Pour la première fois dans l'histoire du pays, les Algériens sont appelés à voter un 1er novembre, date anniversaire du déclenchement de la guerre de Libération nationale. Pourquoi un tel marqueur symbolique ? Sans doute pour souligner que la «nouvelle république» projetée par cette réforme qui se veut en rupture avec le régime politico-oligarchique de Abdelaziz Bouteflika se situe en droite ligne de l'appel du 1er Novembre 1954 ! C'est du moins ce que suggère le slogan officiel – «Novembre 54 : la libération, novembre 2020 : le changement» ! Reste que cette campagne référendaire, en pleine pandémie, a été animée par des forces et des figures frappées de discrédit — le FLN et le RND entre autres – qui auraient dû faire montre d'humilité, d'autant que la tonalité de leurs propos jurait avec les intentions affichées par le slogan de cette campagne : le changement ! Le ministre Sid-Ali Khaldi, dont le propos a soulevé une tempête médiatique, s'est certes excusé, alors que le véritable enjeu qui devrait préoccuper ces politiques, c'est plutôt le taux de participation : sera-t-il supérieur ou inférieur à celui enregistré le 12 décembre 2019 ? De plus, le 1er novembre, certains voteront «oui», d'autres «non» et d'autres encore, tout aussi nombreux, s'abstiendront ou voteront «blanc» ! Ce sont les règles du jeu démocratique : il y a un pouvoir politique et des oppositions. Et l'alternance au pouvoir n'est pas interdite par la loi ! Par conséquent, assimiler les objections et les désaccords exprimés par les uns et les autres au sujet du projet constitutionnel à des complots a quelque chose de suranné. C'est un peu vite oublier qu'en mettant fin au pouvoir politico-oligarchique, le Hirak, qui a ouvert une nouvelle ère, a en même temps vu l'entrée en politique de centaines de milliers de jeunes. Une jeunesse qui ne se reconnaît dans aucun parti et surtout pas dans ces figures ayant servi Bouteflika et cherchant à se relégitimer. Une jeunesse qui caresse le rêve d'une Algérie libre, démocratique et de progrès et non d'une Algérie synonyme de régression sociétale et sociale et d'un passéisme nostalgique et réactionnaire. Cette jeunesse-là, que d'aucuns, se basant plus sur des intuitions héritées de la culture du parti unique que sur des études sérieuses, qualifient arbitrairement de minoritaire, existe. Elle est là et bien présente. Il faut compter avec elle. Durant 13 mois de Hirak, elle a fait montre d'une maturité exemplaire, n'a pas répondu aux invitations d'un Larbi Zitout à brûler les emblèmes des pays occidentaux ! Et c'est ce qu'elle a fait encore, quelques mois plus tard face aux dérapages de l'ancien ministre Salah Eddine Dahmoune, qui qualifiait alors les opposants à l'élection présidentielle du 12 décembre 2019 de «pseudo-algériens», «traîtres», «mercenaires», «homosexuels , sans avoir été recadré comme l'a été le wali d'Oran face à cette enseignante qui avait seulement attiré son attention sur l'état lamentable du mobilier scolaire de son école ! Autre individu qui n'a pas compris que l'Algérie avait changé : le secrétaire général du FLN, Abou El-Fadl Baâdji. Oubliant que son parti avait voté toutes les lois du pouvoir de Bouteflika, qu'il avait mené campagne pour le 5e mandat, le voilà menaçant les opposants au projet constitutionnel de brandir «Seif al-Hadjadj» ! D'abord, sait-il qu' Al-Hadjadj Ibn Youcef, figure controversée de la dynastie des Omeyyades, né en 661, s'était rendu célèbre en assiégeant en 692 durant six mois la ville sainte de La Mecque alors aux mains de Abdellah Zubayr, qui n'était pas un hérétique mais qui avait eu le tort aux yeux des Omeyyades de se proclamer calife de la ville sainte ? Utilisant la catapulte – l'artillerie de l'époque — les forces d'Al-Hadjadj ont détruit en partie La Mecque et la Kaâba. Quant à Abdellah Zubayr, il a été décapité et son cadavre crucifié ! Et c'est à ce Al-Hadjadj qui déclarait «je vois des têtes qui sont mûres et je suis celui qui va les cueillir», à savoir les couper, que se réfère M. Baâdji, pourtant diplômé en droit de l'Université de Rabat ! Le 1er novembre, une nouvelle séquence va s'ouvrir. L'adoption du projet de révision constitutionnel sera suivi par la dissolution de l'APN et des élections législatives. Quant au Hirak, qui a organisé en son sein une consultation pour se positionner, le pouvoir aurait bien tort de croire qu'il a mis la clé sous la porte. À jeudi et bonne fête du Mouloud. H. Z.