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Les souffrances du jeune Ahmed...
72E EDITION DU FESTIVAL DE CANNES
Publié dans L'Expression le 22 - 05 - 2019

L'acteur qui crève l'écran au milieu, entouré de l'équipe du film
Les Frère(s) Dardenne de retour à Cannes, pour la huitième fois, sans forcément changer la composition d'une recette qui jusque-là leur a porté chance et récompenses et souvent le succès public en prime.
Et voilà les maîtres belges qui arrivent, à Cannes, avec «Le Jeune Ahmed» et pour la huitième fois, sans forcément changer la composition d'une recette qui jusque-là leur a porté chance et récompenses et souvent le succès public en prime! Seule nuance, de taille toutefois, c'est que, pour la première Jean-Pierre et Luc Dardenne, emboîtent le pas à l'actualité brûlante, explosive même. Celle qui a secoué la Belgique et le reste de l'Europe et dont le point d'orgue, macabre, furent l'attaque d'une salle de concert parisienne «Le Bataclan» et de l'aéroport de Bruxelles. Il y avait donc le risque, dans ce cas, que les Dardenne, qui avaient auparavant excellé dans le documentaire, n'y fassent, plus ou moins, appel, pour aborder une fiction sur ce genre de thème. Mais force est de constater qu'à cette tentation, ils ne semblent pas y avoir résisté trop longtemps (mais pas souvent, il est vrai). Et c'est comme cela qu'un léger coup de canif aura été donné à ce qui a fait jusque-là leur credo: une certaine neutralité bienveillante, échappant à tout manichéisme.
Chronique d'un meurtre annoncé
Le diable se nichant dans les détails, il y en a un qui, de par sa récurrence - le rite des ablutions montré plus d'une fois, dans sa méthode, la plus «Assimil» - suggérait que la «radicalisation» commencerait (aussi) par la prière et son observance la plus stricte. Or on imagine bien que ce n'est pas dans le Coran que le jeune Ahmed aurait trouvé le «permis» de rejeter sa mère, non voilée, ses soeurs et celui d'exécuter son enseignante qui se proposait d'initier à la langue arabe, par la chanson, au lieu des seuls textes du Coran! Pourtant, le héros de cette «chronique d'un meurtre annoncé» tentera de passer à l'acte en se rendant un jour chez sa prof, Madame Inès, pour lui sauter dessus, sur le palier de son appartement, une lame dans la main et un «Allahou Akbar» en guise de hallali. Elle s'en sortira avec des blessures légères et Ahmed avec une mise en quarantaine, dans un espace ouvert, une sorte de ferme-école, un centre de «déradicalisation» (sic).
Une approche éthique
La nature, la bienveillance des encadreurs réglées, jusqu'à la caricature, sur les horaires de prière du jeune délinquant belge (lui rappelant l'imminence de la prochaine prière, tel un coucou annonçant l'heure). En subtil contrepoint il y aura, heureusement, les approches de la jeune Louise, la fille des fermiers qui l'initie aux travaux des champs, mais tentera aussi de lui faire découvrir l'éclosion des sentiments, leur pureté, à cet âge. Vainement, sans doute parce que les cinéastes belges ont déjà emprunté un chemin balisé par une conception paralysante de la pureté, justement, qu'il pense déceler dans l'approche de la religion par cet adolescent magistralement campé par un débutant, Idir Ben Addi. Y voyaient-ils une définition de la «pureté» chez cet apprenti fanatique, qui a sauté l'étape de l'initiation à la foi, grâce à la bonne prise en main d'un jeune imam-épicier (l'Arabe du coin, comme on dit, en France)? Ce «gourou» séducteur aussi bien que manipulateur et qui se laissera déborder par son»élève» qui sautera les étapes vers le djihadisme en s'attaquant à Mme Inès, l'enseignante.
Férus de philosophie, les Frères Dardenne, avaient certainement en tête, «Les souffrances du jeune Werther» de Goethe. Sauf qu'ils ont dû l'oublier au coin de leur table de travail, ce qui aura privé leur film de l'essentiel: une peinture profonde d'un état d'âme propre à tous les jeunes adolescents, en butte à de profonds questionnements, dus à des traumas qui les pousseraient même au suicide, comme pour Werther, ou l'acte suicidaire chez Ahmed. Chez Goethe, on avait alors parlé de ce «pic solitaire de la passion» sur lequel était perché le jeune Werther, mais pour le jeune Ahmed, l'on serait enclin à penser que les Dardenne n'ont pas fait beaucoup montre d'une approche philosophique, mais, plutôt ethnique. Une involontaire maladresse qui aura privé le film d'une démarche plus intéressante que celle qui a incontestablement mené le tandem des cinéastes belges, vers l'impasse scénaristique où le turn point n'a pu trouver place que dans l'ultime séquence. Cela devient par la force des choses un épilogue et où l'effet hérite de la chape moralisatrice que d'aucuns trouveront... rédemptrice! En oubliant Goethe, momentanément, le duo d'auteurs a-t-il sacrifié à la tentation entomologiste? Or, il s'agit d'humains, de jeunes gens élevés dans les mêmes quartiers, parfois aussi dans les mêmes ghettos, qui, pourtant ne cèdent pas tous aux sirènes du fanatisme religieux, trouvant alors leur voie dans l'insertion sociale et son corollaire, l'égalité des chances, loin de ces affinités électives de ce même Goethe, mais se rapprochant des sélectives affinités, nées dans les arrière-boutiques ou dans les salles de prière, qu'une certaine complaisance a laissé hors-contrôle. Or, c'est ce genre d'accommodement avec le non-réglementaire, qui va favoriser l'éclosion de ce qui est non désiré: le toxique. Toxicité qui touche en premier la majorité des compatriotes musulmans des auteurs du «Jeune Ahmed»...
Goethe et la rédemption
«La vie humaine est un songe: d'autres l'ont dit avant moi, mais cette idée me suit partout. Quand je considère les bornes étroites dans lesquelles sont circonscrites les facultés de l'homme, que notre tranquillité sur bien des questions n'est que résignation fondée sur des chimères», lit-on dans «Les Souffrances du jeune Werther» de Goethe. De tout cela, on ne perçoit pas grand-chose, sauf l'impression d'avoir raté même la queue de la comète dans cet opus de Jean-Pierre et Luc Dardenne en lice pour la Palme d'or! Pourtant on a une grande tendresse pour ce «Jeune Ahmed», sentiment inabouti, sans doute parce qu'il manquait ce qui aurait à comprendre mieux cette construction mentale qu'il a fait échouer à l'orée de son adolescence! On se retrouve alors, impuissant à relever les dégâts d'une aliénation qui s'empare des cerveaux à un âge de plus en plus précoce. Et on se surprend, une fois la lumière revenue, à la fin de la projection de presse, dans une salle, muette d'applaudissements, nostalgique de «La Promesse» (1995), qui contenait des outils de compréhension, à profusion, et qui révéla à la Quinzaine des Réalisateurs le talent des frangins- cinéastes, jusque-là appréciés pour la qualité de leurs documentaires. Alors on se réfugie, auprès de Voltaire, avec cette réflexion que nous avait suggérée, un jour, en cours, Mohamed Arkoun, l'islamologue penseur: «Le fanatisme est à la superstition ce que le transport est à la fièvre, ce que la rage est à la colère. Celui qui a des extases, des visions, qui prend des songes pour des réalités, et ses imaginations pour des prophéties, est un enthousiaste; celui qui soutient sa folie par le meurtre est un fanatique.»


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