Boughali au Caire pour prendre part aux travaux de la 6e conférence du Parlement arabe    Ligue 1 Mobilis : l'ESS rate le coche, le JSS puissance 6    Agression sioniste contre Ghaza : il faudra 14 ans pour déblayer les décombres    Ghaza : alerte sur la propagation des épidémies dans les camps de déplacés en raison des vagues de chaleur    Festival des Sports de la Wilaya d'Alger : A la découverte de La Prise d'Eau ...    Les SMA organisent la 1re rencontre nationale des créateurs de contenu scout    NESDA: près de 9.900 projets financés en 2023    Championnats d'Afrique individuels de judo : Dris Messaoud (-73 kg) et Amina Belkadi (-63 kg) sacrés    Centre national algérien des prestations numériques : jalon important pour réaliser la souveraineté numérique et l'indépendance technologique    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'élève à 34.356 martyrs    Accidents de la circulation : 44 morts et 197 blessés en une semaine    Festival du film méditerranéen d'Annaba : "Bank of Targets" inaugure les projections du programme Viva Palestine    Festival du film méditerranéen d'Annaba : lancement de la compétition courts-métrages    Festival du film méditerranéen d'Annaba : affluence exceptionnelle à la première projection publique du film "Ben M'hidi"    Championnat d'Afrique des clubs de Handball : les Angolaises de Petro Atletico battent Al Ahly d'Egypte et filent en finale    Agrément du nouvel ambassadeur d'Algérie en Gambie    Chanegriha préside la 17ème session du Conseil d'orientation de l'Ecole supérieure de Guerre    Chanegriha impitoyable à la préparation au combat    Arkab examine avec le président du Conseil d'administration de "Baladna" les opportunités de coopération dans secteur de l'énergie    PIB et taux de croissance, inflation, taux de chômage, endettement, réserves de change, cotation du dinar    Le Bureau Fédéral de la FAF apporte son soutien à l'USMA    Son nom fait «trembler» le foot du Roi    Coupe d'Algérie : Le MCA écarte le CSC et va en finale    Ali Aoun inaugure une usine de fabrication de pièces automobiles et une unité de production de batteries    Le Président chilien Gabriel Boric a qualifié la guerre israélienne de « barbare »    Les autorités d'occupation ferment la mosquée Ibrahimi aux musulmans    Le directeur général des forêts en visite d'inspection    Trois membres d'une même famille assassinés    Dahleb donne le coup d'envoi d'une campagne de reboisement au Parc de Oued Smar    Les autorités d'occupation ferment la mosquée Ibrahimi aux musulmans    Transformer le théâtre universitaire en un produit commercialisable    Les médias conviés à une visite guidée du Centre de formation des troupes spéciales    L'Algérie participe à la 38e édition    Principales étapes de la résistance des Touaregs    La psychose anti-islamique obéit aux mêmes desseins que la hantise antibolchevique    Le ministre de la Justice insiste sur la fourniture de services de qualité aux citoyens    Témoignage. Printemps Amazigh. Avril 80        L'ORDRE INTERNATIONAL OU CE MECANISME DE DOMINATION PERVERSE DES PEUPLES ?    Le Président Tebboune va-t-il briguer un second mandat ?    L'imagination au pouvoir.    Le diktat des autodidactes    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    El Tarf: Des agriculteurs demandent l'aménagement de pistes    Ils revendiquent la régularisation de la Pension complémentaire de retraite: Sit-in des mutualistes de la Sonatrach devant le siège Aval    Coupe d'afrique des nations - Equipe Nationale : L'Angola en ligne de mire    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La vie est belle (hommage � Khelifi Ahmed)
Publié dans Le Soir d'Algérie le 03 - 05 - 2012


Par son fils : Walid Khelifi
La vie est belle, ne laisse rien ni personne te faire croire le contraire. Ces mots que mon p�re m'a l�gu�s devraient �tre prononc�s � tous nos proches, et m�me aux inconnus. Ces paroles de sagesse d�coulent d'une exp�rience riche et exceptionnelle, que ce soit en termes d'engagements, de v�cu ou m�me de d�ceptions.
