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Derrière le masque
NUIT DE HENNE DE HAMID GRINE
Publié dans L'Expression le 21 - 10 - 2007

Par petites touches, Hamid Grine nous invite à une farce romanesque dans laquelle il démystifie bien des superstitions, en se livrant à une leçon de modestie.
Un roman à malices. Un homme, Maâmar, et une femme, Jade. Et l'on se dirige droit vers un scénario à attrapes dans lequel la femme, tenue par l'homme pour une gourde, montre qu'elle a plus d'un tour dans son sac. Ce faisant, elle réédite l'exploit des modernes contre les anciens.
Ce Maâmar Hbaq, son mari, tombé dans un tonneau de superstitions, comme d'autres tombent dans un panier de crabes, ne sait pas le bonheur qu'il a d'avoir pu décrocher un appartement à la cité de Aïn Naâdja. Un collègue lui ayant fait une blague en lui disant les sacrilèges qui restent attachés à ce nom (l'oeil de la brebis) le Monsieur va décider de fuir ce toit au lendemain de sa nuit de noces pour aller passer quelques jours dans un hôtel à Sidi Fredj, Le Bon Accueil, qui porte mal son nom et qui est bien le dernier endroit où un couple puisse passer sa lune de miel.
Ayant décidé d'écrire un livre expurgé des considérations politiques, au contraire de nombreux ouvrages qui en pullulent, l'auteur se surprend tout de même à quelques envolées contre le tout-Etat des années 70, générateur de pénuries et de mauvais services; sans compter le surcroît de bureaucrates.
L'arroseur arrosé
Nuit de henné(*) est de ce fait un peu l'histoire de l'arroseur arrosé. Le mari, qui sait tout, régente tout, comme il sied à une société machiste, va se laisser berner très gentiment par sa femme. Rien de méchant en vérité: elle ne le rend pas cocu et elle ne le vole pas. Elle va seulement lui donner une petite leçon de malice, comme il se doit, et surtout lui démontrer l'inanité de ses croyances et superstitions.
Généralement, c'est le contraire qui se passe: la femme reste très superstitieuse, craint le mauvais oeil et des tas d'autres sornettes, mais l'Eternel féminin démontre ici le contraire, et donc sa supériorité; ce n'est pas seulement une question de QI (quotient intellectuel). C'est aussi le résultat de l'éducation reçue et du milieu dans lequel Maâmar a évolué.
Nuit de henné est un peu une boîte à surprises. Ce n'est pas ce qu'on voit ni ce qu'on croit qui est vrai. Tout se passe dans la tête. Un monde imaginaire dans lequel les croyances recuites de la part d'un homme qui croit avoir tout essayé. Les autres, c'est l'enfer, et lui, c'est un sage. Mais dans cette vérité à géométrie variable, tout peut arriver. Or Maâmar, pour échapper aux maléfices et au mauvais oeil, embarque sa femme vers un hôtel de Sidi Fredj, il ne sait pas qu'il va être la victime des têtes noires, de ces hommes frustrés qui bombent le torse à la plage et qui reluquent sa femme blanche comme un cachet d'aspirine. La jalousie du mâle resurgit, montrant qu'on est dans un pays où les valeurs ont été bafouées par l'intrusion dans une modernité non assumée. «Si tu ne veux pas qu'on drague ta femme, tu n'as qu'à la laisser à la maison.»
Un logique coup de poing qui ignore que le contraire pourrait se dire: «Au lieu de reluquer les femmes des autres, pourquoi n'as-tu pas amené la tienne». Logique de fou contre logique de fou. On tourne en rond. Il aurait été plus facile et plus simple que chaque homme vienne avec sa propre femme, et ainsi chacun n'aurait pas à manquer de respect aux autres. On érige des barrières pour faire le lit des frustrations et des fantasmes qui sont autant d'effets boomerang. Cela veut dire qu'à partir d'une histoire très simple, mais dans laquelle la dramaturgie peut réserver bien de petites surprises, l'auteur, à travers son héroïne Jade, une oie naïve de prime abord, nous donne des leçons de savoir-vivre, mais surtout d'espièglerie. Comme dans toute dramaturgie, il y a bien une part de manipulation.
