Rencontre régionale des journalistes et professionnels des médias: appel à adapter le système de formation aux mutations numériques    Algérie-Inde: renforcer la coopération dans les domaines de l'énergie et des mines    El Mahdi Oualid: adopter un référentiel national de formations et de compétences pour faciliter le recrutement    CIJ: l'Algérie participe aux audiences sur la demande d'avis relatif aux Obligations de l'entité sioniste concernant les activités des Organisations onusiennes en Palestine    Le drapeau algérien installé au siège du Conseil de paix et de sécurité de l'UA    L'ambassadeur de Zambie auprès de l'Algérie souligne la profondeur des relations bilatérales    Le DG de l'ASBU salue le rôle de l'Algérie dans le soutien à l'action arabe commune    La BNA augmente son capital social de 100%    Goudjil félicite la championne olympique Kaylia Nemour pour son excellente performance à la Coupe du monde de gymnastique au Caire    Hadj 2025 : poursuite des réservations en ligne des chambres d'hôtels à La Mecque    Oran : visite guidée des médias au Centre d'instruction des troupes d'infanterie à Arzew    Constantine commémore le 64e anniversaire de la mort en martyr de Messaoud Boudjeriou    Gymnastique/Coupe du Monde-2025: 2e médaille d'or pour Kaylia Nemour au Caire    Ghaza: le bilan de l'agression génocidaire sioniste s'alourdit à 52.314 martyrs et 117.792 blessés    Santé: rencontre de coordination pour évaluer la performance du secteur    Deuxième session du Baccalauréat des arts: lancement des épreuves pratiques    CHAN 2025/Algérie-Gambie: première séance légère pour les Verts    Colloque scientifique à Alger sur le manuscrit d'Avicenne "Le canon de la médecine"    « Le stress, un facteur de développement d'un certain nombre de troubles mentaux »    Saâdaoui annonce la propulsion de trois nouvelles plate-formes électroniques    Ça se complique au sommet et ça éternue à la base !    Le FC Barcelone arrache la Coupe du Roi face au Real Madrid    Mise au point des actions entreprises    Les renégats du Hirak de la discorde    Quand les abus menacent la paix mondiale    Plus de 116.000 tonnes d'aide en attente    Un site historique illustrant l'ingéniosité du fondateur de l'Etat algérien moderne    Sept produits contenant du porc illégalement certifiés halal    Pour bénéficier des technologies de pointe développées dans le domaine de l'hydrogène vert    Quand les abus menacent la paix mondiale    Quand les constructions inachevées dénaturent le paysage    Le temps des regrets risque de faire encore mal en cette fin de saison    Se présenter aux élections ne se limite pas aux chefs de parti    Un art ancestral transmis à travers les générations    Condoléances du président de la République à la famille de la défunte    Un programme sportif suspendu    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



«Il n'a pas été reconnu comme il aurait dû l'être»
L'œuvre de jean El-Mouhoub Amrouche par la célèbre Tassadit Yassine
Publié dans Le Midi Libre le 01 - 10 - 2011

A la veille de la clôture de la 16e édition du Salon international du livre d'Alger (Sila), la salle de Conférence a eu le privilège d'accueillir Tassadit Yacine, l'anthropologue algérienne, spécialiste de monde berbère, enseignante-chercheur et maître de conférences à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) au laboratoire d'anthropologie sociale. Elle dirige également la revue d'études berbères Awal (« La parole ») qu'elle a co-fondée en 1985 à Paris avec l'anthropologue algérien Mouloud Mammeri et le soutien du sociologue Pierre Bourdieu.
A la veille de la clôture de la 16e édition du Salon international du livre d'Alger (Sila), la salle de Conférence a eu le privilège d'accueillir Tassadit Yacine, l'anthropologue algérienne, spécialiste de monde berbère, enseignante-chercheur et maître de conférences à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS) au laboratoire d'anthropologie sociale. Elle dirige également la revue d'études berbères Awal (« La parole ») qu'elle a co-fondée en 1985 à Paris avec l'anthropologue algérien Mouloud Mammeri et le soutien du sociologue Pierre Bourdieu.
Cette rencontre avec Tassadit Yacine a été une grande occasion de revenir sur un homme longtemps marginalisé de la sphère culturelle, à savoir Jean El Mouhoub Amrouche.
D'entrée en matière, l'anthropologue a souligné l'importance de ce thème car jean Amrouche est «quelqu'un qui a beaucoup donné à l'Algérie, à l'Afrique et au monde. Il n'a pas été reconnu comme il aurait dû l'être, c'est cela qui m'a motivé pour faire connaître cet homme, c'est important pour nous-mêmes pour nos enfants de savoir d'où vient l'histoire de ce pays et comment elle s'est construite. L'histoire du pays ce n'est pas seulement la continuité, ce n'est pas seulement l'héroïsme, elle est faite également d'une série de discontinuités».
