le rôle d'un journaliste qu'on allait assassiner". Pendant le tournage les acteurs, qui venaient d'être dotés par la police d'armes à feu pour les besoins du film, se sont affublés de bottes et de pistolets et ont commencé à poser pour des photos, ça a fait sortir de ses gonds le réalisateur. "Je n'étais pas à l'aise, je ne bougeais pas, les rôles lugubres, assassiner quelqu'un ou être assassiné ne me conviennent pas". "Ils savent que je n'aime pas ces rôles-là". Pour Degga "le cinéma aujourd'hui est devenu n'importe quoi, à l'époque les gens appréhendaient de jouer dans un film. Tout le monde peut faire maintenant du cinéma, pourquoi ? Si tu réalises un navet personne ne te fera de critique, tu prends l'argent et tu t'en vas, l'autre vient c'est la même chose. C'est permis, ils font des navets, et puis ils les refont avec un scénario encore plus mauvais, et ils ne se gênent pas pour s'autoproclamer réalisateurs, tout en participant à des débats comme s'ils avaient réalisé "Apocalypse now" Bouberras était quelqu'un de très intéressant, il a fait des films, mais maintenant il est au Canada".
Retour aux enfants
Degga s'est reconverti en écrivain pour les enfants. Il a écrit à leur intention des livres joliment illustrés qu'il veut faire paraître prochainement en deux versions. L'une en bandes dessinées et l'autre en photos. L'homme en réalité croit s'adresser aux adultes par leur biais. «Quand j'ai eu moi-même des enfants, je me suis dit maintenant il faut que je me taise, maintenant il faut écouter les enfants, essayer de revoir mon passé, mon enfance à moi». Ce sont les enfants qui lui inspirent le petit livre déjà publié Tous les chemins mènent à Aghrom (Tous les chemins mènent au pain). C'est l'histoire d'un enfant qui reçoit quotidiennement de la part de son père de quoi acheter 4 pains et qui revient à la maison avec 3 uniquement. Le quatrième il le donnait à manger en cachette aux pigeons du jardin public. Inquiets ses parents échafaudent mille hypothèses pour expliquer la cause de la disparition du 4e pain. Le père finit par découvrir le pot-aux-roses, mais il ne peut demeurer insensible au sort des pigeons et c'est alors qu'il se rapproche de son fils qu'il avait désavoué un moment. C'est ensuite le tour de la mère de se joindre au cercle des amis des pigeons et l'histoire se termine sur un happy end. L. G.
A 65 ans, Abdelaziz Degga a toujours la mine joviale et le rire facile. Friand de contes et d'anecdotes, il a collectionné, sa vie durant, des milliers d'histoires qu'il a consignées dans des fiches qu'il garde à la maison. Son truc consiste à enregistrer de brefs échanges de paroles qu'il a eues avec des personnages célèbres. Les faits réels ainsi recueillis sont saupoudrés de notes imaginaires avant d'être proposés à la lecture sous forme de nouvelles. Il suffit de prononcer un nom et notre bonhomme vous sort aussitôt la fiche portant l'anecdote qui le concerne. Sur Dahmane el Harrachi, il vous racontera l'histoire du pavé ramené de France sur la demande de son ami Kadouris ancien employé à la voirie. Degga a mis pourtant longtemps en sourdine ses penchants pour le conte. L'artiste plasticien Abderrahamne Ouattou, qui projette d'illustrer ses livres, préfère lui plutôt parler de nouvelles que de contes.
Théâtre
Ce fils de Climat-de-France, à Alger, a débuté sa carrière d'artiste en faisant du théâtre. En 1967, il intègre la section des arts dramatiques du Conservatoire d'Alger. Il joue alors en dialectal et en français et ce, aux côtés de Azzedine Medjoubi, Madjid Bey, Abdelah Bouzida, Norredine Lameche, Samir Bencherifa et Rabah Allam dans la pièce L'Exception et la règle de Bertold Brecht. Jusqu'en 1972, il enchaîne les pièces classiques à tonalité dramatique. Après les Perses d'Eschyle (1967) il campe un rôle dans la représentation en dialectal d'Echaab …Echaab (Le Peuple). En 1969 on le retrouve dans La Poudre d'intelligence de Kateb Yacine. Ensuite en 1972 dans la troupe théâtrale du même Kateb qui va faire une tournée de plusieurs mois en France pour y jouer  Mohamed prend ta valise. "J'ai pu me tailler un petit personnage dans la pièce de Brecht, j'ai joué le porteur, donc à partir de là j'ai commencé. Après il y a eu Kateb Yacine, c'était quelque chose de nouveau, que ce soit au niveau de la forme ou au niveau de l'écriture, le groupe vivait ensemble, et l'auteur vivait avec nous". Dans son C.-V, l'épisode de Sonatour (Centre touristique de Moretti) où il va faire de l'animation sonne comme une phase de transition entre le théâtre et les arts audiovisuels. Avant donc d'apparaître sur les écrans du cinéma et de télévision, Degga s'essaye à Sidi Fredj dans la Voûte de Djamel Allam au one man show en montant des spectacles de bruitage, basés sur la narration d'histoires suggérées par l'imitation de bruits. Degga excelle dans l'interprétation des voix des films westerns. "Chaque spectateur construit lui-même les personnages à partir d'un bruit, il va construire son espace, bref il participe à la création de l'image".
