«Avec son engagement gouvernemental en matière de prévention et de lutte contre le VIH /Sida, l'Algérie est devenue un pays exemplaire au niveau de la région de l'Afrique du Nord, voire à l'échelle continentale». C'est Mme Cristina Amaral, la coordinatrice résidente des Nations unies en Algérie qui a déclaré cela à Oran, où elle s'exprimait à l'occasion de la célébration de la Journée mondiale de lutte contre le sida. On ne sait pas exactement où en sont nos voisins d'«Afrique du Nord» en matière de lutte et de prévention du sida, mais pour que l'Algérie soit ainsi consacrée «exemplaire» parmi eux, c'est que ce ne doit pas être très brillant et c'est le moins qu'on puisse dire. Ne parlons même pas du «reste de l'Afrique». On sait les ravages que fait la maladie dans nombre de pays de ces régions en raison de la faiblesse des moyens déployés pour y faire face, mais aussi de la qualité de l'environnement générale, fait de pauvreté, de sous-développement, de guerres et d'incuries politiques. On comprend dès lors ce que représente l'«exemplarité» d'un pays comme l'Algérie quand sa «performance» surclasse tout le continent. Et tel que formulé par la coordinatrice des Nations unies à Alger, ce n'est apparemment même pas évident ! «L'Algérie est un pays exemplaire en Afrique du Nord», avant de continuer «… voire à l'échelle continentale». N'est-ce pas. Si c'est avec les chiffres et les états des lieux que lui fournissent le ministère de la Santé et ses associons satellitaires que Mme Cristina Amaral a construit son appréciation pour donner ce bon point à son pays professionnel du moment, il n'est pas bien difficile de le comprendre. Pour exprimer le scepticisme «ordinaire» en pareille situation quant à la valeur de cette louange, on n'a peut-être même pas besoin de rappeler ce que peut bien valoir une «gentillesse» toute de courtoisie diplomatique et protocolaire ! Sinon pour savoir où en sont les Algériens avec la «prévention», il suffira d'un micro-trottoir pour se faire une idée sur la question : l'écrasante majorité d'entre eux ne savent rien du sida. Et quand on ne sait rien, il est difficile de s'en prémunir. Encore plus difficile de contribuer au bilan apparemment «largement positif» des autorités sanitaires dont on sait pourtant qu'elles excellent surtout dans l'art de nous cacher les vrais chiffres». Et de ne jamais afficher une réelle volonté d'affronter le «fléau» comme une maladie et non comme une honte. Ou encore de mettre tout sur le dos des migrants nigériens et maliens. Si la politique algérienne de lutte contre le sida était un exemple de réussite, ça se saurait, comme on dit. Il suffit de faire le guet dans la plus grand officine pharmaceutique d'Alger pour voir combien de clients demandent des préservatifs. L'insignifiance du nombre vous surprendra. Préservatifs toujours, on ne ferait pas l'injure à Mme Amaral de penser qu'elle ne sait pas qu'aucun organisme public, associatif ou humanitaire, n'en donne gratuitement. Et quand on sait que c'est le moyen le plus moins coûteux et le plus… efficace jusque-là en matière de prévention, on aura été édifié. Quand on sait qu'en matière de «sensibilisation», seule… l'abstinence sexuelle est franchement assumée publiquement par ceux qui la préconisent, on comprend un peu plus. Il n'y a pas longtemps, la majorité des étudiantes d'une résidence universitaire interrogées par un enquêteur pensait se protéger du sida en prenant… la pilule contraceptive. Comme on ne voit pas vraiment ce qui a pu changer depuis…