Nos vies sont ainsi faites : perfectibles, incertaines et erratiques ; mais ce qui demeure pour vrai de par les si�cles et les temps, c'est que notre passage sur cette terre est une chance, une b�n�diction par del� les troubles et les complications. Celui qui a connu l'amour ne serait-ce qu'un jour ; celui qui a �t� heureux ne serait-ce que le temps d'un tour, peut certifier que r�ellement, la douleur est la ran�on du bonheur. Cet amour pour la vie, ce sentiment de paix � l'�gard du monde, je l'ai toujours per�u chez mon p�re. Le courage et la joie sont d�cid�ment les attributs des rois. Mon p�re n'en �tait pas un, bien au contraire, il a toujours combattu les privil�ges de naissance et de rang, pour ne favoriser que la dignit� et l'�galit�. Pour autant, il a toujours gard� une admiration patente pour l'univers des convenances, des bonnes mani�res et de l'�l�gance h�rit�es de l'aristocratie europ�enne qui a marqu� l'histoire de par son faste et son raffinement. Mon plus grand compliment fils, me disait-il, c'est une femme d�tach�e de la CIA qui me l'a fait. C'�tait � l'occasion d'une rencontre FLCIO UGTA en 1996, dont mon p�re menait la d�l�gation alg�rienne, qu'un agent des services am�ricains, une certaine Joanna, d�clara � propos de lui : Cet homme, vous le mettez seul au milieu de Bombay, et il en ressortira avec mille id�es.� Ce mot l'a touch�, et il garda de ce voyage aux Etats-Unis une grande impression de grandeur et de respect envers cet antre du capitalisme d�brid�. Lui qui eut � visiter l'URSS en 1976, fut troubl� par la diff�rence de perceptions qui �manait de ces deux pays autrefois �ennemis� ; l'un sentait la libert�, l'opulence, et l'autre la d�tresse et l'ennui. Mais c'�tait pour lui et ses amis, tous marxistes plus jeunes, un crime de l�se-majest� que de l'avouer. Donc m�me bien apr�s la d�sillusion communiste, il ne le confessait qu'� mots couverts. Eh �amis de Max� comme les appelait tendrement un gars du village. Il leur disait vous �amis de Max�, vous ne faites que parler ; moi pour ma part, j'ai une terre � labourer. Cette sagesse paysanne, tr�s t�t, il l'int�gra dans son parcours de vie.
Quand les enfants pleuraient en Alg�rie, Boumedi�ne les couvrait de son burnous
A Gouraya, coquet village berb�rophone et colonial de la c�te alg�rienne, une bande de �r�volutionnaires � nourri au boumedi�nisme, activait, qui dans le volontariat, qui dans le militantisme, pour porter les fleurs d'Alg�rie � leur bourgeonnement. Ces jeunes gens, fins lettr�s et intellectuels � souhait, auront � arpenter les grandes villes du monde, et � c�toyer les hautes fonctions de l'Etat. �Tout ceci gr�ce � Boumedi�ne�, me r�p�tait-il. �Il a fait d'un peuple de gueux, une nation qui compte dans le monde.� Il n'est point ici question de d�terrer la querelle de �sourds� qui vibre ces temps-ci sur les choix de l'illustre pr�sident alg�rien, mais il s'agit ici de rendre voix � un sentiment partag� par beaucoup d'Alg�riens de l'�poque, qui faisait qu'on �tait fier de son pays, et fier de lutter pour son essor. Mon p�re me rapporta une histoire elle-m�me cont�e par ma grand-m�re. �a disait en somme que quand les enfants pleuraient en Alg�rie, Boumedi�ne les couvrait de son burnous. Cette anecdote �mouvante trace la pr�sence de ce personnage �minent dans l'inconscient des Alg�riens de l'�poque, et jusqu'� maintenant, sa m�moire demeure entour�e de respect et de consid�ration par ceux qui ont pris part � cette �belle aventure� pour la dignit�. Plus tard, terminant ses �tudes � l'ENA, mon p�re serra la main � �l'homme au burnous�. Il me relata la venue du pr�sident � l'occasion de la nouvelle promotion de futurs fonctionnaires, et son discours � leur adresse : �Vous �tes tous ici, parmi la cr�me de l'Alg�rie, et vous jurez de servir votre pays. Soit, mais laissez-moi laissezmoi vous dire une chose ; attention � ne pas oublier votre peuple quand vous serez aux responsabilit�s. Car il est ais� de promettre, mais tellement difficile de rester honn�te.