Le ciel algérien est particulièrement sensible, mais pas à l'identique du marché international. La disparition des deux compagnies aériennes, Khalifa Airways et Air Liberté, vient de le démontrer. Notre territoire est si vaste qu'aucun autre mode de transport que l'aérien ne pourrait le couvrir. La politique volontariste que nous menons en direction de l'Afrique en dépend également. Enfin, l'importante communauté algérienne établie en Europe, et plus particulièrement en France, nécessite la mise en place d'un pont aérien adapté. Avant d'obéir à des contingences commerciales, ces trois axes impliquent l'impératif d'un service public sans faille. Pourquoi? Parce que plusieurs dessertes de nos contrées sans être forcément rentables doivent être désenclavées. Idem pour l'Afrique. Quant à la destination Europe, celle-ci connaît des moments de pics en dents de scie tout au long de l'année. Principalement, à l'occasion de fêtes ou de vacances scolaires. Un autre axe et non moins important dépend, lui aussi, du service public, c'est celui du pèlerinage et de la Omra. Pour toutes ces raisons et d'autres encore, le trafic aérien algérien se distingue des normes et repères qui ont cours ailleurs dans le monde. On ne peut, en effet, analyser l'état du transport aérien national avec les mêmes paramètres que ceux qui prévalent ailleurs dans le monde. Le 11 septembre, par exemple, a eu des conséquences graves sur le marché aérien international au point de voir des compagnies comme la Sabena ou Swissair mettre la clé sous le paillasson. D'autres comme United Air Lines ou Air France se sont vu contraintes d'adopter des plans d'austérité. La liste n'est pas exhaustive. Cependant, le même événement n'a eu qu'un impact relatif sur notre compagnie nationale. Air Algérie a subi la hausse exorbitante des primes d'assurances et des surcoûts dus aux aménagements d'ordre sécuritaire certes, mais son potentiel commercial reste intact. Que faut-il retenir de tout cela? Mondialisation ou pas, le marché aérien national a ses pro-pres spécificités. Pour désenclaver les lointaines contrées du pays ou pour assurer le retour au pays de notre forte émigration ou encore pour acheminer les pèlerins vers les Lieux Saints, Air Algérie s'est toujours fait un point d'honneur à combler toutes les défaillances des uns et des autres. On le constate aujourd'hui, avec la reprise de certaines destinations intérieures (Tébessa, Laghouat, Tiaret...) enclavées après la défection de Khalifa. On le voit aussi avec le renforcement du programme été 2003 sur les vols vers et à partir de Paris après la disparition de la compagnie Air Liberté et des vols vers les provinces françaises assurés précédemment par Khalifa Airways. Comme on l'a vu dans un passé récent lorsque la compagnie nationale a volé au secours de pèlerins laissés en rade par des voyagistes. Autant d'interventions qui font d'Air Algérie une entreprise de service public irremplaçable. L'Etat dispose là d'un formidable instrument qu'il peut actionner à tout instant. Un pavillon national qui perdrait de ses capacités d'intervention si on venait à ouvrir son capital au privé. L'Etat, pour avoir les moyens de sa politique devra mettre à contribution le Trésor public. Alors qu'aujourd'hui il en est soulagé. Pour que soit maintenu ce rôle de «pompier» du ciel algérien que remplit Air Algérie au quart de tour, n'est-il pas prématuré de décider sa privatisation?