La pandémie mondiale de coronavirus et la crise économique qu'elle sous-tend semblent s'imposer comme parmi des motifs objectifs d'un rapprochement algéro-français. Alger et Paris, liés par un dense partenariat économique qui fait de la France le deuxième fournisseur de l'Algérie, les deux pays partagent également un pan de leur Histoire, qui fait naître sur les deux rives un sentiment de destin commun. Ceci expliquant cela, le coup de téléphone d'Emmanuel Macron à son homologue Abdelmadjid Tebboune, mercredi dernier, ne relevait pas d'un simple acte de courtoisie. Les deux hommes avaient beaucoup de choses à se dire, d'où la «longueur» de la communication, d'ailleurs précisé par le communiqué de la présidence de la République qui a fait état de l'entretien entre les deux chefs d'Etat. «Le président de la République, Abdelmadjid Tebboune a reçu mercredi 18 mars 2020, un long appel téléphonique du président de la République française, Emmanuel Macron, au cours duquel les deux Présidents ont procédé à un échange d'informations sur la crise économique mondiale et ses répercussions sur la situation sanitaire et économique dans les deux pays, face à la propagation de l'épidémie du coronavirus», rapporte le communiqué. Les choses étant inter-dépendantes, en raison de la communauté algérienne établie en France, mais également des intérêts économiques français en Algérie, le tête-à-tête téléphonique a certainement servi à faire le point sur les conséquences de la pandémie sur les économies des deux pays. Il n'est pas besoin d'être un devin pour déduire l'effondrement des recettes touristiques françaises, comme la fonte des rentrées financières algériennes issues de la vente des hydrocarbures. Même si les tailles respectives des deux économies donnent à la France la prime d'une reprise plus rapide, il reste que le «coup de massue» du coronavirus, obligera Paris à chercher des relais de croissance dans une reprise rapide et efficace de son partenariat avec l'Algérie. Quant à notre pays, l'impact de la pandémie est parti pour être terrible, à tout point de vue, le président Tebboubne n'ignore certainement pas les avantages comparatifs dont dispose l'Algérie, de sorte à ce que la crise actuelle puisse devenir, au final, une opportunité historique pour l'Algérie d'intégrer une mondialisation «rénovée». Car, il est entendu, et tous les experts s'y accordent, le coronavirus est en passe de redessiner la carte économique et géostratégique du monde. Dans cette nouvelle réalité émergeante, les cartes seront redistribuées et les postures des Etats changeront immanquablement. En cela, la France, jusque-là 6e puissance économique mondiale et disposant de son «pré-carré» devra tout renégocier et c'est certainement le nouveau projet de Paris, dont le rapprochement avec Alger en fait partie. La dernière session du Comité mixte économique franco-algérien (Comefa), qui s'est tenue à Alger et le Comité intergouvernemental de haut niveau (Cihn), prévu en juillet prochain, témoignent d'une sérieuse reprise de contacts que la pandémie du coronavirus semble renforcer. Le partenariat que l'on souhaite renouveler sur de nouvelles bases prend en charge des questions régionales, internationales. C'est ce qui ressort du communiqué de la présidence de la République qui note que les deux Présidents ont évoqué, au cours de l'entretien téléphonique, «des questions liées à la mémoire nationale et à la nécessité d'en accélérer la résolution, outre la situation en Libye et dans la région du Sahel». La même source relève, sans autres détails que Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Marcon «ont convenu de renforcer davantage la concertation et la coordination concernant les questions d'intérêt commun». Il va de soi que la question mémorielle n'a pas été en reste, dans l'entretien téléphonique, d'autant qu'il est intervenu le jour-anniversaire de la signature des accords d'Evian. Le chef de l'Etat a justement évoqué dans son message à la nation, la nécessité pour l'Algérie de récupérer les crânes de résistants entreposés dans un musée français. Il y a lieu de rappeler qu'une procédure pour leur restitution a été engagé par l'Algérie. Ce n'est objectivement pas un sujet de friction entre Alger et Paris, mais il est entendu qu'il sera abordé entre les deux hommes de vive voix, à l'occasion notamment de la visite d'Etat qu'effectuera Abdelmadjid Tebboune en France. Il faut savoir en effet, que le président Macron a réitéré son invitation au président Tebboune. «Le président de la République a accueilli favorablement cette invitation et promis de l'effectuer dès l'amélioration de la situation, à une date devant être fixée de concert entre les deux parties», conclut le communiqué de la présidence de la République.
