95 détenus ont passé l'examen du baccalauréat à l'établissement de rééducation et de réinsertion d'El Harrach. Dans une ambiance assez détendue, les candidats étaient assez décontractés et optimistes. Parmi eux, figurent deux jeunes femmes et 93 hommes âgés entre 20 et 60 ans dont certains sont déjà bacheliers, nous confie le directeur de l'établissement. Vingt-cinq professeurs ont été réquisitionnés par le ministère de l'Education nationale pour la surveillance et l'encadrement de l'examen qui s'est déroulé dans cinq salles, nous précise Abdelkader Khebaba, chef du centre d'examen, qui ajoute que les épreuves se sont déroulées dans de bonnes conditions. «Les candidats ont eu un comportement correct et nous n'avons eu aucun souci avec eux», a tenu à ajouter M. Khebaba. «Les professeurs surveillants sont sélectionnés au hasard par le ministère de l'Education nationale», nous dit Mme Z. Hafida, professeur de sciences naturelles et surveillante au centre, qui ajoute avoir eu des appréhensions quant à se présenter dans une prison : «Au début, j'ai eu très peur de surveiller des délinquants mais là, au bout du dernier jour, je confirme que les candidats détenus sont moins ennuyeux que les simples lycéens, et dorénavant, je demanderai à être affectée à la surveillance des épreuves dans les prisons». Un repenti revient passer le bac à El Harrach Hamid M., 27 ans, a été déclaré non coupable après avoir passé 14 mois dans la prison d'El Harrach. Il a été accusé d'avoir commis des actes terroristes à Réghaïa, la ville où il réside. Le jeune homme déclare avec fierté : «Après plus d'un an passé à la prison, je suis libre et innocent devant la loi et mon casier judiciaire est blanc comme neige. Voilà pourquoi je veux décrocher mon bac que je ne cesse de repasser depuis 4 ans. Comme ça, je prouverai que la prison n'est pas uniquement un lieu pour bandits», dira Hamid, l'air très serein. Concernant les sujets, Hamid dit qu'ils ont été abordables, en particulier pour quelqu'un qui a passé l'examen plusieurs fois. Un génie pas comme les autres Ammar B., 42 ans, docteur en pharmacie et propriétaire d'une grande pharmacie à Constantine, emprisonné depuis 3 ans et libre dans un mois, a déclaré que «l'examen était abordable et à la portée de presque tout le monde, du moins pour moi, vu que je suis pharmacien». Ammar ne doute pas du résultat et il est archi-sûr qu'il obtiendra son bac ; il joue même le rôle de professeur pour ses camarades qui sont assez faibles dans les matières scientifiques. Pour rappel, l'examen ne concerne que la filière littéraire. Quant aux sujets de philosophie, Ammar affirme qu'ils sont abordables, surtout le deuxième sujet qui a été choisi par la majorité des candidats vu qu'ils ont eu presque le même sujet à l'épreuve du bac blanc. Pressé de sortir pour fêter son mariage Ali Ch., 37 ans, ayant obtenu 3 fois le bac auparavant, ne cesse de passer et repasser l'examen. Il dira tout heureux que «l'examen était comme un verre de jus glacé en plein été». «Je ne me sens pas emprisonné ici, bien au contraire, j'ai tout ce qu'il faut pour m'encourager à étudier et à apprendre toutes les activités mises à la disposition du détenu», commente-t-il. Satisfait, heureux, Ali nous annonce que d'ici quelques jours, il sera «libre comme l'air» pour s'occuper des préparatifs de son mariage. Le 7 juillet, le centre de rééducation et de réinsertion d'El Harrach organisera une fête pour les candidats qui auront décroché leur bac.