L'administration Obama est-elle sur le point d'adopter une nouvelle position vis-à-vis de l'Etat hébreu ? La question mérite d'être posée à voir les divergences de vue profondes constatées après sa rencontre avec le Premier ministre israélien lundi. C'est du moins l'avis de Eytan Gilboa, professeur de sciences politique à l'Université Bar-Ilan de Tel-Aviv et expert des Etats-Unis. Ce dernier estime qu'“une ère nouvelle s'est ouverte dans les relations entre Israël et Washington”, car, explique-t-il, “le nouveau président américain n'éprouve pas de sentiment particulier envers Israël. Il défend ses intérêts et son approche globale du Proche-Orient, qui consiste à se rapprocher du monde arabe, fût-ce au prix d'un amenuisement des relations privilégiées avec Israël”. L'expert va plus loin en soulignant : “Si Netanyahu s'obstine dans ses options, il y a un risque de confrontation qui se traduirait par un prix énorme pour Israël.” Même son de cloche chez Gerald Steinberg, politologue à Bar-Ilan, qui met en exergue que “pour Israël, l'ère Obama n'a rien à voir avec celle de son prédécesseur George W. Bush, mais les liens historiques américano-israéliens, profonds et multiples ne peuvent pas être remis en question”. Il nuancera néanmoins sa conclusion en indiquant qu'“il faut attendre le discours d'Obama le 4 juin au Caire sur son approche de paix globale, mais il a convenu avec Netanyahu de leurs désaccords afin de les aplanir et il n'est pas question de pressions exercées sur Israël”. Il faut dire que l'inquiétude est de mise en Israël. En effet, à lire la presse israélienne d'hier, le ton est aux inquiétudes après l'entrevue Obama-Netanyahu, qui n'a pas débouché sur une convergence de vues entre les deux hommes sur la manière de régler le conflit du Proche-Orient. C'est un véritable refroidissement dans les relations israélo-américaines. Yediot Aharonot, principal quotidien populaire israélien, a résumé à la une la réunion en affirmant : “Ils sont d'accord pour ne pas être d'accord (...) Après trois heures d'entretiens, ils ne se sont pratiquement entendus sur rien.” Akiva Eldar, politologue et éditorialiste du journal Haaretz, longtemps en poste dans la capitale fédérale, est plus catégorique : “Je n'ai jamais vu une rencontre officielle à Washington à l'issue de laquelle autant de divergences ont été publiquement exprimées.” Il ajoutera : “On peut deviner ce que les deux dirigeants se sont dit entre quatre yeux pendant une heure et demie.” Ainsi, le président Obama, qui veut promouvoir une paix régionale globale au Proche-Orient, cherche le rapprochement avec les pays arabes, appelle à la création d'un Etat palestinien et veut engager un dialogue avec l'Iran pour le convaincre de renoncer à son programme nucléaire. Ces projets se heurtent aux positions extrémistes du Premier ministre israélien de droite. Reste à savoir, jusqu'à quand Barack Obama continuera à supporter l'opposition de Netanyahu à ses projets. Son discours le 4 juin prochain au Caire sera fort révélateur sur ce qu'il envisage de faire.