� Par ces mots de feu Boumedi�ne, entendus tr�s jeune de ma part, je me suis fait une id�e sur l'engagement des �anciens�, de leur patriotisme et de leur espoir appel� Alg�rie. Les plus jeunes ne comprendront peut-�tre pas, comme le dit la chanson, mais il n'est pas interdit d'�couter. Ecouter cette force qui a port� toute une g�n�ration � la libert� et � la dignit�. Ecouter les berceuses de nos grands-m�res sur la duret� d'�tre parfois l�. Mais �couter aussi le silence de tous ceux qui ont lutt�, et qui ont �t� oubli�s. Se battre pour les d�sh�rit�s et les moins nantis est l'apanage des grands seigneurs, des �mes bien n�es, et � ceux-l�, personne ne pourra leur enlever ce que la justice leur doit. Quand je lui faisais part de mon scepticisme quant � son combat, il me r�pondait toujours : fils, tu grandiras et tu comprendras. Il m'a racont� tant de fois le film de Sitting Bull et du g�n�ral Custer, chefd'�uvre du septi�me art qu'il a d� regarder tant de fois. Il est plus pr�cis�ment question d'une sc�ne, que je n'ai pas vue, mais qui m'a �t� racont�e avec tellement de force et de conviction, qu'elle en est devenue une philosophie de vie et de courage pour moi. Dans la s�quence en question, le g�n�ral Custer, chef de la cavalerie am�ricaine, assi�ge les troupes de Sitting Bull, chef sioux, avec lequel il avait tiss� des liens d'amiti� et de respect, comme seuls deux �ennemis� peuvent saisir le degr� de leur honneur respectif. Mu par ce sentiment d'admiration envers le farouche Indien, le g�n�ral d�cide de lui envoyer un �missaire pour lui donner une chance de se rendre. Il en fut fait, et � cette proposition relevant du bon sens militaire, le chef indien r�torque � son �ami� am�ricain : �Dites au g�n�ral Custer, pour lequel j'ai beaucoup d'estime, que s'il me respecte vraiment, il doit me laisser me battre jusqu'� la fin� ce serait son honneur de me laisser essayer� dites � mon ami, laissez-moi essayer une derni�re foi�� Ce r�cit a lui tout seul m'a appris le sens du mot honneur, et gr�ce � cette m�taphore digne des plus grandes trag�dies, je me dis que ni la mort, ni les obstacles ne peuvent ternir la noblesse de ceux qui essayent une derni�re fois. Le souvenir d'une telle grandeur d'esprit, transpos� dans la r�alit� alg�rienne, nous fait dire qu'un jour ou l'autre, la lumi�re et la bravoure de gens � cette image guideront des intentions sinc�res, car la m�moire est un fleuve qui ne peut couler que dans l'oc�an du possible. Rien ni personne ne peut contrecarrer la marche de la dignit�, du progr�s et de l'accomplissement humain, car il en est ainsi : au d�but, il eut la lumi�re, et cette promesse divine � l'homme, l'univers et les c�urs la portent en leur sein. Mon p�re disait � propos du Maghreb, et plus particuli�rement de l'Alg�rie : mon fils les choses vont dans la bonne direction. Avant toute chose, Si Ahmed, comme l'appelaient ses proches, �tait un optimiste irr�m�diable, et un rationaliste acharn�. Ce qui lui permettait de toujours garder pleine mesure des d�fis humains, et enti�re confiance en la providence et ses desseins. A plusieurs reprises, j'ai eu � constater ses regrets et sa tristesse quant � la prise de pouvoir des �gens de la tradition� en Islam, au d�triment des �gens de la raison�. Il �tayait toujours ses propos par des r�f�rences historiques pointues, qui allaient des �protestants � de l'Islam comme il les appelait, les �mu'tazilats �, aux grandes �pop�es scientifiques de Bagdad, Cordoue et Grenade. Tr�s t�t � son contact, j'ai pris connaissance de noms comme Avicenne, Averro�s, El Ba�roni, Al Kindi. Tous ces noms illustres attestent de la pr�sence des musulmans dans le panth�on du savoir, et sont la preuve que l'Islam n'aurait jamais d� se r�signer � la fermeture, la crispation et l'intol�rance. Un autre Islam est possible, et l'histoire nous l'enseigne. A toutes les tentations de la reddition et de la capitulation, Si Ahmed opposait la r�alit� d'une �poque de floraison et de raison. S'il y a d�j� eu un matin, c'est que pour l'�ternit�, il faut croire au lendemain.
