Le jeune roi du Maroc, qui nous a habitués à son humeur maussade et ses dérapages discursifs, commence doucement à s'assagir. A la bonne heure ! Après tout, il est toujours bon d'avoir un bon voisin, jovial, avenant et plus si affinités… Parce que, ironie du sort, le monarque Mohammed VI a fortement déçu ici en Algérie. On attendait nettement mieux de sa part que d'entretenir et alimenter les rancunes et les rancœurs vis-à-vis de l'Algérie et ses responsables que furent le seul agenda diplomatique de son défunt père. Sa jeunesse à sa montée au trône en 1999 (35 ans), sa culture, ses voyages et ses fréquentations plaidaient pourtant en sa faveur pour être l'homme de la grande réconciliation algéro-marocaine. Mais il faut croire que l'ivresse du pouvoir fait tourner la tête. On a mis beaucoup de temps pour constater que Mohammed VI est une copie conforme de Hassan II. Tel père, tel fils, ou presque.C'est surtout valable s'agissant des relations avec l'Algérie. Le jeune roi fit forte impression à Alger quand il descendit, rue Didouche, au volant de sa berline, à la fin du sommet de la Ligue arabe. Beaucoup pensèrent naïvement que M6 nous déclarait sa flamme. Que le royaume allait retrouver l'Algérie et que l'ouverture de «Zoudj Bghal» était une question de temps. Fausse alerte. Mohammed VI eut juste le temps de humer l'air marin d'Alger avant de rentrer définitivement chez lui et boucher ses oreilles aux appels incessants pour un «Maghreb United». Depuis, sa majesté a fermé son palais à double tours et relancé la propagande anti-Algérie qu'il tient responsable de tous les maux de son royaume. Il y eut même des pics de tension durant ses 16 années de règne dont le summum fut atteint avec cette lâche profanation de l'emblème national au consulat d'Algérie à Casablanca. C'était le 1er novembre 2013. M6 avait adressé un curieux message de félicitations au président Bouteflika, à l'occasion de la Fête nationale, en envoyant ses nervis arracher rageusement le drapeau algérien du haut de l'édifice, sous le regard complice des policiers. Cette scandaleuse affaire, indigne des usages diplomatiques, a fini par un non-lieu pour les coupables… Ce coup tordu n'était hélas que le premier d'une série de fausses notes accumulées par un roi aigri vis-à-vis de l'Algérie. La dernière en date était de soutenir dans l'enceinte de l'ONU à New York, l'indépendance de la Kabylie et le mouvement MAK, dont il compare le combat à celui du peuple sahraoui. Même du temps de Hassan II, jamais les frictions algéro-marocaines n'ont atteint un tel niveau de tension. Mais ne voilà-t-il pas que ce même roi revienne à de meilleurs sentiment ! C'est en tout cas ce que suggèrent fortement ces petits gestes qu'on observe ces derniers jours. Mohammed VI vient de dépêcher son envoyé personnel et le patron de ses services à Alger, reçus par le Premier ministre, pour parler terrorisme mais aussi échanger des sourires. Il faut connaître les péripéties tumultueuses des rapports entre les deux pays frères pour mesurer la portée de ces petits pas. Et c'est tant mieux. On sait que le royaume piaffe d'impatience de reprendre son siège à l'Union africaine qu'il a quittée en 1984, du temps où elle s'appelait Organisation de l'unité africaine (OUA). On sait aussi que le roi redoute fortement la menace terroriste et les cellules de Daech qui écument son royaume. Il est loisible enfin de comprendre que l'espace économique de l'Afrique risque de se refermer sur le Maroc qui s'en trouvera chassé d'un immense marché prometteur. L'Algérie qui est l'un des trois piliers de l'Union africaine, paraît alors incontournable avec le Nigeria et l'Afrique du Sud pour «notre ami» le roi. Il serait naïf de soupçonner Mohammed VI et son makhzen d'un soudain coup de cœur pour l'Algérie. Mais en politique, comme en diplomatie, il n'y a pas de sentiments, il y a juste des intérêts à défendre quitte, parfois, à jouer le Judas. Mais le roi sait ce qu'il doit faire pour rejoindre l'UA. Cohabiter avec la Rasd. C'est une condition indépassable puisque la République sahraouie est un membre à part entière de l'organisation. Et si le Maroc voudrait s'inscrire dans cette perspective et laisser la question sahraouie trouver sa solution dans le cadre des Nations unies. L'Algérie et les autres pays membres n'hésiteront pas à lui dire : «Mrahba Moulay». Et que vive la fraternité algéro-marocaine ! Où c'est juste un rêve ? Bonjour !