Le FLN ne sait plus quoi faire de Abderrahmane Belayat. En pleine guéguerre pour la destitution de Abdelaziz Belkhadem et pour sa succession, l'homme a tout de suite adopté la posture de celui qui se situe au-dessus de la mêlée. Ça ne lui ressemble pas vraiment de jouer aux conciliateurs, mais on apprend à tout âge. Et il ne manque pas de bagout pour sa reconversion, M. Belayat ! Un peu à la manière d'un «milieu de terrain de balayage» en football qui se transforme en libéro parce qu'il n'a plus la condition physique de sa première vocation, il a entamé une seconde carrière d'intelligence dans le «placement» et d'«orientation» d'une défense dont on dit que c'est… la première attaque ! Apparatchik atypique, il ne manque ni d'intelligence ni de roublardise. Il a même ses petites finesses et ses grands coups de gueule qui ont fini par lui valoir quelques sympathies extramuros. Quand les grandes manœuvres ont commencé donc, il était plus évident de le trouver à la baguette que tenant le bâton par le milieu. C'est ce qu'il a fait pourtant, avec une incroyable réussite pour quelqu'un qui n'a pas la réputation de jouer au colleur de débris. Son ancrage interne aidant, c'est presque naturellement qu'il a été porté à cette responsabilité de transit qu'on n'attendait pas et dont on ne pensait surtout pas qu'elle allait être aussi longue ! Reconversion réussie, mais ça ne fait pas de Belayat un enfant de chœur pour autant. C'est un militant du FLN ! Il est vrai que quand il s'est positionné dans le rôle du «rassembleur», il avait bien clamé qu'il ne nourrissait aucune «ambition personnelle». Dans «les» états- majors du parti, il ne devait pas y avoir grand monde à en être convaincu, mais on pensait pouvoir suffisamment baliser le terrain pour rappeler à l'ordre d'éventuelles velléités de s'installer aux commandes par le fait accompli. Mais Belayat, dans ses «assurances» implicites, avait seulement dit qu'il ne voulait pas succéder à Belkhadem ! Il sait que ce dernier, comme tous ceux qui ont pu accéder à ce siège avant lui, ne pouvait pas être remplacé au pied levé. C'est-à-dire par un jeu de consensus interne ou encore moins par voie électorale statutaire dont personne n'ignore qu'elle est une vue de l'esprit. Il l'avait compris bien avant mais il a eu à le confirmer dans l'exercice de ses nouvelles «fonctions», il y avait peut-être plus de choses à tirer dans cette mission que les «frères» pensaient réduire à sa plus simple expression, celle d'expédier les affaires courantes tout en tentant de rapprocher les deux camps antagonistes dans la perspective de la mère de toutes les batailles. Et aux premiers mouvements de M. Belayat, la riposte a fusé ! Il faut dire que le «coordinateur» du FLN n'y a pas été de main morte. En s'attaquant au groupe le plus fort de la direction du FLN par la destitution de «leur» chef de groupe parlementaire du nom de Tahar Khaoua, il s'est aliéné tous les ministres du parti, dont le poids a toujours dépassé le cadre de leur rang organique. Quand on sait que ces derniers, comme les autres affiliés à ce groupe, ne sont pas assez naïfs pour que croire que cette bravade aussi insupportable qu'inattendue pouvait être un «acte isolé» ! Signe des temps, Abdelkader Besnsalah est en train de vivre quasiment la même situation au RND. Les grandes manœuvres ont commencé depuis longtemps, sinon on ne se retrouverait certainement pas dans cette situation. Elles se précisent seulement, même si au FLN comme au RND, l'heure n'est pas vraiment à la… précision.