Le Code des marchés publics, code qui retient le plus l'attention des acteurs économiques nationaux en raison de l'importance des marchés de l'Etat, vient d'être amendé dans l'objectif de favoriser les entreprises nationales et de briser certains freins bureaucratiques. Des mesures visant à atténuer les effets néfastes de «la crise» que traverse le pays «sont prises en cascade ces derniers temps. C'est dans ce sillage que l'amendement du Code des marchés publics a été effectué récemment. Pour entrer, ensuite en vigueur dans pas plus de trois mois. Le nouveau Code des marchés publics, en effet, a introduit de nouvelles dispositions parmi lesquelles le recours au contrat de gré à gré, notamment lorsqu'il s'agit de projets prioritaires et d'importance nationale qui revêtent un caractère d'urgence ainsi que d'autres mesures d'essence économique dont l'objectif est de promouvoir la production nationale et les entreprises algériennes et celles de droit algérien. Concernant le gré à gré, le nouveau code stiple que «le recours à ce type de contrat est soumis à l'accord préalable du Conseil des ministres si le montant du marché est égal ou supérieur à 10 milliards de dinars». Au sujet du deuxième point, il est indiqué qu'une «marge de préférence d'un taux de 25% est accordée au produit d'origine algérienne et/ou aux entreprises de droit algérien dont le capital est détenu majoritairement par des nationaux résidents, pour tous les types de marchés». Le troisième point constituant une nouveauté dans ce texte, c'est le fait que «les consultations passent de 8 millions de dinars à 12 millions de dinars, selon l'article 13 du nouveau texte». En effet, selon l'article 13 du nouveau texte, tout marché dont le montant estimé des besoins du service contractant est égal ou inférieur à 12 000 000 DA pour les travaux ou les fournitures et 6.000.000 DA pour les études ou services ne donne pas obligatoirement lieu à passation de marché public». Le quatrième point, et sans doute le plus important, porte sur des avantages à accorder aux offres économiquement avantageuses dans le cadre de l'attribution des marchés publics. «En effet, ce ne sera plus l'offre la moins disante qui passe mais celle dont «l'offre est économiquement avantageuse». Ces mesures qui vont, sans nul doute, avoir un effet immédiat sur le fonctionnement de l'économie sont cependant, pour certains économistes, trop sérieuses pour être prises à la hâte et unilatéralement. C'est le cas de Lounès Hami, chercheur en économie, qui considère que «discuter l'importance ou la non-importance de ces mesures a posteriori relève d'un coup d'épée dans l'eau puisque, de toute manière, elles n'ont aucune chance d'être revues». Néanmoins, s'agissant de leur pertinence économique, M.Hami trouve que la préférence nationale en matière d'attribution des marchés publics devait être effective il y a de cela très longtemps. «Dans certains secteurs où la production nationale est assez forte, je pense qu'il est impératif d'avantager les entreprises de droit algérien. Dans le secteur du bâtiment par exemple, il aurait été très judicieux de bloquer toutes les importations de la robinetterie et de travailler avec BCR qui a un produit d'une très grande qualité et qui, en plus, a des dettes d'environ 20 milliards. Dans ce cas précis, même l'Accord d'association avec l'Union européenne ne peut pas poser problème puisque l'entreprise contractante est en difficulté, cas prévu dans le cadre de cet accord. Il s'agit, par ailleurs, de mettre des barrières à l'entrée dans ce type de cas», a-t-il indiqué. Au sujet du gré à gré, Lounès Hami a relevè que cela peut ouvrir des portes à une sorte de trafics d'influence et altérer, en plus, la logique concurrentielle qui doit, à elle seule, structurer le marché. Lounès Hami considère par ailleurs que «le fait que les consultations passent de huit millions de dinars à 12 millions est une bonne chose puisque cela va contribuer considérablement à la réduction du temps de l'attribution du marché mais aussi réduire les tracasseries administratives qui accompagnent le processus». Pour Mohamed Achir, économiste, le préalable existe déjà dans la pratique du gré à gré mais sous des formes parfois implicites de contrôle et d'autorisation administrative ou financière. Seulement, pour M.Achir, l'avis du Conseil des ministres reste à clarifier». De plus, indique-t-il, «l'action publique dans l'économie peut créer des conditions d'éviction du privé ou de favoritisme d'un privé surtout lorsque l'accès à la commande publique est codifié par des lois et des pratiques administratives ne permettant pas la concurrence et la transparence». Pour la marge de préférence de 25% accordée aux entreprises algériennes et de droit algérien, Mohamed Achir considère que «c'est une bonne chose, mais à condition que cet avantage soit conditionné par des contrats de perfor-mance et de compétitivité». «Les entreprises de ce genre doivent s'engager à améliorer le taux d'intégration de leurs produits et même s'inscrire dans une perspective d'exportation, sinon cette mesure ne fera que reproduire le système de distribution de la rente» a-t-il expliqué. Sur un autre volet, à savoir celui portant sur l'avantage des offres économiquement avantageuses, c'est-à-dire plus susceptibles de booster la production nationale et les entreprises nationales, M.Achir considère qu'il «est effectivement nécessaire de revenir à ce système d'évaluation et de sélection des offres des entreprises». «Le critère de l'offre moins disante en prix se répercute généralement sur la qualité et les délais de réalisation des projets. les maîtres de l'ouvrage se retrouvent par la suite dans des situations les obligeant soit à résilier soit à proposer des avenants moyennant des restructurations financières. Les entreprises de réalisation trouvent des techniques astucieuses leur permettant de récompenser leurs offres financières dites concurrentielles. Les bureaux d'études ne sont pas assez développés et spécialisés pour aider techniquement les maîtres d'ouvrage, la sélection et le suivi des projets», également souligné.