La guerre que se livrent à distance Moscou et Pékin vaut bien la chandelle. Le champ de bataille est la mine de Ghar Djebilet située à Tindouf. C'est l'un des plus grands gisements de fer dans le monde, et ses réserves sont estimées à 3,5 milliards de tonnes, dont 1,7 milliard de tonnes sont exploitables. Un potentiel à faire rêver n'importe quelle puissance économique, surtout en ces moments de crise. Hier, ont commencé les choses sérieuses avec trois grandes entreprises chinoises qui ont donné le «la» pour la mise sur les rails de cet immense projet. Un mémorandum d'entente a été, en effet, signé à Alger, entre l'Entreprise nationale du fer et de l'acier (Feraal) et un consortium d'entreprises chinoises pour l'exploitation du gisement de fer de Ghar Djebilet (wilaya de Tindouf).La cérémonie de la signature s'est déroulée au siège du ministère de l'Energie et des Mines, en présence du ministre du secteur, Mohamed Arkab et de l'ambassadeur de la République populaire de Chine, Li Lianhe. Ce mémorandum d'entente porte sur la réalisation d'études et de travaux avec la partie chinoise constituée des entreprises CWE, MCC et Heyday Solar, pour le lancement de ce projet. Voilà les Chinois prendre une sérieuse avance sur leurs concurrents russes également très intéressés par ce gisement resté en jachère en raison d'un sérieux problème: la teneur en phosphore contenue dans le minerai de Ghar Djebilet est trop relevée, estiment les spécialistes. Il y a environ 2 ans, près de 3500 tonnes de minerai ont été acheminées en Chine pour les tests industriels de déphosphorisation. Les examens en laboratoire ont donné de «bons» résultats, selon les responsables du ministère de l'énergie et des Mines. Une fois ce problème technique réglé, les Chinois devaient s'attaquer aux autres contraintes que connaît ce gisement, à savoir le problème du transport et celui de l'eau. Entre-temps, les Russes ne sont pas restés bras croisés puisqu'ils ont réussi, eux aussi, à régler le problème du phosphore, mais en travaillant sur un minerai similaire. «Des spécialistes russes ont réussi à terminer les études de laboratoires sur la déphosphoration du minerai de fer du gisement de Ghar Djebilet. La technologie testée dans le cadre de ces études peut être appliquée à l'exploitation industrielle du gisement», a déclaré en octobre 2020, l'ambassadeur de la Fédération de Russie en Algérie Igor Beliaev, dans un entretien qu'il a accordé à L'Expression. Cependant, cette coopération a été stoppée net en raison de la pandémie. Mais les Chinois n'ont pas lâché prise puisqu'ils viennent de prendre une très sérieuse longueur d'avance. Maintenant que le problème du phosphore est réglé, les Chinois vont-ils s'attaquer à la deuxième contrainte qui est celle du transport? Vont-ils transporter le minerai par camions jusqu'à Béchar sur des distances allant de 800 à 900m? Le traitement de ce minerai nécessite de très grandes quantités d'eau. Où vont-ils trouver cette ressource? S'ils ont signé un mémorandum, c'est qu'ils ont une solution. La question minière est centrale dans le programme du président de la République. Au lendemain de son élection, Abdelmadjid Tebboune a fait état de projets pour la mise en valeur des ressources naturelles et minérales autres que le pétrole et le gaz. Le président a affirmé que le pays regorgeait d'importantes ressources inexploitées, rappelant, à cet égard, que l'Algérie occupait la 3ème ou 4ème place au monde en termes de réserves, notamment pour l'or, le diamant, l'uranium, le cuivre et bien d'autres. «C'est inconcevable pour l'Algérie de ne pas exploiter ces ressources et d'interdire aux autres de le faire», a-t-il dit. «S'il est nécessaire de s'associer avec des pays amis dans ces projets, nous le ferons», a ajouté le président de la République. C'est ce qui semble se faire.