Il avait � l'�gard de la nature un �merveillement presque enfantin
La conviction que nous n'avions rien � envier aux Occidentaux �tait ferme et constante, et la po�sie d'un Omar Kheyyame suffisait � lui faire tirer un sourire sage et r�solu : non la science, la r�ussite et le d�passement n'avait rien d'exclusif � un seul peuple, mais �tait un bien commun � toute la famille humaine qui �tait riche de par ses d�clinaison culturelles multiples. Il d�plorait souvent dans nos apart�s la supr�matie de l'�motion sur le bon sens dans les contr�es musulmanes, et il faisait remonter la cha�ne du d�clin � la succession id�ologique qui va de Ibn Hanbal � Ibn Abdel Wahab, en passant par Ibn Thaymiya. Sans �tre trop savant, on peut pr�ciser que Si Ahmed voyait dans la sph�re d'ob�dience islamique un combat entre ceux qui essayaient d'�lever l'homme par le savoir et le raisonnement, et ceux qui l'emp�traient dans des consid�rations et des croyances r�trogrades, juste bon pour d�pouiller l'humanit� des moyens de son accomplissement. �Il faut se m�fier du r�gne de l'�motion, et ne jamais oublier que la raison est la gardienne du logis�, disait-il. Il avait cette �foi� incommensurable aux bienfaits de l'approche rationnelle, et portait la science au sommet de l'ordre social et historique, et m�me s'il admettait les limites de la raison, on ne peut �voquer sa m�moire sans rappeler � combien il affectionnait l'exercice intellectuel, porteur de sens et de salut pour le genre humain. �L'homme n'est ni bon ni mauvais, il est de son temps�, martelait-il � qui voulait l'entendre. Il avait une confiance presque mystique dans la marche de l'histoire, et ne voyait dans les convulsions de celle-ci qu'un renforcement de l'exp�rience humaine en vue de sa pl�nitude. �L'humanit� ne se pose que les questions qu'elle peut r�soudre�, tel �tait son credo. Il abhorrait pardessus tout la victimisation, et croyait en la possibilit� qu'� l'homme de parfaire sa destin�e. Il n'aimait pas que des peuples ou des civilisations �justifient� leur �chec par des pr�textes � bon compte. Il �tait passionn� de philosophie et de musique germanique, d'histoire et de politique fran�aise, tout en restant tr�s proche de la nature. A l'abstraction parfois trop pesante, il opposait �le sens de la r�alit�, acquis tr�s t�t au contact de la mer et de son silence. Plus jeune il �tait un fieff� p�cheur, et cette intimit� avec la mer cr�a en lui la n�cessit� de toujours se battre contre les �l�ments de la nature et de l'histoire. Pour lui, la grande bleue et ses tumultes �tait une all�gorie de la vie ; toujours tenir la barre m�me dans les moments de doute, esp�rer le rivage m�me dans les brumeuses routes, et toujours garder � l'esprit l'horizon du port qui nous attend. Combien de fois je me suis lev� en le trouvant avec sa cigarette, seul et c�toyant le r�gne des arbres et des oiseaux. Il �tait intarissable sur leurs noms, leurs origines et leurs bienfaits. Il aimait se blottir dans le silence de la nature, en bon verdier qu'il est, rendant hommage � son milieu par la m�ditation et la contemplation. Il avait � l'�gard de la nature un �merveillement presque enfantin, et ce sentiment quasi panth�iste, il le nourrissait comme un rayon rend vie � une saison. Me voyant parfois obscurci et encombr� par le poids de la r�flexion, il me racontait toujours l'histoire de la �salade�. En fait, durant ses ann�es d'�colier, un ma�tre leur demanda un travail � domicile, une sorte de travail pratique. L'exercice consistait � faire pousser des feuilles de salade. Eh bien ce fut la premi�re vraie r�v�lation de la vie du tout jeune Khelifi Ahmed. De ce moment de gr�ce innocent et profond, il en garda le go�t de la simplicit� et de l'humilit�. �Mon fils, je regardais pousser ma salade, et c'�tait pour moi une des plus grandes joies de ma vie.