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Un crime contre l'humanité
ESSAIS NUCLEAIRES FRANÇAIS EN ALGERIE
Publié dans L'Expression le 13 - 02 - 2005

Le 13 février 1960 une puissance de feu nucléaire dépassant les 450 kilotonnes, soit 40 fois plus forte que la bombe d'Hiroshima, a été déversée, sans rémission, sur le sol de Reggane et In Iker.
Une tache noire et quasiment indélébile dans l'histoire de la présence française sur le sol algérien. Rendue aveugle par son acharnement dans la voie de l'acquisition de l'arme nucléaire, la France, faisant du peuple algérien des cobayes pour ses essais nucléaires, a manifestement violé le droit international humanitaire. L'étendue des dégâts est immense.
Le 13 février 1960 est une date qui a causé l'épouvante à la nation algérienne. Ce jour, la France fait exploser dans l'atmosphère de Hamoudia à Reggane sa première bombe atomique au plutonium sous le nom de code Gerboise bleue. Ce fut le début de toute une série de 17 essais et d'explosions nucléaires qui allait s'étendre jusqu'en 1966. Un document des archives militaires rendu public par l'Association des vétérans des essais nucléaires dans le monde rapporte des révélations accablantes sur le programme français en Algérie.
Ce document, datant du 6 février 1960 et signé par le général de division Ailleret, commandant le groupement opérationnel d'expérimentation nucléaire, laisse comprendre que les personnes qui n'ont pas été prévues dans des missions opérationnelles au site de tir de Reggane, n'ont pas été protégées contre le rayonnement et la lumière dégagés lors de l'explosion de la première bombe atomique française. Selon le document, les lunettes spéciales qui étaient destinées normalement à la protection des yeux n'ont pas été distribuées du fait de la non-diffusion de la note de service (photo du document ci-joint) relative à «la conduite à tenir le jour J».
Autrement dit, les populations de la région, livrées à elles-mêmes sans qu'elles soient conscientes de l'extrême gravité de la situation, ont donc été largement exposées aux effets des radiations sans aucune protection atténuant ou empêchant la pénétration du rayonnement.
Les expériences nucléaires réalisées au Sahara demeurent une tache noire et quasiment indélébile dans l'histoire de la présence française sur le sol algérien. Plusieurs maladies graves (leucémie, cécité..) sont apparues à la suite de ces essais tant atmosphériques que souterrains effectués à Reggane et à In Iker.
La France avait poursuivi ses tirs malgré le moratoire décidé en 1958 entre les Etats-Unis, l'Urss et la Grande-Bretagne, interdisant les essais nucléaires atmosphériques.
Défiant donc ces derniers et ne respectant point ce délai, la France, inquiétée par le contexte géostratégique de cette période, et voulant faire partie du club des puissances nucléaires, fait exploser dans l'atmosphère de Hamoudia à Reggane, le 13 février 1960, sa première bombe atomique au plutonium sous le nom de code Gerboise bleue.
Essais nucléaires atmosphériques
Les quatre premiers essais atmosphériques français ont été effectués sur le polygone de Reggane. Ce sont toutes des bombes atomiques au plutonium (matière fissile très toxique obtenue dans les réacteurs nucléaires à uranium). Trois ont été tirées en 1960 : Gerboise bleue, le 13 février; Gerboise blanche, le 1er avril et Gerboise rouge, le 27 décembre. Le dernier a été effectué le 25 avril 1961, sous le nom de code Gerboise verte.
Le premier tir Gerboise bleue fut plusieurs fois reporté, mais, en raison du caractère politique de cette expérience qui allait faire entrer la France dans le club des puissances nucléaires, l'Elysée pressait le général Ailleret, commandant des armes spéciales, qui était conscient du problème des retombées radioactives, de faire procéder rapidement à l'essai. D'un autre côté, la France craignait que la conférence au sommet, qui devait se tenir en mai à Paris, ne débouche sur une négociation suspendant les essais nucléaires. Elle voulait à tout prix obtenir et vérifier des informations techniques et scientifiques quant aux effets de la bombe. Cet essai, d'une puissance se situant entre 60 et 70 kilotonnes de TNT, aurait permis aux militaires français d'étudier les effets de la bombe sur la survie du matériel militaire et du personnel dans un environnement nucléaire.
Le 1er avril 1960, explose la deuxième bombe atomique Gerboise blanche. Là aussi, il s'agissait pour la France de se montrer déterminée dans la voie de l'acquisition de l'arme nucléaire.
Quant à la puissance de la bombe, celle-ci n'a pas été divulguée, mais Le Monde du 2 avril 1960 cite un chiffre trois fois moindre. Au plan militaire, cette expérience fut considérée comme «un pas en avant» dans la miniaturisation de l'arme (du point de vue masse critique) qui devient presque opérationnelle. Mais une importante contamination a eu lieu. Pour la troisième bombe du nom de code Gerboise rouge qui a explosé le 27 décembre de la même année, la littérature offre une puissance de 6 à 8 kilotonnes. A cet égard, le professeur Yves Roccard, qui était présent à toutes ces expériences et aussi chargé d'effectuer des mesures spécifiques, fait état d'un incident technique ayant eu lieu et qu'il attribue à une mauvaise coordination du service des essais.