Cinéma
Degga a joué dans une dizaine de films de cinéma et dans sept téléfilms, ce qui est appréciable pour un acteur qui, plus est, évolue en Algérie. "J'ai toujours campé des rôles qui dégagent de la gaieté, je n'aime pas me mettre dans la peau de personnages qui pleurnichent, j'interprète des rôles humoristiques, décontractés, pas sérieux, mais qui n'appartiennent pas au type mondain". Dans Omar Gatlato de Merzak Allouache, il a interprété le rôle de Moh S'mina, "un personnage qui détend un peu l'ambiance". Une exception qui confirme la règle, Degga avoue qu'il a aimé Al Intihar (Le Suicide) de Mustapha Badie où il campe le rôle tragique d'un simplet. Ses yeux enjoués s'animent à l'évocation de ce personnage. "Zohra, issue d'une famille bourgeoise, se marie avec moi. Le couple aura un gosse et le simplet finira par se suicider. Lors de la nuit de noces, il ne comprenait pas ce qui lui arrivait, il voyait autour de lui beaucoup de monde, il parait que c'est un personnage qui a réellement existé à La Casbah d'Alger, c'était quelqu'un qui n'arrêtait pas de prédire sa propre mort". Badie a pris quand même la liberté de filmer une séquence qui ne figurait pas dans le texte de Mohamed Dib d'où a été tiré le scénario du film. "C'est d'ailleurs le film qui m'a plu le plus, aujourd'hui, il n'y a pas de réalisateur de la trempe de Badie, je pense qu'il est unique, c'est une école. Quand il regarde les acteurs, il leur donne ce qu'il faut, c'est lui qui a découvert les grands personnages tels Beyouna, Ouardia, etc. Il a déniché des talents qui n'auraient jamais pu jouer au cinéma. Dans "L'Incendie", on reste admiratif devant le jeu des actrices, on se demande comment il a pu restituer les différentes postures de femmes de Dar Sbitar. Quand il travaille Badie n'a pas de scénariste, il n'a rien, il a tout dans la tête. Il développe tout de suite. Il visionne les séquences et puis il les refait quand ça ne lui plait pas et puis il a son montage. Sur le plan humain, il est très attentif dans ses relations avec les gens. Quand il m'a vu il m'a confié le rôle du simplet en me disant "tu vas jouer le mari de Zohra, tu es un gars sympa", je m'y suis plié car j'ai trouvé que ça sortait de l'ordinaire". Concernant Allouache, Degga le classe dans une autre catégorie. "Allouache, c'est autre chose, je pense que son génie a été d'écrire un scénario où il n'y a presque rien, il savait que les acteurs pouvaient construire des relations entre eux, en intégrant notamment la chanson et tout le reste, avec de petits flashs, ça c'est une autre méthode. "Omar Gatlato" est le fruit d'un scénario où l'on ne pouvait pas concevoir que le réalisateur dicte à l'acteur de poser par exemple un verre sur la table, on aurait tout compliquer, mais il a donné la liberté aux comédiens d'évoluer, de créer spontanément des dialogues qu'on entend tous les jours dans la rue, c'est-à-dire non classiques" et d'ajouter "il avait une capacité d'écoute, son mérite à lui, c'est qu'il ne fixait pas tout, il laissait les acteurs respirer un peu, sachant qu'ils peuvent comprendre certaines choses mieux que lui».