� Tr�s t�t, confront� � mes angoisses m�taphysiques dont je lui faisais part, il me r�pondait �va voir pousser ta salade, il n'y a que cela de vrai�. C'est cette sagesse, plus qu'autre chose, qu'on gardera de lui ; il �tait cultiv�, lettr� et engag�, mais pourtant c'est ce recul, ce bon sens qui nous ont le plus marqu�s. Car on a beau conna�tre ses textes, il n'en est rien si on n'a pas fait l'exp�rience du retour � soi, seule � m�me de nous conf�rer paix et lucidit�. �Le plus important dans la vie, c'est de dormir tranquille.� Il paraphrasait mon grand-p�re, qui avait coutume de lui dire avec un fort accent : �Ecoute Ahmed, moi je dors comme un bibi ; �a vaut tout l'or du monde.� Sans aucun doute, Si Ahmed a v�cu tranquille, et est parti tranquille tant il est rest� en accord avec lui-m�me et ses principes. Jusqu'� la derni�re seconde, il inonda son monde de par sa force et son optimisme, et la meilleure fa�on de lui rendre hommage, nous ses proches et ses amis, c'est de continuer le combat. Mon p�re m'a appris qu'il n'y avait pas de pi�tre combat, et que tous, nous sommes appel�s � mener le n�tre. Chacun � notre niveau, � notre hauteur, nous avons notre combat ; l'essentiel, disait-il, �tait de donner un sens � sa vie. Soit aimer quelqu'un, soit se battre pour ses id�es ou tout simplement �tre l� et exister dignement. Pas d�vot durant sa vie, il croyait tout de m�me � sa �bonne �toile�, qui le m�nerait toujours � bon port, disait-il. Il me disait lors de conversations m�morables, avec une pointe de bravoure morale : �Fils, lorsque tu ne sais pas o� aller, tourne-toi et vois d'o� tu viens��
Son adh�sion au �candidat� Benflis
Et comment �voquer la m�moire de Si Ahmed sans mentionner son parcours militant, voire politique. Tr�s t�t engag� pour le droit des travailleurs et des ouvriers de par son extraction id�ologique, il devint plus tard un des piliers de l'UGTA. Beaucoup au gouvernement et aux affaires lui ont �reproch� d'outrepasser les lignes du syndicalisme pour �d�border� sur le champ min� de la politique. Mais lui, surtout aux c�t�s du regrett� Benhamouda, ne s'en cachait pas, et consid�rait que la politique �tait une chose trop s�rieuse pour la laisser aux autres. Il partageait avec l'ancien secr�taire g�n�ral une vision de grandeur et de fiert� pour l'Alg�rie, et tr�s t�t leur collaboration aboutit � la n�cessit� de cr�er un �front� qui regroupe toutes les bonnes volont�s soucieuses du bien du pays. On conna�t par la suite le sort qui a �t� r�serv� � cette entit� politique, d�tourn�e de sa vocation premi�re par des mains peu scrupuleuses. Mais il n'est nullement ici le temps des r�glements de comptes, tant la hauteur d'esprit de Si Ahmed nous astreint � une certaine forme de pudeur intellectuelle, qui fait elle-m�me r�sonance � son exigence de dignit� et d'honneur : quand on a c�toy� les plus grands, on a toujours peur de d�cevoir leur m�moire, comme le disait le po�te. Alors pour ne pas trahir leur legs, parlons, oui parlons et �crivons que ces deux comp�res d'un temps croyaient en l'Alg�rie �ternelle. Durant les crises qu'a connues le pays, les deux hommes, alli�s du droit et de la justice, ont toujours �uvr� � ce que l'unit� nationale soit pr�serv�e. Nous aurons � relater les faits plus en d�tails ult�rieurement, mais ce qu'il faut pr�ciser, c'est