Elle soulignera, préalablement, avant de détailler par la suite que «Presque 50 ans après l'indépendance de l'Algérie, je pense qu'il est indispensable de revenir sur certaines trajectoires comme celle d'El Mouhoub Amrcouhe qui a joué un rôle important dans l'autodétermination de l'Algérie. Il faut savoir que la dernière identité de Jean Amrouche est celle d'avoir été un militant algérien, un nationaliste algérien», puis elle dira avec force : «Il est l'artisan de l'indépendance de l'Algérie. Il est mort juste après le cessez-le-feu, c'est-à-dire qu'il va s'éteindre juste au moment de l'indépendance comme si c'était une mission pour lui.»
Durant cette rencontre historique avec Tassedit Yacine, l'assistance a eu la chance non pas d'assister à un café littéraire banal mais à une conférence digne d'une grande université. D'une méthodologie précise et d'une pédagogie extrême, elle tracera la vie de Jean Amrouche. Elle soulignera ainsi que Jean Amrouche rencontre Gide, avec qui il correspond depuis longtemps, à Tunis en 1942 avant de rejoindre les milieux gaullistes à Alger, ce qui a été décisif pour sa vie.
Elle est également revenue sur le parcours littéraire et professionnel de cet intellectuel en rappelant qu'il fut le fondateur de la revue L'Arche. En 1945, L'Arche devient une revue parisienne. Après avoir travaillé à Tunis-P.T.T. ou Radio France Alger, Amrouche réalise pour Radio France Paris des émissions où il invite Bachelard, Barthes, Merleau-Ponty, Morin, Starobinski, Wahl. Avec Henry Barraud ; il invente un genre radiophonique nouveau : les entretiens, avec Gide (1949), Claudel (1951), Mauriac (1952-1953) ou Ungaretti (1955-1956).
Mis à la porte de Radio France en 58, il s'exile de nouveau, sur les ondes de la radio suisse cette fois, où il plaide la cause algérienne jusqu'à sa mort en 1962, trois mois avant l'accord d'indépendance.
Jean Amrouche était également connu pour sa lutte pour la préservation du patrimoine et les propositions sur le génie africain. Chants berbères de Kabylie prolonge le souffle poétique et entame la réflexion sur le patrimoine et le génie africain. Les chants ont été recueillis de la bouche de la mère Fadhma, transcrits de la main de Taos et traduits par Jean El Mouhouv en français. En plus de la traduction, s'impose une interprétation subtile de la restitution en français d'un chant profond, d'une mélodie unique et surtout de la «voix de la mère», voix presque silencieuse qui dit la nostalgie du lointain, de la richesse d'un patrimoine qu'elle sent s'éloigner, se perdre. Et c'est là qu'intervient le génie poétique de Jean Amrouche qui pressent dans la voix de sa mère «la présence d'un pays intérieur dont la beauté ne se révèle que dans la mesure où l'on sait qu'on l'a perdu».
La célébration du génie africain semble tout droit issue de l'intérêt très vif qu'a suscité en lui la collecte, la transcription puis la traduction du patrimoine poétique kabyle : «Il y a dix-huit millions de Jugurtha dans l'île tourmentée qu'enveloppent la mer et le désert et qu'on appelle le Maghreb.»
Chrétien et berbère, imprégné de culture française et défenseur de la cause algérienne, Jean El Mouhoub Amrouche sera écarté du paysage littéraire arabe. Il est nécessaire aujourd'hui de lui redonner sa palace et à l'occasion la parole. On se souviendra d'ailleurs de ces paroles poignantes qui ont résumé le destin de la famille Amrouche : «Je parle ici, non pas en homme de la rue, déclara-t-il un jour à Genève en 1959, mais en homme qui se trouve moralement à la rue. Je veux dire que je ne représente rien. Je ne peux représenter la France et la culture française : on m'en contesterait le droit, et on l'a déjà fait. Je ne peux pas représenter non plus l'Algérie : on m'en contesterait le droit, et on l'a déjà fait, et ceux qui l'ont fait sont des hommes de gauche, et même d'extrême gauche, qui m'ont dit que je n'avais pas le droit de parler des choses de la France, parce que je n'étais qu'un Algérien, mais que je n'avais pas le droit de parler des choses de l'Algérie, et au nom des Algériens puisque je suis un Algérien francisé, le plus francisé des Algériens.»
Cette rencontre avec Tassadit Yacine a été une grande occasion de revenir sur un homme longtemps marginalisé de la sphère culturelle, à savoir Jean El Mouhoub Amrouche.