Ce scientifique avait mis en cause le système d'amorçage de l'engin qui consiste, selon lui, à choisir le bon moment pour envoyer le flux de neutrons. Pour ce chercheur, «la bombe a été amorcée trop tôt (...)». D'autres expériences seront donc prévues pour la mise au point du système d'amorçage qui aurait été jusque-là défaillant, ce qui a pour effet d'augmenter davantage le taux de pollution radioactive dans la région. Le dernier tir atmosphérique français au Sahara, Gerboise verte, eut lieu le 25 avril 1961. Pour les scientifiques, cet essai est considéré comme un échec en raison de la précipitation avec laquelle il a été exécuté. Selon Le Nouvel Observateur du 5 février 1998, 195 soldats appelés du contingent «avaient servi de cobayes aux apprentis sorciers de la bombe». Qu'en est-il donc des autochtones?
Deux autres accidents ont été rapportés par la presse. Il s'agit de l'accident du 19 avril 1962 qui avait fait officiellement trois blessés.
L'autre a eu lieu le 28 juin 1962, quand le plutonium s'est déversé, dispersé d'une cuve et où 7 soldats ont été projetés à plusieurs mètres, avalant des poussières radioactives.
La fin de la guerre d'Algérie en perspective, la conjoncture internationale défavorable et les «échecs» enregistrés des expériences atmosphériques, ont amené la France à passer aux essais souterrains dans le massif du Hoggar. Cette démarche serait probablement dictée par une volonté de la France de satisfaire les accords internationaux que les autres puissances nucléaires s'apprêtaient à signer pour l'interdiction des essais dans l'atmosphère.
Le site a donc porté sur la région de In Iker, 100 km au nord de Tamanrasset, qui est un massif de granite (une roche volcanique fortement dure), le Taourirt Tan Affela où les services miniers du CEA ont creusé des galeries souterraines horizontales (portant des noms abrégés El, E2...) longues de 800 à 1200 mètres, pensant ainsi pouvoir «confiner» la radioactivité (c'est-à-dire l'empêcher de sortir dans l'atmosphère). Treize essais souterrains ont été réalisés à In Iker entre le 7 novembre 1961 et le 16 février 1966. Ces tirs avaient pour objectif surtout de mettre au point des armes nucléaires, même si la France avait annoncé que ces expériences avaient également des objectifs pacifiques pour l'utilisation future de l'outil nucléaire. La littérature spécialisée indique que l'étanchéité de ces explosions «n'est pas prouvée». L'explosion qui a eu lieu le 27 février 1965 sous le nom de code Monique a causé la mort de pas moins de 39 citoyens de la région d'In Iker (selon des témoignages), le nuage radioactif avait atteint les frontières de la Libye et 365 hectares de terre pollués. Un rapport du CEA datant de mai 1972 relatif aux dégâts causés par un seul tir conclut : «L'exemple précis d'une explosion permet de décrire en détail les modifications subies par la surface du massif, le Taourirt Tan Affala». Pour cette expérience, dans la zone la plus bouleversée, la dalle de couverture a été cassée sur au moins 20 mètres d'épaisseur et de grandes crevasses se sont formées. Tout autour de la montagne, les éboulements créés sont comparables aux plus grands éboulements naturels ; ils ont été accompagnés par une importante émission de poussière. Les dommages légers s'étendent à plusieurs kilomètres du point d'explosion. «Ce passage montre l'étendue des dégâts engendrés par une seule explosion». Dans ses Mémoires (1992), l'ancien ministre des Armées, Pierre Messmer (lui-même irradié) décrit, d'une manière apocalyptique, l'accident du 1er mai 1962 : «Le nuage noir nous enveloppe et il faut le traverser, masqués et couverts de nos effets spéciaux. Il est impossible d'évaluer le nombre de röntgen (unité de mesure de dose, ndlr) dont nous avons été irradiés car les pellicules sensibles au détecteur que chacun porte sont complètement voilées, preuve que la dose admissible a été dépassée». L'accident a suscité l'intérêt de la presse parisienne qui lui a consacré de larges espaces et, quelques semaines plus tard, elle fait état de précisions sur le sort des soldats contaminés qui auraient reçu des doses de l'ordre de 100 rems (1 Sv) !, alors que la dose limite pour les travailleurs du nucléaire ne doit pas dépasser 50 mSv par an.
Conséquences sur l'environnement et la santé
Des visites effectuées sur place par des chercheurs et historiens rapportent avec inquiétude que de grandes étendues de pâturage ont été transformées par les poussières radioactives. La surface du relief est restée noirâtre. La décontamination des zones polluées exige des sommes faramineuses. La gestion des déchets est également coûteuse. Les conséquences sur l'environnement et la santé peuvent être résumées dans un récit tiré d'une enquête effectuée par le quotidien El Moudjahid du 22 février 1993. Le journal rapporte: «Beaucoup de enceintes ont avorté et même des bêtes ont perdu leurs portées. La mortalité infantile et les maladies jusque-là inconnues dans la région ont fait des ravages juste après les essais atomiques. Les récoltes agricoles n'étaient pas en reste, elles étaient totalement perdues à Reggane, soutiennent des vieux rencontrés au Kaar Biréganl. (...). Aujourd'hui, les gens disent se sentir continuellement fatigués... Des maladies respiratoires, de la peau et des yeux, inexistantes il y a trente ans, continuent à sévir depuis les années 60. Aussi, depuis cette date, l'allaitement maternel chez les , dira un médecin rencontré à l'hôpital de Reggane, n'excède pas, quand il existe, deux mois et les enfants naissent de plus en plus chétifs. Il s'agissait donc d'une violation par la France du droit international humanitaire à l'égard des Algériens et de la nation algérienne. Selon A. Mansouri, chercheur en génie nucléaire, il appartient aujourd'hui, «d'exiger de la France une indemnisation pour les dommages occasionnés dans la région et pour sa population». Ces essais nucléaires constituent l'estampe d'un crime contre l'humanité qui, comme les crimes nazis, hantera l'histoire de l'Europe à jamais.


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