que la haute estime dans laquelle les deux personnages pla�aient la destin�e du pays, faisait d'eux des Elliot Ness en puissance, toujours alertes � l'int�r�t national, et vigilants quand � l'�volution des param�tres politiques de l'Etat alg�rien, lequel �tait cens� donner corps � l'�lan d'enthousiasme nich� au c�ur de chaque Alg�rien. �Nous avons �t� spoli�s de notre espoir�, me disait-il � chaque fois, avec une d�ception qui �tait trop appuy�e pour �tre objectiv�e ; non d'abord et avant tout, mon p�re et Abdelhak Benhamouda �taient des gens qui avaient l'Alg�rie chevill�e au corps, et ne transigeaient pas avec sa grandeur et son int�grit�. Pour d�crire et raconter toutes les p�rip�ties politiques, tous les hauts faits d'armes, parfois les d�convenues qu'a pu vivre Si Ahmed, il faudrait tout un roman qui porterait comme intitul� : �Il s'est battu, pour que l'on se souvienne. � Oui, en ces temps de disettes, de vaches maigres que conna�t notre pays, il est plus qu'obligatoire de rappeler qu'il y a eu des gens qui se sont battus avec le plus intense don de soi . Ni les al�as mat�riels, ni le froid, ni les coups du sort n'ont eu raison du combat l�gitime de ces deux patriotes. �Quand on a l'Alg�rie dans le c�ur, on ne se pr�occupe pas de son estomac�, r�p�tait-il � longueur de journ�e. Ce d�sint�ress�ment, cette vocation, ce sacerdoce, Si Ahmed l'a port� jusqu'au firmament de l'engagement. Les deux patriotes avaient une haute id�e de l'activit� de la raison, lumi�re parmi les contingences de la vie, et outre leur d�fense acharn�e du patrimoine �conomique alg�rien, des services publics accessibles � tous, ils misaient toute leur �nergie r�novatrice dans le secteur de l'�ducation, seul � m�me, d'apr�s eux, de sortir les peuples d'une torpeur chronique. L'�ducation est la base d'une nation, me r�p�tait mon p�re inlassablement, en pointant un doigt accusateur sur la r�cup�ration id�ologique dont faisait l'objet l'�cole alg�rienne. �En sus de la sant�, mon fils, c'est l'�cole qui donne vie � une nation.� Ces paroles, entendues maintes fois, resteront � jamais grav�es dans mon esprit. Citant Benhamouda, paix � son �me, qu'il aimait � appeler �Cheikh�, il me confia cette pens�e lourde de sens et d'espoir : �Si Ahmed, aux Etats-Unis, ils ont beaucoup de mus�es� sauf, ya Si Ahmed, que leurs mus�es, ils parlent du futur.� Cette irr�pressible confiance en la science et en la noblesse de l'activit� intellectuelle, les deux patriotes la partageaient. Tout comme leur foi inexpugnable en la capacit� de l'Alg�rie et de sa jeunesse a tutoy� la r�ussite. �Le monde est guid� par des id�es ; c'est les id�es qui m�nent le monde, fils.� Ce sentiment imp�rieux de la pr�dominance de la pens�e sur les affaires du monde, il ne l'a jamais tout au long de sa vie quitt�. Il n'en est pas jusqu'� son adh�sion au �candidat� Benflis qui fasse �cho � son pressentiment fort que l'Alg�rie s'en sortirait. L'ex-Premier ministre, pour lequel il avait de l'amiti� et de la fraternit�, repr�sente ses derni�res batailles dans l'ar�ne Alg�rie. �Je ne m'inqui�te pas pour mon pays, mon fils, car m�me si tous les hommes se liguaient, ils n'arr�teraient pas la marche en avant de l'histoire. Quelqu'un qui croyait en la vie et en l'Alg�rie, telle a �t� la destin�e de ce patriote fini. Papa, nous avons appris avec toi � ne pas avoir peur, car tu as v�cu debout, et tu nous as appris � combattre jusqu'au bout. Ton souvenir rayonne sur nos vies, comme l'�toile du bonheur console les amis. Asta sempre camarade�


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.