Les voix du parti sont négociées et vendues sur la place publique, les militants -toute honte bue- roulent pour d'autres partis. Le porte-parole du FLN indique que l'opération a commencé. «On doit d'abord recenser tous les dépassements; nous reprendrons les bulletins nuls, les bulletins annulés, chercher pourquoi ils ont été annulés puis pourquoi les abstentions et les raisons de chacun; nous devons procéder au cas par cas, parce que le délit entre un bulletin nul et une voix donnée à un autre parti est différent; nous devons savoir exactement pourquoi l'instruction du parti n'a pas été respectée...», précise-t-il, «comme nous devons évaluer les alliances qu'on a contractées avec d'autres partis». Les élections sénatoriales du 28 décembre ont dévoilé les tares qui entravent la marche du FLN vers la conquête du pouvoir. Désormais, la direction sait et le dit publiquement: les voix du parti sont négociées et vendues sur la place publique, les militants-toute honte bue- roulent pour d'autres partis, des militants ont présenté leurs candidatures en indépendants contre le candidat officiel du parti en faisant fi des instructions de la direction; enfin, l'indiscipline a accompagné cette élection à tous les niveaux et durant toute l'opération. Quels sont les remèdes disponibles et recours possibles pour mettre un terme à l'anarchie et instaurer la discipline? Le conseil de coordination s'est réuni pour trouver des réponses à toutes ces questions. Certains médias ont soulevé le problème avant même la tenue des sénatoriales parce que les indices des irrégularités étaient perceptibles, rappelle-t-on. Le porte-parole du FLN avait répondu que les auteurs de manquements à la discipline partisane seront sanctionnés. Il avait même déclaré à L'Expression que le parti disposait de moyens pour débusquer ceux qui oseraient céder leurs voix à d'autres partis. Maintenant c'est fait. Les militants ont vendu leurs voix. Des indices de fraude existent. Depuis les primaires, beaucoup ont affiché leur intention malgré les mises en garde répétées de la direction. Que faut-il faire? Belkhadem a répondu par deux fois à la question: «Même les trois qui ont gagné -tout sénateurs qu'ils sont- comparaîtront devant la commission de discipline». Ils ne seront pas radiés des effectifs mais recevront de sévères avertissements qui seront inscrits sur leurs dossiers et qui nuiront, demain, à leur avenir politique s'ils ambitionnent d'aller au-delà du Sénat. Pour Saïd Bouhadja, les moyens de sanction existent et diffèrent d'un cas à un autre, selon l'importance de la faute commise. «La base doit aussi prendre part à l'opération d'assainissement avant que les commissions de discipline ne se prononcent», ajoute-t-il. Belkhadem a déjà donné une partie de la réponse en les invitant à «s'essuyer la bouche», car ils ne seront pas alignés dans les prochaines élections législatives ou locales. Certains courent le risque de radiation si le délit «grave» de vente des voix est retenu contre eux. La commission de discipline tranchera en toute impartialité, une fois l'enquête terminée. L'équipe de Belkhadem semble accorder une importance capitale à la procédure des sanctions. Il faut mettre un terme à l'anarchie. Il faut, aussi, que les militants sachent qu'on ne peut aspirer à occuper le devant de la scène avec des comportements archaïques. Depuis l'avènement de Belkhadem à la tête du FLN, on s'emploie à changer les moeurs politiques, en introduisant, au fur et à mesure, des corrections; en instaurant un système de communication souple et performant; en établissant le dialogue pour résoudre les conflits sans recourir aux sanctions. Mais la base semble ignorer ces changements majeurs qui s'installent lentement dans la locomotive avant qu'elle ne prenne sa vitesse de croisière. La base continue de fonctionner comme au temps du parti unique -par le maintien de son aspect négatif- en barrant la route à toute tentative de renouveau, par les «faux-barrages» qui obstruent la voie aux compétences. Belkhadem l'a soulevé lors de sa dernière intervention à la Radio algérienne. Il considère qu'il s'agit d'un tout. Les comportements doivent changer. La fragilité du parti réside dans le fait que le militant ne se voit pas comptable de ses actes devant son parti qui l'a délégué pour le poste qu'il occupe. L'activité politique doit, également, être réhabilitée sur la base d'une éthique universellement admise et du sens de la responsabilité qui doit animer chaque militant à quelque position qu'il soit. Quand la formation politique, au niveau de la base, aura été assurée, quand le processus de filtration adéquat aura été trouvé et instauré, personne ne pourra négocier sa voix sur la voie publique. La rigueur aura ses droits quand le ménage aura été achevé dans la maison FLN.