Pour Degga s'il y a eu des films algériens intéressants, beaucoup ont fait dans le stéréotype, "il y a des scénarios où tu entres et tu t'éclates, il y en a d'autres où tu restes figé. C'est toujours la même rengaine, les mêmes personnages, les mêmes thèmes, la police, "sbitar", la porte s'ouvre, "djouz, rani qima teyebt lqahoua" viens, le café est prêt) le téléphone sonne, allô, "allo, arah djay, ouch rak dir" (Il va venir, qu'est-ce que tu fais) "mazal bach nzeoudjou" (il va falloir attendre pour qu'on puisse se marier), et puis ça se focalise sur la famille qui commence à se désintégrer, le vieux est malade, il va mourir, et puis c'est l'héritage, mais on ne veut pas partager, bref, on joue des thèmes qu'on voit au tribunal».
Les circonstances dans lesquelles se déroule le tournage peuvent provoquer une désaffection par rapport au film, explique Degga. "Dans "Les Déracinés" de Lamine Merbah, j'ai eu un passage que je n'ai pas aimé; je devais jouer l'usurier, un épicier qui ne prend pas d'argent, mais de l'or ou du métal argent".  "L'atmosphère était viciée dès le départ car après une bagarre entre le directeur de la photo et la maquilleuse, la tension était montée d'un cran. J'ai joué juste une demi-journée ou une journée, mais je n'ai pas aimé. En arrivant à Miliana, je me suis retrouvé face à une grève. A l'hôtel de Hamamm Righa, j'ai trouvé Lamine Merbah, malade, alité et Hadj Rahim qui lui tendait une tisane; je me suis dit, alors, que suis-je venu faire ici". Et de poursuivre "Dans "Le Troisième acte" de Rachid Benbrahim, j'ai joué le rôle d'un patron de resto, je n'ai pas aimé cette histoire où il y avait la scène d'une bagarre entre un écrivain et un peintre, je devais tourner ma scène à Khemis el-Khechna,en nocturne. Mais Benbrahim avait oublié le coassement des grenouilles dans le barrage, car la scène se jouait à ce niveau-là. C'était beau, on aurait dit l'arrière d'un bateau. Mais on n'entendait que les grenouilles. La bande son était donc foutue. Benbrahim n'a pas su gérer la situation, il parlait de doubler le son et ne se souciait que des grands comédiens à l'image d'Agoumi». Degga confesse qu'il ne s'est pas senti également à l'aise dans  Morituri  de Touita Okacha, "j'ai joué le rôle d'un journaliste qu'on allait assassiner". Pendant le tournage les acteurs, qui venaient d'être dotés par la police d'armes à feu pour les besoins du film, se sont affublés de bottes et de pistolets et ont commencé à poser pour des photos, ça a fait sortir de ses gonds le réalisateur. "Je n'étais pas à l'aise, je ne bougeais pas, les rôles lugubres, assassiner quelqu'un ou être assassiné ne me conviennent pas". "Ils savent que je n'aime pas ces rôles-là". Pour Degga "le cinéma aujourd'hui est devenu n'importe quoi, à l'époque les gens appréhendaient de jouer dans un film. Tout le monde peut faire maintenant du cinéma, pourquoi ? Si tu réalises un navet personne ne te fera de critique, tu prends l'argent et tu t'en vas, l'autre vient c'est la même chose. C'est permis, ils font des navets, et puis ils les refont avec un scénario encore plus mauvais, et ils ne se gênent pas pour s'autoproclamer réalisateurs, tout en participant à des débats comme s'ils avaient réalisé "Apocalypse now" Bouberras était quelqu'un de très intéressant, il a fait des films, mais maintenant il est au Canada".
Retour aux enfants
Degga s'est reconverti en écrivain pour les enfants. Il a écrit à leur intention des livres joliment illustrés qu'il veut faire paraître prochainement en deux versions. L'une en bandes dessinées et l'autre en photos. L'homme en réalité croit s'adresser aux adultes par leur biais. «Quand j'ai eu moi-même des enfants, je me suis dit maintenant il faut que je me taise, maintenant il faut écouter les enfants, essayer de revoir mon passé, mon enfance à moi». Ce sont les enfants qui lui inspirent le petit livre déjà publié Tous les chemins mènent à Aghrom (Tous les chemins mènent au pain). C'est l'histoire d'un enfant qui reçoit quotidiennement de la part de son père de quoi acheter 4 pains et qui revient à la maison avec 3 uniquement. Le quatrième il le donnait à manger en cachette aux pigeons du jardin public. Inquiets ses parents échafaudent mille hypothèses pour expliquer la cause de la disparition du 4e pain. Le père finit par découvrir le pot-aux-roses, mais il ne peut demeurer insensible au sort des pigeons et c'est alors qu'il se rapproche de son fils qu'il avait désavoué un moment. C'est ensuite le tour de la mère de se joindre au cercle des amis des pigeons et l'histoire se termine sur un happy end. L. G.


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