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Une magicienne au grand «art»
SOCIETE
Publié dans L'Expression le 07 - 07 - 2005

Elle ne se déplace que sur commande avec bien entendu, les frais de séjour et de déplacement.
Elle s'appelle Hadja, elle est pour les voyantes et autres vieilles du coin ce qu'est un professeur pour l'infirmier! Elle fait fureur dans le milieu féminin et ne se déplace que sur commande avec bien entendu, les frais de séjour et de déplacement, soit généralement la coquette somme de 20 à 30.000 DA. Au niveau des principales villes du pays, elle a tout un réseau de «correspondantes». Ces dernières sont là à l'affût des familles traversant des problèmes et alors, doucement, la correspondante glisse dans l'oreille de la femme en butte aux problèmes l'adresse et aussi le moyen de contacter la vieille et aussi les conditions de la ramener. Une dame de Tizi Ouzou qui a tenu à garder l'anonymat raconte d'abord ses déboires avant de parler de sa rencontre avec la «correspondante» et ensuite avec la vieille Hadja. «Depuis, la vie a changé et Dieu merci, le problème a disparu!». La dame en question, assez cultivée et ne croyant guère à la sorcellerie et autres pratiques magiques, a pourtant fini par y croire. «Vous savez, moi aussi je me disais que ces choses n'existaient pas et que cela a surtout prise sur les personnes faibles d'esprit!» Mais, assure notre vis-à-vis, depuis ma rencontre avec Hadja, j'ai changé d'avis! «Oui, il existe des personnes en mesure de vous aider et je ne regrette pas l'argent que j'ai donné, même si cela m'a coûté ma dernière chemise!».
La rencontre avec Hadja!
La dame de Tizi Ouzou, enseignante de formation, est aussi une mère de famille. Le problème qu'elle a rencontré est d'une nature si compliquée! Sa fille, une jeune femme d'environ 24 ans a, du jour au lendemain, voulu rompre avec son fiancé. Cette rupture est vécue assez difficilement par la mère et surtout par la famille car, d'abord, elle est venue comme un coup de tonnerre dans le ciel apparemment bleu d'une relation qui a duré près de cinq longues années et en sus, elle a été si soudaine et si inattendue que cela a amené la famille à se poser des questions. Ainsi, et selon la dame, sa fille, et du jour au lendemain, non seulement ne voulait plus entendre parler de ce fiancé mais en sus elle avait un comportement des plus bizarres. Elle refusait de s'alimenter et avait même délaissé son travail. Evidemment, l'explication rationnelle est que suite à cette déception amoureuse, la jeune fille a sombré dans une sorte de léthargie. La famille et la mère sont catégoriques: leur fille est possédée par l'esprit malin ! Aussi, la maman ne cesse de taper à toutes les portes. Psychologues, médecins, talebs... tout y est passé en vain! Un jour, alors que la dame en question était chez sa coiffeuse, «une façon d'oublier le stress!», explique-t-elle, une dame d'un certain âge m'aborde et à mon air soucieux me demande les raisons de cet état. Je m'en ouvris à elle car j'avais besoin de me confier! Quand je termine mon récit, elle se tait un long moment avant de me dire: «Si vous le voulez je suis en mesure de vous montrer quelqu'un qui pourrait vous aider!». Je ne savais plus quoi dire ! Comment une femme quelconque peut-elle m'aider là où des psychologues et autres sommités médicales ont échoué ! Je saisis cette perche et me considérais comme une femme «sauvée des eaux» même s'il faut préciser que je ne croyais pas beaucoup à ce genre de «médication» mais, que voulez-vous, j'avais besoin d'une aide quelconque, j'étais désemparée! Aussi, le jour même, je fus présentée à la «correspondante» en question. C'est une dame assez jeune et fringante d'aspect et surtout qui a le don de vous convaincre. Rendez-vous avec la Hadja fut pris et j'ai accepté toutes les conditions. Frais de transport, hébergement et versement, après succès de l'opération, de la somme de 30.000 DA. Près d'une quinzaine de jours après cette rencontre, Hadja est enfin chez moi! A son entrée dans la maison, ma fille se crispe et alors que je lui présentai cette vieille comme étant la grand-mère d'une collègue, la réaction de ma fille fut bizarre! C'est comme si elle sentait que quelque chose se tramait contre elle! Elle se cabra presque et j'étais déroutée!
La médication
Le soir même de son arrivée, Hadja s'essaie à ses mixtures. Tout en marmonnant des formules incantatoires, elle est là avec ses herbes à préparer une décoction.
Le tout a duré près d'une heure. Ensuite, elle prend un verre d'eau et après avoir prononcé ses formules, asperge ma fille qui d'ailleurs sursaute comme si elle recevait sur le corps des étincelles de feu brûlant.
L'étonnement de la famille est grand quand à peine aspergée par cette eau, ma fille changea de conduite. Elle qui s'était emmurée dans le silence, s'est mise tout de suite à parler avec nous. Son attitude changea de tout au tout et j'ai eu cette agréable impression d'avoir retrouvé ma fille.
C'est pour cela que j'ai accepté de payer et encore avec un plaisir certain la somme exigée! Et la dame de conclure: «Vous savez, payer trente mille dinars pour sauver d'une dépression sa fille c'est finalement pas cher!». Elles sont nombreuses, les qui comme Hadja se nourrissent de la crédulité des gens et même dans les milieux instruits, les se rabattent sur ce genre de personnes qui savent se débrouiller pour rasséréner les unes et faire miroiter l'espoir aux autres. En cette période difficile économiquement notamment, et où les jeunes sont à la recherche de l'eau rare, les sorcières, les talebs et autres cartomanciennes ont de l'avenir!


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