D'entrée en matière, l'anthropologue a souligné l'importance de ce thème car jean Amrouche est «quelqu'un qui a beaucoup donné à l'Algérie, à l'Afrique et au monde. Il n'a pas été reconnu comme il aurait dû l'être, c'est cela qui m'a motivé pour faire connaître cet homme, c'est important pour nous-mêmes pour nos enfants de savoir d'où vient l'histoire de ce pays et comment elle s'est construite. L'histoire du pays ce n'est pas seulement la continuité, ce n'est pas seulement l'héroïsme, elle est faite également d'une série de discontinuités».
Elle soulignera, préalablement, avant de détailler par la suite que «Presque 50 ans après l'indépendance de l'Algérie, je pense qu'il est indispensable de revenir sur certaines trajectoires comme celle d'El Mouhoub Amrcouhe qui a joué un rôle important dans l'autodétermination de l'Algérie. Il faut savoir que la dernière identité de Jean Amrouche est celle d'avoir été un militant algérien, un nationaliste algérien», puis elle dira avec force : «Il est l'artisan de l'indépendance de l'Algérie. Il est mort juste après le cessez-le-feu, c'est-à-dire qu'il va s'éteindre juste au moment de l'indépendance comme si c'était une mission pour lui.»
Durant cette rencontre historique avec Tassedit Yacine, l'assistance a eu la chance non pas d'assister à un café littéraire banal mais à une conférence digne d'une grande université. D'une méthodologie précise et d'une pédagogie extrême, elle tracera la vie de Jean Amrouche. Elle soulignera ainsi que Jean Amrouche rencontre Gide, avec qui il correspond depuis longtemps, à Tunis en 1942 avant de rejoindre les milieux gaullistes à Alger, ce qui a été décisif pour sa vie.
Elle est également revenue sur le parcours littéraire et professionnel de cet intellectuel en rappelant qu'il fut le fondateur de la revue L'Arche. En 1945, L'Arche devient une revue parisienne. Après avoir travaillé à Tunis-P.T.T. ou Radio France Alger, Amrouche réalise pour Radio France Paris des émissions où il invite Bachelard, Barthes, Merleau-Ponty, Morin, Starobinski, Wahl. Avec Henry Barraud ; il invente un genre radiophonique nouveau : les entretiens, avec Gide (1949), Claudel (1951), Mauriac (1952-1953) ou Ungaretti (1955-1956).
Mis à la porte de Radio France en 58, il s'exile de nouveau, sur les ondes de la radio suisse cette fois, où il plaide la cause algérienne jusqu'à sa mort en 1962, trois mois avant l'accord d'indépendance.
Jean Amrouche était également connu pour sa lutte pour la préservation du patrimoine et les propositions sur le génie africain. Chants berbères de Kabylie prolonge le souffle poétique et entame la réflexion sur le patrimoine et le génie africain. Les chants ont été recueillis de la bouche de la mère Fadhma, transcrits de la main de Taos et traduits par Jean El Mouhouv en français. En plus de la traduction, s'impose une interprétation subtile de la restitution en français d'un chant profond, d'une mélodie unique et surtout de la «voix de la mère», voix presque silencieuse qui dit la nostalgie du lointain, de la richesse d'un patrimoine qu'elle sent s'éloigner, se perdre. Et c'est là qu'intervient le génie poétique de Jean Amrouche qui pressent dans la voix de sa mère «la présence d'un pays intérieur dont la beauté ne se révèle que dans la mesure où l'on sait qu'on l'a perdu».
La célébration du génie africain semble tout droit issue de l'intérêt très vif qu'a suscité en lui la collecte, la transcription puis la traduction du patrimoine poétique kabyle : «Il y a dix-huit millions de Jugurtha dans l'île tourmentée qu'enveloppent la mer et le désert et qu'on appelle le Maghreb.»
Chrétien et berbère, imprégné de culture française et défenseur de la cause algérienne, Jean El Mouhoub Amrouche sera écarté du paysage littéraire arabe. Il est nécessaire aujourd'hui de lui redonner sa palace et à l'occasion la parole. On se souviendra d'ailleurs de ces paroles poignantes qui ont résumé le destin de la famille Amrouche : «Je parle ici, non pas en homme de la rue, déclara-t-il un jour à Genève en 1959, mais en homme qui se trouve moralement à la rue. Je veux dire que je ne représente rien. Je ne peux représenter la France et la culture française : on m'en contesterait le droit, et on l'a déjà fait. Je ne peux pas représenter non plus l'Algérie : on m'en contesterait le droit, et on l'a déjà fait, et ceux qui l'ont fait sont des hommes de gauche, et même d'extrême gauche, qui m'ont dit que je n'avais pas le droit de parler des choses de la France, parce que je n'étais qu'un Algérien, mais que je n'avais pas le droit de parler des choses de l'Algérie, et au nom des Algériens puisque je suis un Algérien francisé, le plus francisé des Algériens.»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.