Ici aussi, la manipulation existe. Elle n'est pas apparente. Parce que l'homme, avec ses gros sabots, voudrait tout régenter, donne des ordres, décide, et la femme, avec sa finesse et ce sixième sens qu'on appelle l'intuition, va déniaiser ce mari qui se donne de grands airs. Eternelle Shéhérazade. Qui, ici, en l'occurrence, ne vas pas raconter des histoires à l'homme pour le tenir en respect, ou en laisse, mais tout simplement monte une toute petite intrigue bien gentille, et l'effet est aussi terrible.
L'effet boomerang
On a un Maâmar engoncé dans ses convictions, pétri de croyances aussi farfelues ou dépassées les unes que les autres, et on a une femme (Jade) qui vit sa vie au jour le jour, mais qui a aussi ses convictions, sans en faire étalage. Si à la plage, cette femme plutôt bien roulée fait semblant de ne rien remarquer du manège des têtes poires, c'est, sans doute, la meilleure position à adopter, mais peut-on échapper à une réalité dans laquelle la séparation entre les sexes est devenue si évidente, si pesante, que les têtes noires ne peuvent réagir que de cette manière et pas autrement. «Si un mauvais sort voit que quelque part tu es zinzin, il se dira que ça ne vaut vraiment pas la peine de s'abattre sur un fou.» Telle est la règle de Maâmar. Peut-être comme beaucoup de mâles. Faire le pitre quand il faut pleurer, pleurer quand il faut montrer qu'on est heureux. C'est-à-dire porter un masque. Dire qu'on est heureux parce qu'il ne doit pas montrer qu'il est malheureux. On nage dans le paranormal. Or le jeu de l'auteur, c'est justement de montrer que ce paranormal n'existe que dans notre tête. Et toute l'astuce de Jade réside dans ce jeu: démonter le masque. Casser la carapace de croyances qui empêchent les gens d'aller de l'avant. Après dix ans d'attente, Maâmar obtient de la société dans laquelle il travaille (la société nationale des barrages SNB) l'attribution d'un logement à Aïn Naâdja. Au lieu d'être ravi, surtout qu'il va enfin pouvoir épouser la femme de sa vie, Jade, voilà qu'il se pose d'autres questions: le nom de Aïn Naâdja (L'oeil de la brebis) ne lui convient pas et cache quelque part une mauvaise surprise. On est en plein irrationnel. D'où l'idée de l'auteur de démystifier ce genre de comportements, et le plus beau, c'est qu'il ne le fait pas avec de beaux discours et des théories à dormir debout, mais en permettant à la femme Jade de faire une petite farce à son mari.
On est un peu dans l'insoutenable légèreté de l'être. Des choses en apparence si simples et qui sont devenues compliquées, du simple fait de croyances surannées. «Il comprit piteusement qu'à ce jeu des masques, il avait trouvé son maître. Sa femme est un être qui n'a aucun masque mais sait masquer ses sentiments.» Quant au romantisme à la plage, c'était tellement beau que ça ne pouvait pas durer, «la fête était gâchée». En fait, c'était gâché dès le départ, parce que le mari, Maâmar, n'a pas les pieds sur terre. Lui qui dévore livre sur livre et affiche une grande culture livresque n'est finalement pas sorti de l'atmosphère feutrée des personnages de roman. La réalité est autrement plus amère.
Dans ce roman, il y a plusieurs lectures à faire. La première, qui est celle du héros Maâmar, ressemble par bien des côtés à beaucoup d'entre nous (n'est-ce pas, ne nous voilons pas la face), et puis, il y a une lecture au second degré, celle qui est faite par l'auteur, qui nous montre le mauvais côté des choses (celui des superstitions) pour nous amener à mieux appréhender le réel. C'est une leçon particulière, un peu comme une éducation sentimentale.
(*) Nuit de henné de Hamid Grine, Editions Alpha


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