«Nous n'avons pas de mêmes walis partout» L'investisseur privé se drague et se séduit. Les walis doivent s'approprier la culture du marketing. Ils reçoivent les mêmes instructions, ils ont le même pouvoir et prérogatives, mais certains se donnent la peine et forcent les choses, tandis que d'autres se contentent du minimum et préfèrent tourner le dos aux problèmes. Il s'agit là des walis de la République, premiers représentants du gouvernement à l'échelle locale. Ce constat désolant n'est pas établi uniquement par les observateurs, mais par les opérateurs économiques eux-mêmes. Nacéra Haddad, vice-présidente du Forum de chefs d'entreprise (FCE), a mis à profit récemment, son intervention à l'occasion de la tenue d'un forum national sur la fiscalité, pour tirer la sonnette d'alarme contre ce qu'elle appelle un décalage entre la politique centrale et la politique locale. «Nous n'avons pas de mêmes walis partout; à croire qu'on est dans deux Républiques différentes. Certains walis fournissent des efforts et déroulent le tapis rouge aux investisseurs, alors que d'autres refusent de les recevoir et continuent à leur mettre les bâtons dans les roues», s'est-elle indignée, avant d'ajouter: «Ce n'est pas normal que dans certaines wilayas on assiste à la montée des dizaines de zones d'activité, alors que dans d'autres le pourcentage est de zéro. Cette situation doit connaître son épilogue en urgence», plaide-t-elle. Les walis de la République n'ont, selon Nacera Haddad, aucun argument pour justifier leurs attitudes, dès lors qu'ils reçoivent les mêmes instructions et travaillent en fonction d'une même et seule feuille de route, à savoir celle du gouvernement. La femme d'affaires Nacéra Haddad a saisi par ailleurs, l'opportunité pour inviter les walis à s'approprier la culture du marketing. «L'investisseur privé se drague et se séduit», a-t-elle laissé entendre. «Le décalage entre les instructions du gouvernement et la réalité des choses sur le terrain ne se situe pas seulement, fera observer la vice-présidente du FCE, à l'échelle des walis, mais aussi au niveau des différents guichets, des différents services.» Pour Nacéra Haddad, c'est la persistance de ces pratiques et de cette mentalité bureaucratique qui a fait que la densification des entreprises est faible en Algérie en comparaison avec les pays voisins. S'appuyant sur les chiffres, la conférencière a fait savoir que la densification des entreprises en Algérie est de 22 entreprises pour 1000 habitants, alors qu'elle est de 50 à 60 entreprises en Tunisie et au Maroc. Intervenant de son côté lors de ce forum, le professeur et expert en économie Abdelhak Lamiri a indiqué que la passivité des walis, des chefs de daïras et des P/APC se paye doublement. «En plus du retard que leur politique passive provoque sur le développement de leurs localités respectives en termes de croissance donc en termes d'urbanisme, les responsables en question privent leurs wilayas et par conséquent leurs concitoyens de ressources financières supplémentaires qui devront être induites par la fiscalité», souligne le professeur. «La fiscalité est un véritable levier de développement. Elle contribue de manière très importante dans la richesse des localités et dans leurs budgets de fonctionnement», a-t-il insisté.Il faut dire sur un autre plan que la persistance de la bureaucratie dans l'administration algérienne est reconnue aussi par les pouvoirs publics. Le ministre de l'Industrie et des Mines, Youcef Yousfi, a reconnu récemment que le mal de la bureaucratie n'est pas entièrement éradiqué. «La bureaucratie et les lourdeurs administratives pénalisent encore le développement et l'investissement en Algérie», a-t-il signifié en intervenant au forum du journal El Moudjahid. La solution contre ce fléau pour Youcef Yousfi est d'aller rapidement vers la numérisation de l'administration. Il est à rappeler que l'ambassadeur des Etats-Unis en Algérie a accablé récemment l'Algérie, en qualifiant son climat des affaires de défavorable et de décourageant.