Hier, à l'entrée principale du marché d'Aïn Benian. C'est ici que s'installent tous les marchands « informels ». Enfin, appelons-les ainsi, juste pour les distinguer des « autres », ceux qui paient un loyer d'étal et des impôts, qui sont à l'intérieur du marché. Hier, il y avait quelques caisses de sardines. À 900 et 1 000 dinars, il n'y a pas vraiment foule autour mais il paraît que c'est... déjà ça. Quand ça commence à venir, les prix vont forcément baisser. Jusqu'où, puisque le prix de la sardine est un éternel sujet de colère, de désespoir, de railleries grotesques, de formules redondantes et de trouvailles de génie parfois ? C'est quoi au juste le seuil « tolérable » de son prix, qui en fera un produit accessible aux petites bourses ? On ne sait pas vraiment, parce qu'elle (était) déjà chère à 400 dinars, excessivement chère à 500, un peu chère quand même à 300. C'était avant le coronavirus qui, dans l'absolu, n'y est pour rien dans l'histoire, puisqu'il n'empêche pas les pêcheurs de pêcher. C'était aussi avant la persistance du mauvais temps. « Lui » non plus ne peut pas être le coupable idéal pour expliquer un mal aussi profond que les profondeurs de la mer. Aussi limpide également ? Pas sûr. Il paraît qu'au vu de son prix de revient, la sardine est vendue au... juste prix. C'est certainement exagéré mais ça ne manque pas de logique absolue. C'est la performance, la compétitivité dans l'entreprise de pêche qui limite les coûts de production. Et l'un dans l'autre ramène les prix au consommateur à un niveau de dimension humaine. Mais ça, c'est ailleurs ou dans une autre vie à venir. Quand la pêche sera organisée, quand les pêcheurs seront bien formés, quand les bateaux seront de qualité, quand le marché sera transparent et régulier, quand la concurrence sera réelle et loyale... quand tout sera normal, quoi ! Au fait, pourquoi on parle de la sardine en pleine tempête et au milieu d'un gué sanitaire où il y a certainement plus sérieux comme sources d'inquiétude ? Pourquoi parle-t-on de sardine quand beaucoup n'y pensent même pas, parce qu'ils angoissent encore pour le pain et le lait ? Parce qu'il faut parler de tout, c'est la vie. Bientôt il fera beau et le virus sera vaincu. Il y aura des sardines pour tout le monde ? Peut-être pas, et on en parlera toujours. Hier, à l'entrée principale du marché d'Aïn Benian, il y avait deux caisses de sardines. L'une à 1 000 dinars et l'autre à 900. Il n'y avait pas grand monde autour. La foule entourait plutôt un charlatan qui proposait une potion magique pour toutes les maladies possibles et imaginables. Il paraît qu'il n'a pas osé dire que sa panacée était aussi bonne contre le coronavirus. S. L.