Dès sa préparation, sa conception et sa première diffusion, Le Soir d'Algérie et, comme son nom l'indique, était destiné à une parution du soir avec une validité chevauchant entre l'après-midi et la matinée du lendemain. Un choix et un concept qui ont fait le succès du journal et qui lui ont permis surtout de se distinguer en matière de contenu des éditions matinales. Le Soir avait le loisir d'exploiter toutes les informations et tous les évènements survenus la nuit. Si au niveau national, les bouleversements étaient exceptionnels, au plan international, il y avait foisonnement d'informations de natures diverses, notamment, la guerre du Golf au début de l'année 1991 qui occupait de bons espaces dans les colonnes du journal. Mais le 6 octobre 2001, soit 11 années après, les lecteurs du Soir étaient surpris d'apprendre que leur quotidien passait à l'édition du matin. Des questionnements, du reste légitimes, fusaient alors dans leur esprit sur les raisons d'une telle décision. Qu'est-ce qui pouvait justifier un changement de cap aussi important ? Pourquoi ce renoncement à un style de presse et à des engagements pris avec des lecteurs habitués à leur journal de l'après-midi ? Le passage à l'édition du matin du Soir d'Algérie n'a pas été décidé de gaîté de cœur, mais fut la conséquence d'une situation économique qui ne cessait d'affaiblir fragiliser les fondements de l'entreprise. Fouad Boughanem, directeur de la publication à cette époque, expliquait les circonstances de ce passage. Pour lui, «la raison du passage de l'édition du soir à celle du matin est en premier lieu économique, puisqu'elle concerne la disponibilité du quotidien dans les kiosques, et ce, dans plusieurs wilayas du pays. Nous nous étions rendu compte qu'un certain seuil de vente n'était pas dépassé. Il s'agissait aussi de difficultés liées à des perturbations de la distribution à travers le territoire national. Et nos revendeurs se plaignaient de ne pas recevoir le journal assez tôt». À cela s'ajoute la décennie noire qui a profondément affecté le système économique du pays et perturbé les habitudes de vie de la société algérienne. L'on se rappelle que la capitale était déclarée ville morte dès 17h, l'insécurité régnait dans les quartiers et sur les routes et que la presse était parmi les cibles préférées de l'hydre terroriste. Le directeur du journal devait signaler aussi : «Nous avons fini par faire une étude du marché, multiplié les consultations, avant d'appliquer la décision.» Il a toutefois mis en évidence les difficultés rencontrées, notamment quand il fallait convaincre du bien-fondé de la décision, d'habituer les lecteurs, mais aussi les buralistes à l'édition du matin. Certains revendeurs avaient même pris pour habitude de garder le journal distribué le matin pour ne le vendre qu'à partir de midi, pénalisant ainsi le journal sur le plan des ventes. «Mais nous avons résisté à tout cela et même à ceux qui nous conseillaient de revenir à l'édition du soir.» Aujourd'hui, l'opération est une vraie réussite et l'évènement de l'époque s'est banalisé. Désormais Le Soir d'Algérie est, pour ses lecteurs, un quotidien du matin au même titre que les autres journaux. B. B. El Watan, la seconde pierre à l'édifice de la presse indépendante Plus d'un mois après la sortie du Soir d'Algérie, la famille de la presse indépendante se renforce avec la venue d'un nouveau-né, El Watan. Un journal lancé toujours dans le cadre de la circulaire de Hamrouche de mars 1990 et fondé par une vingtaine de journalistes issus du quotidien étatique El Moudjahid. À l'origine de l'initiative, une première réunion ayant regroupé 46 journalistes venus débattre de la faisabilité du projet, mais il n'en restera à la fin que 20 qui y croyaient dur comme fer et ont décidé de se lancer dans l'aventure. Dès le premier numéro, en date du 8 octobre 1990, l'engagement était clairement précisé, la défense de la promotion de la démocratie, la liberté d'expression, le respect des droits de l'homme et la justice sociale. Son contenu sera ainsi orienté vers la