De Tunis, Mohamed Kettou Augmentation des prix du sucre, du carburant, de l'eau, sans compter ceux irréguliers des fruits et légumes, autant d'indices sur une situation sociale de plus en plus inquiétante. Pour s'expliquer, les autorités péchent par une communication défaillante, qui n'apporte guère de quiétude à une population qui vit un ras-le-bol sans précédent. C'est, estime-t-on, le résultat inéluctable de la démarche économique adoptée, consciemment ou inconsciemment, depuis la «révolution» de janvier 2011 et la prise du pouvoir par des équipes nullement ou peu rompues aux affaires publiques. Ces augmentations de prix qui seront suivies d'autres selon les responsables du ministère des finances, sont, selon toute vraisemblance, dictées par le Fonds monétaire international (FMI), qui lie l'octroi de tout nouveau prêt à la Tunisie à la suppression, même progressive, du soutien des prix. À ce jour, les discussions avec cette institution traînent dans l'espoir d'obtenir un prêt de 4 milliards de dollars pour financer en partie le budget de l'année en cours. Les exigences du FMI ne s'arrêtent pas là, puisqu'elles englobent une réduction de la masse salariale servie par la Fonction publique. Par ailleurs, les responsables au plus haut sommet de l'Etat multiplient les initiatives à la recherche de nouvelles sources de financement. C'est dans ce cadre que s'inscrivent les visites récentes du chef du gouvernement et du chef du Parlement au Qatar, et celle effectuée, les 3 et 4 Juin, par le président de la République à Bruxelles. Sensibiliser les pays amis et les pourvoyeurs de fonds, en vue de relancer l'économie est le principal objectif assigné dans l'espoir de voir injecter dans l'économie du pays les investissements souhaités. Malgré ces efforts, ces investissements ne répondent pas encore aux besoins pressants comme l'indiquent les accords conclus, jeudi à Tunis, avec la partie française à la fin de la visite du Premier ministre français. Le volume n'a pas dépassé les 80 millions euros considérés, par les observateurs, comme dérisoire, eu égard aux relations tunisio-françaises Résumant la situation, Zied Laâdhari, ancien ministre, démissionnaire du parti islamiste, a affirmé, vendredi, que les dirigeants tunisiens manquent de professionnalisme et d'expérience pour mener le bateau à bon port. À ce propos, il n'a épargné aucun parti, même celui auquel il appartenait et dont était tenu d'appliquer les vues et la politique sur le terrain. «La Tunisie est menacée dans son existence et le salut passe, inéluctablement, par une vue stratégique collective», affirme-t-il. Entre temps, la Covid-19 fait des ravages, plaçant le pays dans une situation sanitaire critique. Les réunions se multiplient à la recherche d'une parade. Mais la lassitude du personnel soignant, conjuguée au manque des moyens matériels et à une absence flagrante de discipline au sein de la population, font courir un risque d'extension exponentielle de la pandémie. En toile de fond, des partis politiques s'entretuent à l'intérieur du Parlement et dans les médias, et une crise politique qui perdure au sommet de l'Etat empoisonne davantage la situation économique et sociale. M. K.