«Quand la légende est plus belle que la réalité, imprimez la légende!» (L'homme qui tua Liberty Valance) Il est irréfutable que c'est le cinéma américain qui domine tous les autres sur toute la planète: l'audace de ses pionniers, la maîtrise des technologies liées au 7ème art, la mobilisation de puissants moyens financiers, une liberté d'expression qui permet aux scénaristes de traiter tous les sujets, le star-system lié à une presse qui joue le jeu, la conclusion de contrats léonins imposés par une diplomatie agressive et une excellente gestion de la production jumelée à l'exploitation, ont assuré à ce cinéma un développement exponentiel qui ne cesse d'étonner le monde. Tous les genres se trouvent dans la merveilleuse machine à fabriquer les rêves: de la traditionnelle production hollywoodienne aux rouages bien huilés, jusqu'à l'artisanat de l'underground... Cependant, un genre est typiquement américain et trouve ses origines dans la courte, mais riche histoire des Etats-Unis. Son action se déroule essentiellement dans le nord du continent: du désert mexicain jusqu'à la forêt canadienne. Il embrasse généralement la période de la fin du XVIIe siècle, après la proclamation de l'indépendance jusqu'au début du XXe siècle quand le valeureux éclaireur Buffalo Bill, héros de l'expansion devient un patron de cirque. L'invention de l'automobile comme le développement des télécommunications et du chemin de fer sont pour quelque chose dans la fin de cette époque héroïque qu'un siècle de cinéma n'a pas fini de nous conter. Le western apparaît dès l'invention du cinématographe en 1895, en filiation directe avec la littérature et la peinture prenant pour sujet l'Ouest sauvage américain. Il connaît son apogée aux Etats-Unis au milieu du XXe siècle avec l'âge d'or des studios hollywoodiens, avant d'être réinventé par les cinéastes européens dans les années 1960. Le western retrace un épisode symbolique de la naissance de la nation. La rude conquête de l'Ouest, la sanglante guerre de Sécession et les guerres indiennes qui se sont déroulées au XIXe siècle témoignent de la douleur qui fut nécessaire à la construction du pays. Il parait même que le western a contribué à forger la personnalité américaine. Le mythe du cowboy, simple vacher qui sera transformé en héros vertueux, trouve son origine dans la vie difficile des conducteurs de troupeaux de bovins qui vont parcourir les Grandes Plaines. Mais le western demeure avant tout l'histoire de l'avancée des immigrants européens de l'Est vers l'Ouest. Cette colonisation impitoyable se fera aux dépens des peuples indiens d'abord, puis de l'Etat mexicain né de la colonie espagnole. Le western alignera tous les personnages possibles et imaginables: les pionniers porteurs de valeurs européennes qui, une Bible à la main, vont occuper les immenses espaces déserts, les cultivateurs qui ne demandent que quelques arpents de terre pour réaliser leur terre promise, les éleveurs qui vont constituer la classe des futurs grands propriétaires fonciers, les aventuriers sans foi ni loi qui vont profiter de l'absence de loi dans ces nouvelles cités en bois pour prospérer, les diligences souvent attaquées, les justiciers qui feront régner l'ordre tel qu'il est pensé dans les villes policées, les chercheurs d'or toujours à la recherche de nouveaux filons et qui vont servir de prétextes pour les guerres contre les Indiens, les tribus indigènes mal organisées qui voient les territoires de leurs ancêtres se réduire comme une peau de chagrin, les nouvelles villes avec leurs tripots et leurs tricheurs, les trafiquants de toutes sortes qui traversent les lignes mal définies, les constructeurs de chemin de fer qui, avec l'aide des banquiers, vont réaliser le rêve d'une grande fédération, les pasteurs en quête d'une nouvelle Jérusalem... Tous ces personnages, on peut les retrouver dans la nouvelle série télévisée Défiance qui conte la reconstruction de la nouvelle Amérique après la guerre des mondes: la science-fiction ajoute au goût d'hier une qualité nouvelle.