mise en valeur de l'information nationale, les sujets de société, le sport, les éditions régionales et l'internationale. Une attention particulière a été aussi accordée à des volets stratégiques pour le métier de journaliste, à savoir le reportage, les enquêtes et la création de suppléments thématiques, économie, environnement, étudiants... Au fil des années, El Watan deviendra un des principaux titres de la presse en Algérie. Ses positions et la constance de sa ligne éditoriale lui vaudront plusieurs déboires, dont l'emprisonnement de 6 de ses journalistes en 1993, ainsi que plusieurs suspensions dont la plus importante aura duré quatre semaines en 1998. B. B. Figures du soir Aux premières années de son existence, Le Soir d'Algérie a vu se constituer une équipe de football qui participait à plusieurs tournois organisés en diverses occasions. Y prenaient part des journalistes mais aussi des collègues des autres structures du journal. Elle a même réussi à décrocher une troisième place (sur quatre) lors d'une manifestation et une coupe qui trône toujours dans le bureau du gérant. Des unes et des évènements Année 2003 Boumerdès violemment secouée Le séisme qui a durement ébranlé, mercredi soir (21 mai 2003), plusieurs régions du centre du pays et en particulier la wilaya de Boumerdès a démontré amplement l'absence de respect des normes de construction par les promoteurs immobiliers nationaux. Près de 3 000 morts et 15 000 sans- abri seront enregistrés. Le séisme a atteint une magnitude de 6,8 sur l'échelle de Richter et l'épicentre se situe dans la région de Zemmouri (wilaya de Boumerdès), plus précisément en mer, à 7 km au nord de cette localité. À l'origine, une faille jusque-là méconnue et qui s'étend entre Dellys et Aïn Taya, sur une longueur de près de 50 km. Après la secousse principale, de nombreuses répliques relativement fortes se succéderont durant la nuit et le lendemain, ajoutant à la panique de la population. Ces répliques se compteront par milliers durant toute l'année qui suivra et seront d'intensités différentes. Dans toute la région touchée, des constructions s'effondrent, notamment à la cité des 1200-Logements où des immeubles entiers ont basculé ou se sont affaissés en millefeuille, ainsi qu'à Reghaïa et d'autres localités environnantes. Dans la capitale, les quartiers les plus touchés sont ceux de Belcourt où plusieurs maisons se sont effondrées, Ruisseau, Bab-El-Oued, Birkhadem et du boulevard des Martyrs. A la place du 1er-Mai, des pans de mur de vieilles bâtisses se sont écroulés. Dans la banlieue, des immeubles se sont effondrés, notamment à Bab Ezzouar et Aïn Taya. L'allergie à la presse indépendante Comme il fallait bien s'y attendre, le cercle présidentiel entame dès aujourd'hui dimanche (17 août 2003) la mise en œuvre du plan médiatique qu'il prévoit pour la campagne électorale de Abdelaziz Bouteflika. Ce «projet», prévu de longue date en effet et conçu par la Présidence dans la perspective du rendez-vous électoral, comprend un volet communication que prend en charge Saïd Bouteflika en personne. L'omnipotent conseiller spécial s'est engagé à offrir à son frère un paysage médiatique «assaini» avant l'élection présidentielle. Détenant tous les leviers de l'ensemble des secteurs névralgiques intervenant dans la chaîne de l'industrie de la communication, Saïd Bouteflika, le ministre réel de la communication et de la culture, ne lésine pas sur les moyens pour ce faire. Via l'Agence nationale d'édition et de publicité (Anep) notamment, des titres de journaux insignifiants, dont la raison d'être se résume à encenser Bouteflika et la «tribu» qui l'entoure, sont entretenus pour la bonne cause. Leur tirage symbolique ne les empêche pas en tout cas «d'attirer» abondamment les annonceurs publics ou de bénéficier de prestations dont ils n'auraient même pas rêvé en des circonstances ordinaires. Mais l'allergie de Bouteflika à la presse indépendante de son pays est telle qu'il s'affaire à refaire un paysage médiatique nationale submergé par une nuée de médias «semi-officiels».